M. Y, de nationalité malienne, et poursuivi dans son pays pour « complicité d'atteinte aux biens publics et enrichissement illicite », et plus précisément pour trafic d'hydrocarbures, aidé en cela par les faux documents douaniers procurés par M et Mme X. À ce titre, il est sous le coup d'un mandat d'arrêt délivré par le président de la chambre d'instruction de la Cour suprême du Mali, en date du 22 mars 1994. Or, M. Y réside alors en France.
Le 27 mars 1994, le Mali adresse à la France une demande d'extradition de M. Y, dans le but qu'il soit jugé pour ses actes au Mali. Les autorités françaises accordent cette extradition par un décret du 17 mars 1995. M. Y, demandeur, saisit alors le Conseil d'Etat en annulation de ce décret accordant son extradition vers le Mali, au motif que cette extradition est demandée dans un but politique : il fait donc état d'une exception d'inconstitutionnalité de ce décret. Le garde des Sceaux, défendeur, soutient au contraire que M. Y n'est pas fondé à se prévaloir de ce motif, puisque l'article 44 de l'accord de coopération franco-malien en matière de justice du 9 mars 1962 retient que l'extradition ne peut être refusée par la France que si l'infraction est considérée comme politique par M. X, et non si l'extradition elle-même est considérée comme demandée par le Mali dans un but politique.
[...] La portée de cet arrêt sera très forte, d'une part parce que le Conseil d'Etat y dégage pour la première fois un PFRLR, mais également d'autre part parce que s'ensuit un bouleversement de la hiérarchie des normes internationales et internes. Plus généralement, il est intéressant de se demander en quoi la reconnaissance par le Conseil d'Etat d'un principe fondamental reconnu par les lois de la République a pu modifier la conception de la hiérarchie des normes en droit interne et international. [...]
[...] Cependant, malgré cette nécessité, il n'en reste pas moins que le Conseil d'Etat a pour la première fois dégagé un principe fondamental reconnu par les lois de la République, bien que cette compétence soit depuis 1971, réservée au Conseil Constitutionnel. Cette intrusion sur le champ de compétence du Conseil Constitutionnel a été considérée par certains comme un risque, en raison des dérives que la banalisation et la multiplication de cette action du Conseil d'Etat pourraient engendrer. B. L' empiètement contesté du Conseil d'Etat sur le champ de compétences du Conseil Constitutionnel On a donc vu que le Conseil d'Etat était, pour imposer un principe par rapport à un traité international, dans l'obligation de dégager un principe fondamental reconnu par les lois de la République, et non un principe général du droit. [...]
[...] Le 27 mars 1994, le Mali adresse à la France une demande d'extradition de M. dans le but qu'il soit jugé pour ses actes au Mali. Les autorités françaises accordent cette extradition par un décret du 17 mars 1995. M. demandeur, saisit alors le Conseil d'Etat en annulation de ce décret accordant son extradition vers le Mali, au motif que cette extradition est demandée dans un but politique : il fait donc état d'une exception d'inconstitutionnalité de ce décret. Le garde des sceaux, défendeur, soutient au contraire que M. [...]
[...] Cette fois-ci, bien que le moyen utilisé soit encore une fois détourné, il ne fait pas de doute que le Conseil d'Etat affirme la suprématie de la Constitution sur les traités internationaux. En l'espèce, la haute juridiction administrative affirme que l'article 55 de la Constitution ne s'applique qu'aux lois, et non aux dispositions constitutionnelles : ainsi, les conventions internationales signées et ratifiées par la France ont une valeur juridique supérieure à celle des lois ordinaires françaises, mais on en déduit que cette valeur juridique n'est pas supérieure à celle des dispositions constitutionnelles. [...]
[...] Le Conseil d'Etat a donc imposé un principe constitutionnel au Conseil Constitutionnel lui-même. On se rend compte aisément du risque que cela pourrait engendrer, puisque cette capacité pour le juge administratif de dégager des principes de valeur constitutionnelle amène à la perspective néfaste d'un gouvernement des juges Le Conseil d'Etat, conscient de ce danger, et conscient de sa soumission au Conseil Constitutionnel, a donc adopté la solution de soumettre le PFRLR dégagé à l'appréciation du Conseil Constitutionnel. Il juge en effet sous réserve de l'appréciation du Conseil Constitutionnel Ainsi, le risque mentionné n'a pas de raison d'être, puisque c'est bien le Conseil Constitutionnel qui aura le dernier mot, pouvant confirmer ou infirmer ce principe, et comme l'affirme Louis Favoreu, la solution du Conseil Constitutionnel s'imposera tôt ou tard Le risque est donc moindre, car limité à la présente affaire, où le Conseil d'Etat risque d'invoquer un PFRLR qui sera plus tard infirmé par le Conseil Constitutionnel. [...]
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