Commentaire d'arrêt, Conseil d'Etat, 23 novembre 2011, intérêt à agir d'un parlementaire, excès de pouvoir, affaire Masson
Depuis plusieurs années, se succèdent les études, les rapports parlementaires pour dénoncer régulièrement les retards du Gouvernement dans l'édiction des décrets nécessaires à l'application d'une loi votée par le Parlement. C'est le cas de l'affaire qu'a eu à traiter le Conseil d'Etat le 23 novembre 2011 concernant la demande d'un parlementaire visant à annuler la décision du premier ministre qui refusait de prendre les décrets d'application de différents articles de la loi du 21 juin 2004 relative à la confiance dans l'économie numérique.
La demande de monsieur A au premier ministre consistant à prendre les décrets d'application des articles 6, 18, 22, 28 et 55 de la loi du 21 juin 2004 relative à la confiance dans l'économie numérique a été implicitement rejetée en raison du silence gardé par l'autorité.
Monsieur A demande alors au Conseil d'Etat d'annuler pour excès de pouvoir la décision implicite de rejet du premier ministre.
[...] Cependant, si les conditions sont trop strictes, le recours risque de tomber en désuétude au détriment du principe de légalité des actes administratifs, mais si elles sont trop souples, cela peut entrainer la paralysie de l'action administrative du fait qu'il y aura trop de recours. Concernant les conditions, il y a des règles en matière de délais de recours, l'intérêt à agir (le requérant doit être intéressé de façon directe par l'annulation de l'acte). Pour les justiciables, à partir du 20ème siècle, le Conseil d'Etat a posé des solutions précises en matière d'intérêt à agir pour élargir le champ du recours pour excès de pouvoir, il a une conception extensive de l'intérêt à agir. [...]
[...] En l'espèce, le Conseil d'Etat avant de statuer sur la demande de monsieur vérifie avant qu'il a intérêt à intervenir. Il va ainsi considérer que cet intérêt est présent en ce qui concerne le refus d'édicter les articles et 55 de la loi du 21 juin 2004, mais pas pour l'article 18 en raison de sa qualité de parlementaire. Dans ce sens, dans un arrêt du Conseil d'Etat, Syndicat des Patrons-Coiffeurs de Limoges, de 1906, le Conseil d'Etat ouvre le recours pour excès de pouvoir aux personnes morales. [...]
[...] Le Conseil d'Etat, par une décision du 23 novembre 2011, va rejeter la demande de monsieur A. Il considère, concernant le refus d'édicter les décrets d'application des articles et 55 de la loi du 21 juin 2004, que monsieur A a intérêt à intervenir, et donc que son recours est recevable. Cependant, le Conseil d'Etat va considérer que les décrets d'application des articles 6 et 55 de la loi du 21 juin 2004 étant intervenus respectivement les 25 février et 16 juin 2011 et publiés au Journal Officiel, et que l'article 28 de la même loi ayant été abrogé par l'article 145 de la loi du 17 mai 2011, les conclusions de monsieur A sont donc devenues sans objet. [...]
[...] Ainsi, le Conseil d'Etat intervient donc sur des questions qui présentent un caractère politique, donc il ne peut fonder son refus de considérer que le requérant monsieur A n'avait pas d'intérêt à agir en raison de sa qualité de parlementaire en ce sens que ce contrôle avait une nature politique. Pour aller à l'encontre de cette solution, le Parlement pourrait adopter une loi reconnaissant aux parlementaires un intérêt pour agir par la voie du recours pour excès de pouvoir contre le refus du Gouvernement de prendre un décret d'application d'une loi. [...]
[...] En l'espèce, le Conseil d'Etat va se prononcer pour la première fois sur la question. Ainsi, la qualité de parlementaire ne confère pas d'intérêt à agir contre le refus du premier ministre de prendre un décret d'application d'une loi. En ce sens, monsieur en sa qualité de citoyen, d'usager des services publics, d'élu et de parlementaire, ne justifie pas d'un intérêt à agir lui donnant qualité pour former un recours pour excès de pouvoir contre le refus de prendre ce décret Le Conseil d'Etat refuse donc en raison de la nature politique du contrôle entre le Gouvernement qui refuse de prendre le décret d'application d'une loi et le Parlement qui a voté la loi, il ne veut pas s'immiscer dans les relations entre les deux organes, ce qui relève du Conseil Constitutionnel. [...]
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