Dans notre droit on trouve une distinction entre la propriété des personnes publiques et celles des personnes privées. Au niveau de la propriété des personnes publiques, il existe une autre distinction, à savoir celle qui oppose la propriété du domaine privé des personnes publiques et celle du domaine public des personnes publiques. Ce domaine public se différencie de l'autre en ce qu'il est soumis à un régime juridique très protecteur tel que l'imprescriptibilité ou l'insaisissabilité… Mais pour qu'un bien d'une personne publique puisse rentrer dans cette catégorie, il est nécessaire qu'il remplisse certains critères d'entrée dans le domaine public. Tout d'abord il doit forcément appartenir à une personne morale de droit public et ensuite il doit remplir le critère dit de l'affectation et c'est ce critère dont il est question dans cet arrêt rendu par l'Assemblée Plénière du Conseil d'Etat le 11 mai 1959. En l'espèce, M. Dauphin avait pris l'habitude d'accéder à sa propriété par l'allée des Alyscamps, située dans la commune d'Arles, mais par la suite cette allée fut fermée à la circulation par la pose d'une chaîne. M. Dauphin formula alors une réclamation devant le Conseil Interdépartemental de préfecture de Marseille tendant à la cessation de cette interdiction ainsi qu'à l'octroi d'une indemnité pour la gêne occasionné. Le Conseil Interdépartemental s'est alors déclaré incompétent pour connaître de cette réclamation dans un arrêté du 22 juillet 1949. En conséquence M. Dauphin saisi donc le Conseil d'Etat qui par son Assemblée Plénière rend un arrêt le 11 mai 1959. Le demandeur souhaite que l'arrêté rendu par le Conseil Interdépartemental soit annulé du fait que la pose de deux bornes reliées par une chaîne, puis d'une grille à l'entrée de l'allée, présentait les caractéristiques d'un travail public et que donc, de part sa qualité de riverain, cela lui donne droit à une indemnité en réparation du fait de la gêne occasionnée. Pour le Conseil interdépartemental, il ne peut connaître de sa réclamation car elle est relative à l'existence d'une prétendue servitude de passage et donc cela relève de la compétence des juridictions judiciaires et non des juridictions administratives. Le demandeur peut il opposer à l'administration des droits qu'il détiendrait sur cette allée du fait de sa qualité de riverain ? Pour le Conseil d'Etat, l'allée en question fait tout d'abord partie du domaine public communal car elle est affectée au service public culturel et touristique et elle a fait objet d'un aménagement spécial prévu à cet effet. Ensuite cette allée ne peut être considérée de ce fait comme une voie publique et donc M. Dauphin ne peut se prévaloir de sa qualité de riverain pour opposer à l'administration des droits relatifs à l'utilisation de l'allée pour l'accès à sa propriété en automobile. Néanmoins il peut prétendre à une indemnité du fait de cette impossibilité d'accès s'il démontre la possession d'une servitude de passage avant la création des aménagements portant sur l'allée et qui l'ont fait rentrer dans le domaine public. En conséquence, du fait que cette constatation de l'existence d'une servitude relève de la compétence des juridictions judiciaires, le Conseil d'Etat se voit contraint par cet arrêt du 11 mai 1959, de surseoir à statuer jusqu'à ce que la juridiction judiciaire compétente se soit prononcée sur cette question préjudicielle. Au regard de cet arrêt, il conviendra donc d'étudier en premier lieu l'aménagement spécial en tant que critère jurisprudentiel de la domanialité publique (I) pour pouvoir ensuite envisager, en second lieu, cet aménagement en tant que critère imprécis et sujet à des évolutions plus ou moins contestables (II).
[...] Enfin il y a une réduction de la portée du critère de l'aménagement puisque dans le cas d'un bien affecté à l'usage direct du public, le critère de l'aménagement indispensable du bien n'est pas requis et donc on revient à une vision des critères d'entrée d'un bien dans le domaine public qui était celle que l'on retrouvait avant l'arrêt Berthier de 1960. La principale conséquence du passage à un aménagement indispensable réside en l'obligation de prouver un aménagement déjà réalisé, ce qui n'était pas le cas avec un aménagement spécial, et donc cela met fin à la théorie de la domanialité virtuelle, c'est à dire celle par anticipation. [...]
[...] En conséquence, du fait que cette constatation de l'existence d'une servitude relève de la compétence des juridictions judiciaires, le Conseil d'Etat se voit contraint par cet arrêt du 11 mai 1959, de surseoir à statuer jusqu'à ce que la juridiction judicaire compétente se soit prononcée sur cette question préjudicielle. Au regard de cet arrêt, il conviendra donc d'étudier en premier lieu l'aménagement spécial en tant que critère jurisprudentiel de la domanialité publique pour pouvoir ensuite envisager, en second lieu, cet aménagement en tant que critère imprécis et sujet à des évolutions plus ou moins contestables (II). [...]
[...] Commentaire de l'arrêt rendu par l'Assemblée Plénière du Conseil d'Etat le 11 mai 1959 Dans notre droit on trouve une distinction entre la propriété des personnes publiques et celles des personnes privées. Au niveau de la propriété des personnes publiques, il existe une autre distinction, à savoir celle qui oppose la propriété du domaine privé des personnes publiques et celle du domaine public des personnes publiques. Ce domaine public se différencie de l'autre en ce qu'il est soumis à un régime juridique très protecteur tel que l'imprescriptibilité ou l'insaisissabilité Mais pour qu'un bien d'une personne publique puisse rentrer dans cette catégorie, il est nécessaire qu'il remplisse certains critères d'entrée dans le domaine public. [...]
[...] Dauphin saisi donc le Conseil d'Etat qui par son Assemblée Plénière rend un arrêt le 11 mai 1959. Le demandeur souhaite que l'arrêté rendu par le Conseil Interdépartemental soit annulé du fait que la pose de deux bornes reliées par une chaîne, puis d'une grille à l'entrée de l'allée, présentait les caractéristiques d'un travail public et que donc, de part sa qualité de riverain, cela lui donne droit à une indemnité en réparation du fait de la gêne occasionnée. Pour le Conseil interdépartemental, il ne peut connaître de sa réclamation car elle est relative à l'existence d'une prétendue servitude de passage et donc cela relève de la compétence des juridictions judiciaires et non des juridictions administratives. [...]
[...] Ce qui est novateur dans cet arrêt c'est donc l'entrée des promenades publiques dans le domaine publique car auparavant elles étaient considérées comme faisant partie du domaine privé de la personne publique propriétaire (Arrêt C.E janvier 1921 Société protectrice des animaux L'arrêt Dauphin de 1959 fait donc entrer les promenades publiques dans le domaine public en se justifiant sur le fait que l'allée était affectée au service public culturel et touristique et qu'elle avait fait l'objet d'un aménagement spécial. On constate donc que le Conseil d'Etat se fonde sur l'affectation à un service public et non sur l'affectation à l'usage direct du public. Mais par la suite cette jurisprudence sera élargie par deux arrêts rendus par le Conseil d'Etat (C. [...]
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