Le certificat d'urbanisme fait en ce sens figure d'exception au principe de l'application immédiate de la règle nouvelle puisque le législateur a prévu que les certificats d'urbanisme génèrent, sous certaines conditions, des droits acquis limités dans le temps (article L.410-1 du code de l'urbanisme). L'arrêt rendu par le Conseil d'Etat le 11 février 2004, « SA France Travaux » est une application par le juge des effets de ce document d'urbanisme original que constitue le certificat d'urbanisme.
Dans cette affaire, une société anonyme demande à la mairie de Carqueiranne la délivrance d'un certificat d'urbanisme portant sur un terrain en dehors des espaces urbanisés de la commune, à l'intérieur de la bande littorale de cent mètres, afin d'y construire une ferme aquacole. Le 30 octobre 1989, le maire de ladite commune délivre un certificat d'urbanisme positif indiquant que le terrain était soumis aux dispositions du plan d'occupation des sols (POS) de la commune approuvé en 1980 et révisé en 1985. Moins d'un an après la délivrance de ce certificat d'urbanisme, la société demande, le 23 mai 1990, un permis de construire ladite ferme sur le terrain visé par le certificat d'urbanisme. Par une lettre de juillet 1990, le maire de ladite commune fixe à trois mois le délai d'instruction de cette demande, et précise que si, à la date du 23 août 1990, l'autorité compétente ne s'est pas prononcée, la présente lettre vaudra permis de construire tacite. Par deux arrêtés datant de septembre et décembre 1990, le maire refuse à la société le permis sollicité, en se fondant notamment sur les dispositions du règlement du plan d'occupation des sols révisé le 28 septembre 1989 classant le terrain en zone réservée aux équipements de tourisme et de loisirs.
La question qui se pose devant la Haute juridiction administrative est double en réalité : l'intervention du maire qui accorde tacitement un permis de construire et refuse par la suite cette autorisation sur le fondement de l'interdiction de toute construction en dehors des espaces urbanisés dans la bande littorale de cent mètres est-elle légale ? Si l'intervention est légale, l'opération de construction se voit privée d'autorisation, et n'est donc pas valide. Mais si l'intervention du maire est jugée illégale, se pose alors la question de la légalité de l'opération de construction, et notamment du certificat d'urbanisme positif relatif à celle-ci. La seconde question est donc celle-ci : un certificat d'urbanisme qui, pour déclarer un projet de construction conforme aux dispositions locales d'urbanisme, se fonde sur la version ancienne du POS est-il légal dès lors que le nouveau plan, révisé à une date antérieure à la délivrance du certificat, s'oppose à un tel projet en classant le terrain en zone réservée aux équipements de tourisme et de loisirs ?
[...] Toutefois, pour écarter toute responsabilité de la société, le Conseil d'Etat se fonde sur le certificat d'urbanisme positif qui lui avait été délivré puisqu'en engageant des dépenses en vue de la réalisation de son projet de construction la société n'a pas commis d'imprudence présentant le caractère d'une faute. Autrement dit, le juge considère que la seule délivrance du certificat d'urbanisme positif justifie que le pétitionnaire engage des dépenses pour réaliser la construction projetée. Mais la délivrance d'un certificat d'urbanisme est sans incidence sur la délivrance d'un permis de construire. [...]
[...] Par deux arrêtés datant de septembre et décembre 1990, le maire refuse à la société le permis sollicité, en se fondant notamment sur les dispositions du règlement du plan d'occupation des sols révisé le 28 septembre 1989 classant le terrain en zone réservée aux équipements de tourisme et de loisirs. A la suite de ce refus de l'administration, la société agit en annulation de ces deux arrêtés et en condamnation de la commune pour le préjudice résultant du refus de permis de construire. Le 6 juillet 1995, le tribunal administratif de Nice fait droit à la requête de la société en annulant le refus de permis de construire opposé le 5 décembre 1990 par le maire. [...]
[...] Toutefois, ce n'est pas le seul motif développé par l'administration pour justifier un tel refus. Le maire se fonde, pour refuser le permis de construire demandé par la société dans le délai d'un an à compter de la délivrance du certificat d'urbanisme, sur les dispositions du règlement du plan d'occupation des sols révisé approuvé le 28 septembre 1989 dispositions qui classent le terrain en zone IV NA réservée aux équipements de tourisme et de loisirs Il faut ici revenir sur les faits extrajudiciaires pour comprendre les moyens de l'administration : le 30 octobre 1989, à la demande de la société anonyme, un certificat d'urbanisme positif est délivré par la mairie. [...]
[...] Par une lettre du 9 juillet 1990, le maire de la commune fixe à trois mois le délai d'instruction de cette demande et précise que si, à la date du 23 août 1990, l'autorité compétente ne s'est pas prononcée, la présente lettre vaudra permis de construire tacite. Pourtant, par un arrêté du 5 septembre 1990, et par un second de décembre 1990, le maire refuse le permis de construire sollicité. Sur ce point, le Conseil d'Etat et les juges de la cour administrative d'appel adoptent un raisonnement bien différent. [...]
[...] B L'illégalité de la décision de refus du permis de construire, conséquence de la responsabilité de la commune Le contrôle de légalité de la décision de refus opposée par la maire dans son premier arrêté du 5 septembre 1990 n'est que la conséquence logique du raisonnement adopté par le Conseil d'Etat : le maire n'ayant à aucun moment délivré de permis de construire, la décision du 5 septembre 1990 ne relève donc pas du régime applicable aux décisions de retraits des actes administratifs. Ceci explique, là encore, que le Conseil d'Etat adopte une solution inverse à celle des juges d'appel. En effet, les juges d'appel considèrent qu'un permis de construire tacite a valablement été délivré par l'administration. [...]
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