Les juges du fond pouvaient-ils à bon droit qualifier dans un premier temps, le non-respect d'une signalisation routière de mise en danger délibérée de la personne d'autrui, puis dans un second temps, pouvaient-ils considérer qu'il puisse y avoir complicité de ce délit ? En bref, la question posée aux juges de cassation revient essentiellement à savoir s'il peut exister en droit, un délit de complicité pour faute non intentionnelle.
Il n'est pas rare que cette question donne lieu à des difficultés comme en témoigne l'arrêt de la Chambre criminelle rendu le 6 juin 2000.
Avant d'étudier la réponse formulée par les magistrats de la Cour de cassation, il convient de rappeler brièvement les faits qui ont donné lieu à cette affaire. En l'espèce, un chauffeur a franchi un feu rouge fixe sur ordre de son passager, dans un quartier urbain à forte densité de circulation. Les dommages matériels causés sont peu importants, mais les victimes sont choquées. Les juges de première instance et les juges d'appel condamnent le chauffeur pour délit de mise en danger délibérée d'autrui, et le passager pour complicité de ce délit.
Les prévenus non satisfaits de cette décision engagent un pourvoi car ils contestent les décisions des juges du fond.
La Cour d'appel, quant à elle, confirme le jugement de première instance. Pour la mise en danger tout d'abord, elle constate que les faits reprochés au conducteur ont exposé autrui à un risque de mort ou de blessures graves. Elle ajoute par ailleurs plusieurs arguments qu'il conviendra d'étudier par la suite. Concernant l'infraction de complicité du passager, elle indique que celui- ci a donné l'ordre au conducteur de « griller » le feu rouge.
A la question posée en ouverture, la Cour de cassation répond par l'affirmative en reprenant à son compte les motifs des juges d'appel qui ont bien caractérisé les infractions reprochées en tous leurs éléments.
Pour rejeter le pourvoi, le Cour de cassation considère que les juges d'appel ont bien caractérisé le délit de mise en danger délibérée de la personne d'autrui (I) d'une part, et le délit de complicité de cette mise en danger (II) d'autre part.
[...] L'intention criminelle Le principe est simple : pour qu'une personne soit qualifiée complice d'une infraction il faut qu'elle soit consciente qu'elle s'associe à une action délictueuse et qu'elle le veuille. Conscience et volonté, les deux mots-clés, peuvent a priori s'appliquer au cas d'espèce. Ainsi, d'un premier regard, on peut légitimement penser que le passager se rend complice par l'ordre volontaire qu'il donne à son conducteur. Mais un problème se pose ici à nous. Peut-on se rendre complice intentionnellement d'une faute non intentionnelle ? Le problème semble complexe. [...]
[...] L'acte matériel de complicité par ailleurs est, selon la Cour de cassation établi. En effet, l'injonction du passager est un acte positif, antérieur voire concomitant à l'infraction principale punissable. Cet acte de complicité de surcroît doit correspondre à un mode de complicité visé par l'article 121-7 du Code pénal. En l'espèce, l'acte de complicité est un acte de provocation car le chauffeur a agi sur ordre de son passager. Cette provocation est suivie d'effets car le chauffeur a passé l'intersection malgré le feu rouge. [...]
[...] Ces conditions de mise en œuvre sont expliquées à l'alinéa issu d'une loi de juillet 2000. En l'espèce, il y a bien mise en danger, car le chauffeur a exposé les usagers de la route, à un risque immédiat de mort ou de blessures graves puisqu'une collision entre deux véhicules n'a pu être évitée. Cette mise en danger résulte de la violation par le chauffeur d'une obligation particulière de prudence ou de sécurité prévue par la loi ou le règlement Le règlement doit s'entendre au sens strict du droit administratif. [...]
[...] La Cour d'appel, quant à elle, confirme le jugement de première instance. Pour la mise en danger tout d'abord, elle constate que les faits reprochés au conducteur ont exposé autrui à un risque de mort ou de blessures graves. Elle ajoute par ailleurs plusieurs arguments qu'il conviendra d'étudier par la suite. Concernant l'infraction de complicité du passager, elle indique que celui- ci a donné l'ordre au conducteur de griller le feu rouge. A la question posée en ouverture, la Cour de cassation répond par l'affirmative en reprenant à son compte les motifs des juges d'appel qui ont bien caractérisé les infractions reprochées en tous leurs éléments. [...]
[...] En effet, les juges de cassation affirment que l'on peut être complice d'une faute non intentionnelle. En l'espèce, le passager, par son ordre adressé au conducteur de passer l'intersection malgré le feu rouge, se rend complice du délit de mise en danger délibérée d'autrui. La solution paraît contestable et dénuée de sens. Comment en effet, peut-on devenir complice d'une faute que l'auteur principal ne voulait pas lui-même ? Le conducteur restait libre de passer ou de s'arrêter, bien que le passager lui ordonne de continuer. [...]
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