Le 7 septembre 1934 le Ministre des Pensions prit une décision, un arrêt par lequel il « interdisait l'accès aux centres de réforme » à M. Jamart. Cette décision fait suite aux relations au « caractère regrettable » (selon les termes de l'instruction) qu'entretenaient les deux hommes. Cependant, M. Jamart était appelé, en sa qualité de médecin, à assister les anciens militaires titulaires de pensions lors des examens qu'ils devaient subir pour pouvoir continuer à bénéficier de leur pension (au titre de la loi du 31 mars 1919 citée dans l'arrêt).
M. Jamart formule donc un recours pour excès de pouvoir contre la décision du ministre. Son recours fut enregistré les 19 et 24 octobre 1934 (soit 5 semaines après la publication de l'arrêt du ministre) sous la forme d'une requête et d'un mémoire. Suivant la procédure le Conseil d'État va rendre son arrêt (après l'instruction) sur l'affaire en question le 7 février 1936.
Cet arrêt apporte une réponse.
[...] La portée de cet arrêt est bien plus grande, puisqu'il s'agit en réalité ici de reconnaître, ou non, l'existence d'un pouvoir règlementaire aux ministres, et, s'il existe, d'en définir les limites. Ainsi, on voit d'ores et déjà que l'intérêt de cet arrêt ne réside pas dans la solution proprement dite qu'il apporte au litige en question (solution qui consiste en l'annulation de la décision du ministre). Mais bien dans la question de savoir si les ministres bénéficient ou non d'un pouvoir règlementaire les autorisant à prendre de tels arrêts. [...]
[...] Cependant tout comme ce furent des considérations pratiques qui conduisirent à la mise en place d'un pouvoir règlementaire de l'administration, très vite reconnu comme nécessaire par le législateur lui- même (dès la constitution de l'an VIII) c'est ici la même logique qui œuvre. En ce qui concerne la jurisprudence, cette décision est également en décalage puisque la seule trace jurisprudentielle qui se rapproche de ce principe est celle, timide, laissée par l'arrêt Heyriès de 1918 énoncé plus haut. Nous avons donc vu la première partie de ce principe, et en quoi il présente un caractère novateur. Il convient toutefois de ne pas oublier que le principe ici posé est en deux parties. [...]
[...] Un pouvoir limité matériellement Ces limites restreignent le nouveau principe de pouvoir règlementaire interne des ministres qui ne disposent pas d'un pouvoir règlementaire général, mais d'un pouvoir qui ne peut s'exercer que dans la mesure où les nécessités du service l'exigent, et envers les seules personnes qui se trouvent en relation avec le service, soit qu'elles y collaborent, soit qu'elles l'utilisent (conclusions de M.Bernard octobre 1961, UNAPEL). On voit donc très clairement que le contenu de ce pouvoir règlementaire des ministres est limité. Mais également, le pouvoir règlementaire des ministres est limité par sa portée, c'est-à-dire par les personnes auxquelles il a vocation à s'imposer. Par ailleurs, on perçoit également qu'il faut que certaines conditions circonstancielles soient réunies, il faut qu'il y ait nécessité, sans quoi le ministre ne peut exercer son pouvoir. [...]
[...] Mais, si ce n'est pas le cas ici il faut vite faire remarquer que les dispositions de la constitution de 1946 n'ont pas permis d'assurer la stabilité gouvernementale, ce qui révèle un défaut de cette constitution. Lequel sera comblé par la constitution de 1958. Qu'en est-il alors de ce principe dans la constitution de 1958 ? ii. Constitution de 1958, des progrès La constitution de 1958 marque une véritable révolution juridique, notamment en ce qui concerne les rapports entre le pouvoir règlementaire et le pouvoir législatif. En effet, la nouvelle constitution consacre l'existence d'un pouvoir règlementaire qui ne se limite plus à édicter des textes règlementaires d'application des lois. [...]
[...] Cependant, l'étude de la jurisprudence postérieure à l'arrêt permet de mieux préciser encore cette limite. Notamment puisqu'elle considéra que le ministre ne peut pas fixer dès règles à caractère statutaire (CE sect., Dame Si Moussa novembre 1977). Également, le ministre ne peut pas imposer des obligations ou accorder des avantages UNAPEL octobre 1961). Après avoir étudier ces premières limites il convient de se rappeler qu'il y a par ailleurs, des limites de forme qui pèsent sur le pouvoir règlementaire des ministres. [...]
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