Le ministère de la culture accorde un visa d'exploitation assorti d'une interdiction aux mineurs de 18 ans au film Baise-moi, dans une décision du 1er août 2001. L'affaire avait déjà été portée devant le Conseil d'Etat statuant au contentieux. Celui-ci avait alors annulé le visa d'exploitation précédemment accordé au film Baise-moi, car le décret du 23 février 1990 alors en vigueur ne prévoyait pas qu'un film qui ne serait pas inscrit sur les listes des films pornographiques ou d'incitation à la violence puisse être interdit aux mineurs de 18 ans. L'Association Promouvoir demande au Conseil d'Etat l'annulation de la décision du ministre de la culture.
Le principe de la dignité humaine et l'autorité de la chose jugée qui s'attache à la décision du Conseil d'Etat (30 juin 2000) sont-il méconnus par la décision du ministre de la culture qui donne au film Baise-moi un visa d'exploitation assorti d'une interdiction aux mineurs de 18 ans ?
Le Conseil d'Etat indique dans cet arrêt Association Promouvoir du 14 juin 2002 que la décision du ministre de la culture en date du 1er août 2001 n'est pas contraire à sa décision du 30 juin 2000, car le ministre n'a fait qu'appliquer une modification du décret du 23 février 1990, laquelle est postérieure à la décision du Conseil d'Etat. Il avance également pour rejeter la requête de l'Association Promouvoir que le ministre de la culture n'a pas commis d'erreur d'appréciation, ni méconnu le principe de la dignité humaine en accordant un visa d'exploitation assorti d'une interdiction aux mineurs de dix-huit ans au film Baise-moi, celui-ci ne revêtant pas de caractère pornographique ou d'incitation à la violence.
L'autorité de la chose jugée et la spécificité de l'action administrative en matière cinématographique (I) sont soumises au respect du principe de dignité de la personne humaine et à la notion de détournement de pouvoir (II).
[...] Le Conseil d'Etat considère finalement qu'une certaine recherche esthétique habite le film et qu'elle justifie donc qu'il ne soit pas classé comme pornographique. Ainsi, à défaut de recherche esthétique le film aurait dû être classé X. Le contrôle du juge permet donc de renforcer le but d'intérêt général poursuivi par le ministre dans le cadre de la police administrative, c'est- à-dire la protection des mineurs. II. L'absence de détournement de pouvoir concernant le principe de dignité de la personne humaine Le respect du principe de la dignité humaine est garanti par la police administrative. [...]
[...] Afin d'assurer une meilleure protection de la jeunesse, le gouvernement a opéré une réécriture de l'article 3 du décret de 1990 en élargissant les possibilités de classement pour le ministre de la Culture. Par le rétablissement de la possibilité d'interdiction aux mineurs de moins de dix-huit ans, le décret donne au ministre de la Culture le pouvoir de protéger tous les mineurs, sans pour autant pénaliser les œuvres cinématographiques par une inscription sur la liste des films pornographiques et d'incitation à la violence. Le détournement de pouvoir ne peut donc être établi ici. [...]
[...] Cette décision montre également que le Conseil d'Etat contrôle l'opportunité de la décision du ministre de classer un film comme pornographique. Déjà en 1979, le Conseil d'Etat avait suivi les conclusions du commissaire du gouvernement B. Genevois, relatives aux critères d'appréciation d'un film à caractère pornographique Pour lui, le critère principal est un critère objectif : est réputé pornographique le film qui montre une activité sexuelle réelle, non simulée ; le critère subsidiaire a un caractère subjectif : il consiste à prendre en considération l'intention du réalisateur, le contenu d'ensemble du film, le sujet traité, la qualité de sa réalisation En l'espèce, le Conseil d'Etat examine si le film litigieux peut être interdit aux mineurs de dix-huit ans, sans être classé comme pornographique. [...]
[...] Commentaire de la décision CE juin 2002, Association Promouvoir Introduction Le ministère de la culture accorde un visa d'exploitation assorti d'une interdiction aux mineurs de 18 ans au film Baise-moi, dans une décision du 1er août 2001. L'affaire avait déjà été portée devant le Conseil d'Etat statuant au contentieux. Celui-ci avait alors annulé le visa d'exploitation précédemment accordé au film Baise-moi, car le décret du 23 février 1990 alors en vigueur ne prévoyait pas qu'un film qui ne serait pas inscrit sur les listes des films pornographiques ou d'incitation à la violence puisse être interdit aux mineurs de 18 ans. [...]
[...] La notion de détournement de pouvoir Le détournement de pouvoir consiste en une utilisation par une autorité publique de ses pouvoirs à des fins autres que celle pour laquelle ces pouvoirs lui ont été confiés. En l'espèce, l'Association Promouvoir invoque l'illégalité du décret du 12 juillet 2001. Selon elle, son édiction aurait eu pour objectif de contourner la décision d'annulation du visa ministériel prononcée par le Conseil d'Etat le 30 juin 2000. Autrement dit, le gouvernement aurait fait adopter un décret pour permettre la diffusion d'un film jugé pornographique et d'incitation à la violence par le Conseil d'Etat. [...]
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