Commentaire d'arrêt, Conseil d'Etat, 16 décembre 2005, recours pour excès de pouvoir, doctrine administrative
Selon l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales (LPF), l'administration ne peut écarter sa propre interprétation de la loi fiscale pour imposer un redressement à un contribuable qui a agi en fonction d'elle. L'opposabilité à l'administration de sa propre doctrine prévaut même si elle est illégale. Ainsi, ce mécanisme peut conduire des contribuables à rechercher l'annulation des
interprétations dont le sens leur déplaît.
Or l'administration peut créer de la doctrine sous des formes très variées (circulaires, instructions, rescrits publiés...) dont les réponses ministérielles font partie depuis un arrêt rendu par le Conseil d'Etat le 24 juin 1968. Selon le doyen Cornu, les réponses ministérielles sont des écrits dans lesquels un ministre saisi par une question écrite donne son interprétation sur le point qui lui est soumis.
L'intégration des réponses ministérielles au sein de la doctrine de l'administration fiscale invite à se poser la question des voies de contestation à la disposition des contribuables qui y sont opposés.
L'arrêt qu'il s'agit de commenter apporte des réponses à cette question.
En l'espèce, le ministre de l'Economie, des Finances et de l'Industrie, saisi d'une question parlementaire en 2004, a interprété des dispositions du Code général des impôts (CGI) de façon à exclure les implants dentaires de la liste des produits bénéficiant du taux réduit de TVA à 5,5 %.
[...] Il s'agissait pour la Section du contentieux du Conseil d'Etat de déterminer les conditions de recevabilité d'un recours pour excès de pouvoir à l'égard d'une réponse ministérielle interprétant la loi fiscale. Même si sa décision s'est soldée par un rejet du pourvoi, la Haute juridiction administrative a admis qu'un tel recours serait recevable lorsqu'une réponse ministérielle méconnaîtrait le sens ou la portée de la loi Cette décision rompt avec deux arrêts rendus précédemment par la même juridiction. D'une part, l'arrêt Sieur Hitzel (affirmant en 1936 que les réponses ministérielles ne pouvaient jamais faire l'objet d'un recours pour excès de pouvoir) et d'autre part, l'arrêt Duvignères rendu en 2002 et selon lequel la recevabilité d'un recours contre toute forme d'interprétation administrative n'était subordonnée qu'à son caractère impératif. [...]
[...] Or l'administration peut créer de la doctrine sous des formes très variées (circulaires, instructions, rescrits publiés . ) dont les réponses ministérielles font partie depuis un arrêt rendu par le Conseil d'Etat le 24 juin 1968. Selon le doyen Cornu, les réponses ministérielles sont des écrits dans lesquels un ministre saisi par une question écrite donne son interprétation sur le point qui lui est soumis. L'intégration des réponses ministérielles au sein de la doctrine de l'administration fiscale invite à se poser la question des voies de contestation à la disposition des contribuables qui y sont opposés. [...]
[...] Une solution au problème des directives L'arrêt Friadent a aussi le mérite de proposer une issue positive au problème des directives (à ne pas confondre avec les directives communautaires ou les directives d'aménagement national). Depuis l'arrêt Crédit Foncier de France (CE décembre 1970), il existe une catégorie d'actes par lesquels l'administration se fixe à elle-même une ligne de conduite dans l'exercice de son pouvoir (Cornu, Vocabulaire juridique). Dénués d'impérativité, ces actes ne pouvaient faire l'objet d'un recours pour excès de pouvoir (CE mai 2004, Comité anti-amiante Jussieu et ANDVA). [...]
[...] Un paradoxe à la portée incertaine Ainsi la notion d'interprétation opposable se voit teintée d'ambiguïté. Cela peut sembler paradoxal avec l'intention affichée du Conseil d'Etat de simplifier le régime des interprétations administratives. [...]
[...] Le concept d'interprétation opposable dans la tourmente Un sens qui varie selon la procédure suivie Le nouveau critère de recevabilité dégagé par le Conseil d'Etat est celui de l'opposabilité de l'interprétation sur le fondement de l'article L A du LPF. Or le sens de ce critère varie selon la procédure suivie. En effet, dans le contentieux de l'impôt une interprétation est opposable en fonction de nombreux critères dégagés par une jurisprudence particulièrement affinée, alors qu'en matière de recours pour excès de pouvoir, l'arrêt Friadent définit comme opposable l'interprétation qui méconnaît le sens ou la portée de la loi interprétée. [...]
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