Lors du discours inaugural de la Convention sur l'Avenir de l'Europe, le 26 février 2002, son président, le français Valéry Giscard d'Estaing affirmait « Le piétinement actuel de l'Europe tient à plusieurs facteurs, notamment l'enchevêtrement des compétences, la complexité des procédures. ». On ne peut qu'être d'accord avec cette analyse en y ajoutant même les incertitudes sur les effets de certains des actes de droit dérivé. L'arrêt commenté ici, l'arrêt de la Cour de Justice des Communautés Européennes du 13 décembre 1989 lève le voile sur les effets d'un de ces actes, la recommandation.
Cet arrêt concerne M. Grimaldi qui a assigné le Fond des maladies professionnelles de Bruxelles devant le Tribunal du Travail de Bruxelles pour son refus de reconnaître la maladie de Dupuytren, dont il souffrait, comme maladie professionnelle. Le refus ayant été motivé par le fait que cette affection de figurait pas dans la liste des maladie professionnelles belges. Le tribunal du Travail a considéré que cette maladie peut être assimilée à une « maladie pour surmenage ... du tissu péri tendineux ». Cette dernière maladie figurait dans la liste européenne des maladies professionnelles qui avait été établie par une recommandation du 23 juillet 1962 qui préconisait l'introduction des maladies répertoriées parmi les maladies professionnelles en droit national. Entrait aussi dans le champ du litige la recommandation du 20 juillet 1966 relative aux conditions d'indemnisation des victimes de maladies professionnelles. Pour connaître l'effet de telles recommandations sur le sens dans lequel trancher le litige, le Tribunal du Travail de Bruxelles a posé une question préjudicielle à la Cour de Justice des Communautés Européennes.
Grâce à cette question préjudicielle, la Cour est amenée à déterminer quels sont les effets des recommandations dans l'ordre juridique communautaire. Notamment, si les recommandations peuvent créer des droits et être invoqués par les particuliers devant un juge national ou si elles sont un instrument d'interprétation ou de complément pour celui-ci.
Répondant à ces interrogations, la Cour affirme que si les recommandations ne peuvent, en l'état créer des droits ou être invoqués par les particuliers devant un juge national, leur prise en compte s'impose au juge national, notamment pour éclairer l'interprétation des dispositions nationales prises dans le but d'assurer leur mise en œuvre, ou encore lorsqu'elles ont pour objet de compléter des dispositions communautaires ayant un caractère contraignant.
Grâce à cet arrêt, la Cour effectue donc un rappel indispensable sur les effets de la recommandation, un acte non créateur de droits pour les particuliers mais ajoute une nouveauté en déterminant la recommandation comme un outil d'interprétation ou complément imposé au juge national.
[...] Aux termes de cet arrêt, les recommandations ont certain effet juridique en ce qu'elles doivent être prises en considération par le juge national. C'est à dire que le juge national de chaque état devra prendre en compte les recommandations pour trancher les litiges qui lui sont soumis, notamment dans deux cas détaillés infra (II A mais pas seulement. Le champ d'application de cette jurisprudence semble être très large car les recommandations peuvent être prises, comme celles en cause en l'espèce, dans des matières ne relevant pas des compétences de l'Union. [...]
[...] Pour éclairer l'interprétation de dispositions nationales prises dans le but d'assurer leur mise en oeuvre tout d'abord. C'est à dire que si le juge national est saisi d'un litige concernant une disposition nationale mettant en oeuvre une recommandation, celle ci devra être pris en compte pour interpréter la disposition en cause. En cas de doute sur la disposition nationale, le juge national devra l'interpréter à la lumière de la recommandation. Le fait de prendre comme instrument d'interprétation d'une norme une autre qui en est le socle ou l'inspiration est tout à fait classique, cela ne pose pas vraiment question, c'était déjà utilisé dans la pratique par le juge national. [...]
[...] Comme cela a été dit plus haut, l'article 288 TFUE, qui était alors l'article 189 TCE stipule que les recommandations et les avis ne lient pas De plus une jurisprudence constante établit que si, en vertu des dispositions de article 189, les règlements sont directement applicables et, par conséquent, par leur nature susceptibles de produire des effets directs, il en résulte pas que autres catégories actes visés par cet article ne peuvent jamais produire effets analogues tel que le rappelle l'avocat général. Les recommandations, à l'inverse des règlements, n'ont pas d'effet direct, elles ne créent donc pas de droits invocables pour les particuliers devant le juge national. Un justiciable ne peut donc pas, utiliser la recommandation pour fonder une prétention ou requérir une prestation. [...]
[...] La nouveauté vient surtout du fait que la prise en compte des recommandations est imposée au juge national. Pour matérialiser son propos, le juge énonce deux exemples pour lesquels cet outil d'interprétation sera utilisé. Les deux exemples énoncés de prise en compte des recommandations : les mesures nationales les mettant en oeuvre et celles complétant des dispositions communautaires ayant un caractère contraignant. Le juge déclare les recommandations devront être prises en compte par le juge national notamment lorsque celles-ci éclairent interprétation de dispositions nationales prises dans le but assurer leur mise en oeuvre, ou encore lorsqu'elles ont pour objet de compléter des dispositions communautaires ayant un caractère contraignant. [...]
[...] La directive est assortie d'un délai de transposition au terme duquel la non transposition est constitutif d'un manquement. En outre, au terme du délai de transposition, une directive peut avoir un effet direct selon certaines conditions. Dans sa jurisprudence, notamment matérialisée par les arrêts SACE et Van Duyn, la Cour établit que l'effet direct de la directive peut être admis dans le cas particulier dans lequel l'Etat n'a pas (ou mal) transposé ladite directive et où les dispositions de la directives sont précises et inconditionnelles. [...]
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