Le tribunal administratif a-t-il eu raison de considérer que ladite opération ne trouvait pas sa base légale dans la loi de 1988 et qu'ainsi le projet constituait un marché de travaux publics ? Seule l'interprétation de cette loi de 1988, par son article 13, peut permettre de comprendre la volonté du législateur, et les conditions qu'il a voulu instaurer pour la formation de ce fameux « bail emphytéotique administratif ». Dans quelles conditions une collectivité locale peut-elle alors conclure un bail emphytéotique sur son domaine public?
La difficulté de la réponse réside dans la complexité relative à la notion de bail emphytéotique. La Haute Cour, le 25 février 1994, vient annuler le jugement de première instance aux motifs que le projet formé par la ville de Lille avec ses entrepreneurs rentrait parfaitement dans les conditions posées par la loi du 5 janvier 1988, et qu'ainsi il n'y avait aucune raison de dénaturer le bail conclu. Le Conseil d'Etat dégage alors une double portée de sa décision. D'une part, il montre que les conditions de constitution d'un bail emphytéotique sont relativement facilitées (I) envers les collectivités et grâce à la loi de 1988. D'autre part, il dégage le fait que ces conditions de constitution sont cependant contrôlées (II) afin de respecter le régime du domaine public.
[...] Des conditions de constitution d'un bail emphytéotique relativement facilitées : Ces conditions de constitution de ce bail se voient en effet facilitées tout d'abord parce que le législateur a invité le juge administratif à procéder à un revirement jurisprudentiel Invitation que le juge a scrupuleusement suivi, notamment en respectant les caractéristiques posées par la loi Un revirement jurisprudentiel imposé par le législateur : La jurisprudence antérieure était en effet centrée sur l'interdiction de constitution de droits réels sur le domaine public mais par la loi de 1988, elle a rapidement était contré Une jurisprudence antérieure centrée sur l'interdiction de constitution de droits réels sur le domaine public : L'arrêt de 1994 est intéressant dans le sens où il autorise la constitution de droits réels sur le domaine public. Il vient donc s'opposer à la jurisprudence antérieure Association Eurolat rendu par le Conseil d'Etat en date du 6 mai 1985. Pour mieux appréhender le problème juridique posé par l'arrêt SOFAP-Marignan, il faut déjà comprendre le sens de l'arrêt de 1985. D'après ce dernier, une collectivité locale ne pouvait faire appel à un partenaire privé dans le but de réaliser une mission de service public sur son domaine public. [...]
[...] Le bail emphytéotique conclue par la ville de Lille présente donc, d'après le Conseil d'Etat, toutes les caractéristiques instituées par le législateur et sa loi de 1988. Ce n'est pour autant que les conditions de constitution de ce bail ne sont pas contrôlées, par le juge notamment, afin d'éviter d'éventuels abus de la part des administrations. II- Des conditions de constitution d'un bail emphytéotique cependant contrôlées : Les conditions de constitution du bail en question, bien que facilitées, se voient corrélativement contrôlées. [...]
[...] Mais le législateur, par le biais de la loi du 5 janvier 1988, a souhaité contrer cette jurisprudence. Il restait au juge administratif d'en apprécier le contenu. Une jurisprudence antérieure contrée par la loi du 5 janvier 1988 : La loi de 1988 vient effectivement mettre fin à la jurisprudence Eurolat C'est à travers son article 13 que la délibération du conseil municipal de Lille s'est fondé pour justifier son projet. Cet article, bien que rappelant les principes d'inaliénabilité et d'imprescriptibilité du domaine public dispose qu'un bien immobilier appartenant à une collectivité territoriale peut faire l'objet, en faveur d'une personne privée, d'un bail emphytéotique prévu à l'article L.451-1 du code rural, en vue de l'accomplissement, pour le compte de la collectivité territoriale, d'une mission de service public ou en vue de la réalisation d'une opération d'intérêt général relevant de sa compétence Cette loi revoit et corrige la notion de bail emphytéotique administratif (qui diffère du bail emphytéotique au sens du droit privé). [...]
[...] Dans cette affaire, l'entreprise preneuse devait réaliser un ouvrage déterminé par la ville, cependant, le promoteur pourra user de ses bureaux privés tout à fait librement. Donc aucun problème de ce côté là. De plus, le montant du loyer ne sera sûrement pas assez élevé pour engendrer la dénaturation du bail comme l'évoque la doctrine. Un petit soucis aurait pu survenir à cause de cette fameuse clause de résiliation unilatérale ( en faveur de la collectivité locale). En cas de non exécution de ses obligations, le preneur pouvait se voir résilier le contrat par le bailleur. [...]
[...] Ceci dit, ce n'est pas pour autant que la nature du bail se voit préservée, car la loi de 1988 déroge aux principes du bail emphytéotique classique. Le tribunal administratif de Lille s'est d'ailleurs appuyé làdessus, en essayant de démontrer que les contraintes imposées au preneur ne pouvaient préserver la nature du bail. Des contraintes imposées au preneur préservant la nature du bail : Les contraintes imposées au preneur ne dénaturent pas le bail d'après le Conseil d'Etat. En droit privé, toute restriction apporté au droit de cession du preneur entraîne la déqualification du bail emphytéotique. [...]
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