Conseil d'État, arrêt du 10 octobre 2003, contrat administratif, UGAP, Union des Groupements d'Achat Public, convention, véhicules usuels
Le contrat administratif constitue, avec l'acte administratif unilatéral, un moyen juridique de l'action de l'administration. Savoir si un contrat est administratif ou privé est important puisque l'identification du contrat détermine de quel ordre de juridiction celui-ci relève. Cette identification s'effectue sur la base de nombreux critères. L'arrêt en présence permet de mettre en évidence les difficultés que pose la mise en œuvre de ces différents critères d'identification.
Le 11 décembre 1995, une convention est conclue entre le ministère de la Défense et l'Union des Groupements d'achat public (UGAP) pour la fourniture de véhicules usuels à l'État. Le 29 octobre 1998, le ministre de la Défense émet un titre exécutoire à l'adresse de l'UGAP pour le recouvrement d'intérêts moratoires versés à tort par l'État. L'UGAp introduit une demande d'annulation du titre exécutoire devant le tribunal administratif de Paris en première instance et est déboutée. L'UGAP effectue ensuite un recours devant la cour administrative d'appel de Paris. À nouveau, elle est déboutée de sa requête tendant à l'annulation de l'ordonnance prise par un magistrat du tribunal administratif de Paris. L'UGAP se pourvoit en cassation devant le Conseil d'État. Elle soutient que la convention qui la liait au ministère de la Défense était un contrat administratif. La cour administrative de Paris avait au contraire estimé qu'il s'agissait d'un contrat de droit privé, porté donc devant un ordre de juridiction incompétent pour en connaître.
[...] Elle soutient que la convention qui la liait au ministère de la Défense était un contrat administratif. La cour administrative de Paris avait au contraire estimé qu'il s'agissait d'un contrat de droit privé, porté donc devant un ordre de juridiction incompétent pour en connaître. En l'espèce, la question était de savoir si le contrat conclu entre l'UGAP et l'État était un contrat administratif. Plus globalement, l'arrêt soulève la question suivante : quels sont les critères à prendre en compte pour l'identification du contrat administratif ? [...]
[...] Le juge peut d'abord vérifier le caractère exorbitant du contrat. L'exorbitance peut porter sur la clause. La clause exorbitante doit revêtir un caractère exceptionnel au regard du droit privé. La clause peut tirer son caractère exceptionnel au regard du droit privé du fait qu'elle ne pourrait exister sans l'intervention des autorités publiques. C'est le cas par exemple de la clause d'exonération fiscale (TC Consorts Cazautets). Autrement, la clause s'avère exceptionnelle du fait qu'elle instaure des rapports inégalitaires entre l'État et le cocontractant. [...]
[...] En l'espèce le Conseil d'État souligne que la convention passée entre le ministère de la Défense et l'UGAP ne porte que sur la seule fourniture de véhicules automobiles usuels et n'a fait naître entre les parties que des rapports de droit privé Dans cette perspective, il ne peut s'agir d'un contrat administratif, et la présomption d'administrativité est dès lors renversée. On voit bien qu'en l'espèce le critère organique demeure un critère nécessaire, mais non suffisant pour pouvoir qualifier le contrat d'administratif. C'est pourquoi le Conseil d'État a recours à d'autres critères afin de vérifier le caractère administratif du contrat. Ces critères portent sur l'objet même du contrat. II. [...]
[...] La présomption d'administrativité par la présence de deux personnes publiques Le contrat qui est l'objet du contentieux a été passé entre deux personnes publiques que sont l'UGAP, un établissement public à caractère industriel et commercial, et le ministère de la Défense. Or, par principe, le contrat passé entre deux personnes publiques est présumé être un contrat administratif. Ce principe est issu de la jurisprudence de l'arrêt Union des assurances de Paris (CE UAP) selon lequel un contrat conclu entre des personnes publiques revêt en principe un caractère administratif En ce cas, puisque le critère organique est ici totalement satisfait, nul besoin de démontrer qu'il s'agit d'un contrat de mandat. [...]
[...] C'est la loi elle-même qui consacre le caractère non rétroactif des nouvelles dispositions, comme le souligne le Conseil d'État : le juge judiciaire demeure compétent pour connaître des litiges qui relevaient de sa compétence et qui ont été portés devant lui avant la date d'entrée en vigueur de la présente loi Dès lors, le contrat d'espèce est régi par le code des marchés publics antérieur à 2001 et ne peut se voir appliquer les nouvelles dispositions. La qualification du contrat par le législateur est écartée, c'est pourquoi le juge doit faire application de la jurisprudence antérieure en vérifiant si le contrat répond aux critères jurisprudentiels. [...]
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