8 juillet 1963, Peyrot, contrat administratif, personnes privées
Par un arrêt en date du 8 juillet 1963, Peyrot, le Tribunal des conflits a eu l'occasion de déterminer la juridiction compétente pour connaître des litiges naissant à partir d'un contrat conclu entre plusieurs personnes privées.
Pour accomplir ses missions d'intérêt général, l'Administration a la possibilité d'user de deux types d'actes : les actes administratifs unilatéraux et les contrats. L'acte administratif unilatéral constitue l'exemple type d'une prérogative de puissance publique qui permet à l'Administration de mettre un certain nombre d'obligations à la charge des particuliers. Le contrat administratif n'en représente pas moins un privilège exorbitant du droit commun : l'Administration y bénéficie d'importantes prérogatives, qui n'ont pas leurs pareilles dans les contrats de droit privé. L'Administration passe aujourd'hui de très nombreux contrats et si certains d'entre eux sont définis par les textes, d'autres doivent en revanche l'être par le juge administratif et cela n'est pas toujours évident.
En l'espèce, la société de l'autoroute Esterel-Côte d'Azur est concessionnaire de la construction et de l'exploitation d'une autoroute, conformément à l'article 4 de la loi du 18 avril 1955. Pour l'exécution de ce contrat, cette société a passé un marché avec la Société Entreprise Peyrot concernant l'exécution de travaux nécessaires à la construction de cette autoroute. L'entreprise Peyrot se plaint d'avoir été victime de manœuvres dolosives de la part de la société dont le but était de la faire renoncer à ce marché. Elle demande donc réparation du préjudice subi.
La Société Peyrot a intenté une action en dommages et intérêts devant le Tribunal de Grande Instance de Foix mais en appel, la Cour de Toulouse s'est déclarée incompétente au profit de la juridiction administrative. Le tribunal administratif de Nice, saisi par l'entreprise et constatant son incompétence, a ainsi saisi le Tribunal des Conflits qui doit déterminer quelle est la juridiction compétente pour connaître de ce litige.
La question était donc ici de savoir si les contrats passés entre deux personnes privées en vue de la délégation de l'exécution d'une mission de service public acquièrent un caractère administratif justifiant la saisine du juge administratif ?
[...] Au regard de ces deux arrêts, il est possible de dire que le critère de l'objet du contrat se dédouble, le contrat sera administratif soit s'il confie aux cocontractants l'exécution même du service public, soit si le contrat constitue l'une des modalités de l'exécution du service public. Enfin, la dernière hypothèse concerne les contrats soumis à un régime exorbitant de droit commun. Ce critère a été consacré par un arrêt du 19 janvier 1973, Société d'exploitation électrique de la rivière du Sant à l'occasion d'un litige qui opposait EDF à un producteur autonome d'électricité. [...]
[...] Le Tribunal des Conflits n'a pas fondé la compétence administrative sur le statut de société d'économie mixte à capitaux publics majoritaires mais sur l'objet du contrat, sur la nature même des travaux. Cette jurisprudence a également été étendue aux travaux publics autres que routiers, ainsi qu'en dehors du domaine des travaux publics (arrêt du 16 octobre 2006, EURL Pharmacie de la gare Saint-Charles). Cependant dans certains cas, le principe classique subsiste et la jurisprudence Peyrot n'est pas applicable. Parfois, le contrat entre deux personnes privées ne peut pas être administratif, quels que soient son objet et son contenu. [...]
[...] Le recours au critère de cette clause découle d'un arrêt de principe du 31 juillet 1912, Société des granites porphyroïdes des Vosges dans lequel le CE affirme simplement que le contrat en cause pour paver le centre-ville a été conclu selon les règles et les conditions des contrats intervenus entre particuliers René Chapus distingue deux types de clauses exorbitantes : celles qui par leur nature sont exclues dans les relations privées car elles ne peuvent être mises en œuvre que par la puissance publique, et les clauses inégalitaires par exemple celle qui accorde à la personne publique la possibilité de résilier unilatéralement le contrat, même si le cocontractant n'a commis aucune faute (arrêt du 26 février 1965, Société du vélodrome du Parc des Princes). La seconde hypothèse concerne les contrats dont l'objet est en étroite relation avec le service public. [...]
[...] Une seconde exception, liée aux travaux routiers et autoroutiers, est posée par l'arrêt Société Entreprise Peyrot. En effet ici, il est admis que certains contrats passés par les concessionnaires d'autoroutes avec des entreprises privées, bien que conclus entre personnes privées, sont des contrats administratifs car ils doivent être considérés en raison de leur nature comme conclus pour le compte de l'État. En conséquence, le TC juge que les contrats passés pour cela doivent être soumis aux règles de droit public, que les contrats soient conclus directement par l'État, ou par un concessionnaire agissant pour le compte de l'État. [...]
[...] Commentaire d'arrêt : Tribunal des conflits juillet 1963, Société entreprise Peyrot Par un arrêt en date du 8 juillet 1963, Peyrot, le Tribunal des conflits a eu l'occasion de déterminer la juridiction compétente pour connaître des litiges naissant à partir d'un contrat conclu entre plusieurs personnes privées. Pour accomplir ses missions d'intérêt général, l'Administration a la possibilité d'user de deux types d'actes : les actes administratifs unilatéraux et les contrats. L'acte administratif unilatéral constitue l'exemple type d'une prérogative de puissance publique qui permet à l'Administration de mettre un certain nombre d'obligations à la charge des particuliers. [...]
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