Conseil d'État, droit souple, caractère impératif, ministère de l'Europe et des Affaires étrangères, Palais Royal, arrêt GISTI, arrêt Fairvesta, arrêt Crédit Foncier de France, arrêt Institution Notre-Dame du Kreisker, texte constitutionnel, subvention, arrêt Ministre contre Société des courses de Questembert-Malestroit, arrêt Jamart, caractère réglementaire
En l'espèce, les services du ministère de l'Europe et des Affaires étrangères ont établi un document intitulé « Lignes directrices en matière de criblage » visant à lutter contre le blanchiment et le financement du terrorisme dans le cadre des actions humanitaires et de stabilisation. Plusieurs associations ont déposé un mémoire ampliatif au greffe du Secrétariat du Conseil d'État par des requêtes enregistrées les 14 février et 16 mai 2022, ainsi que le 27 janvier 2023. Les requérantes demandent aux juges du Palais Royal d'annuler le document litigieux précité et de mettre à charge de l'État une amende de 5 000 euros.
Les associations requérantes invoquent, dans leurs mémoires ampliatifs déposés au greffe du Conseil d'État aux fins d'annulation du document litigieux, le critère de justiciabilité de l'effet notable des actes de droit souple, ainsi que l'examen individuel devant être réalisé par le juge administratif.
[...] Seulement, comme le précise la 23e édition du GAJA, en dessous des arrêts Fairvesta et Numericable , l'acte administratif, c'est-à-dire un acte contestable auprès du juge, présente de manière classique également un caractère normatif. En l'espèce, les juges du Palais Royal ont énoncé au paragraphe sept que l'auteur de l'acte avait ajouté des conditions. Cela signifierait que le document litigieux fixe une règle nouvelle . L'acte litigieux est donc bien un document administratif classique , comme l'écrivait le rapporteur public Céline Guibe à l'occasion de la décision à commenter. [...]
[...] La question de droit qui s'est posée au Conseil d'État est la suivante : L'acte qui, tout en se présentant comme énonçant des lignes directrices, fixe une règle nouvelle, revêt-il un caractère réglementaire entraînant son annulation pour incompétence de son auteur, dépourvu de pouvoir réglementaire ? Le Conseil d'État a répondu par l'affirmative. La Haute Magistrature a donc fait droit aux demandes des requérantes. Les juges condamnent l'État à indemniser les associations demanderesses à hauteur de 3 000 euros et prononcent l'annulation de l'acte litigieux. [...]
[...] Les juges du Palais Royal ont commencé à distinguer entre les circulaires interprétatives et impératives avec l'arrêt de Section Duvignères de 2002. Les dispositions impératives ont été définies par le rapporteur public P. Fombeur dans les conclusions rendues à l'occasion de l'arrêt précité comme toutes les dispositions au moyen desquelles une autorité administrative vise soit à créer des droits ou des obligations, soit à imposer une interprétation du droit applicable en vue de l'édiction de décisions . En l'espèce, comme l'ont précisé les juges du Palais Royal au premier paragraphe, le document litigieux prévoit une obligation de criblage . [...]
[...] Le Conseil d'État se fonde sur le mutisme des textes constitutionnels et une jurisprudence constante illustrée notamment par l'arrêt de Section Distilleries Brabant de 1969 dans lequel il avait été considéré que le ministre, dépourvu de pouvoir réglementaire, ne pouvait que prendre des lignes directrices. En l'espèce, le Conseil d'État a donc caractérisé de bon droit l'incompétence du ministre de l'Europe et des Affaires étrangères dans son édiction de dispositions réglementaires. Les juges du Conseil d'État, dans leur septième paragraphe, ne se sont pas bornés à énoncer que le ministre avait édicté des dispositions réglementaires. [...]
[...] Or, les lignes directrices (rebaptisée ainsi en 2014) sont des actes permettant au chef de service de fixer une ligne générale de conduite par le biais d'orientations adressées à ses subordonnés afin d'assurer la cohérence de l'action de l'Administration lorsque cette dernière exerce un pouvoir discrétionnaire. Comme le rappelle le rapporteur public, dans le préambule du document litigieux traité par l'arrêt à commenter, il est inscrit que les lignes directrices ont pour objectif de guider l'instruction des projets financés par les services du ministère des Affaires étrangères, c'est-à-dire les subordonnés de l'auteur de l'acte, le ministre. [...]
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