« Le contrat est une convention par laquelle une ou plusieurs personnes s'obligent, envers une ou plusieurs autres à donner, à faire ou ne pas faire quelque chose ». Cette définition du contrat donnée par le Code civil à son article 1101 est commune à tous les contrats, qu'ils relèvent du droit administratif ou du droit privé. Cependant, malgré ces similitudes, la qualification du contrat est indispensable à la détermination de la juridiction compétente en cas de litige. La loi permet parfois de qualifier les contrats, lorsqu'elle l'énonce clairement, mais lorsque cela n'est pas le cas, c'est au juge administratif, à l'aide de certains critères, qu'il revient de les qualifier.
C'est ce qu'il s'est passé dans l'arrêt Codiam du 8 juin 1994 où la qualification de l'acte a été primordiale à la résolution du litige. En effet, un contrat entre le préfet de police de Paris et la Société Codiam avait été conclu, ayant pour objet la location de téléviseurs aux malades hospitalisés à la maison départementale de Nanterres. La Société Codiam se devait de proposer quotidiennement la location de téléviseurs aux malades et de recueillir le montant des locations. Cependant, n'ayant pas tenu ses obligations, le préfet de police a décidé de résilier le contrat. En réponse à cette résiliation unilatérale du contrat, la société Codiam assigne la ville de Paris, représentée par le préfet de police, en réparation du préjudice subi à la suite de la résiliation unilatérale du contrat. La société réclame en effet la somme de 272 780 F. Le 10 juin 1987, le tribunal administratif de Paris rejette sa demande. La société porte alors l'affaire devant le Conseil d'État réclamant l'annulation du jugement du tribunal administratif de Paris et la somme de 272 780 F avec intérêt à la ville de Paris. La question qui se pose ici est de savoir si un contrat, ayant pour objet la location de téléviseurs aux malades hospitalisés, est un contrat administratif permettant la compétence du juge administratif, et donc sa vocation à apprécier la légalité de la résiliation unilatérale du contrat. Le Conseil d'État, après avoir préalablement vérifié les critères jurisprudentiels du contrat administratif et établi la compétence de la juridiction administrative, a pu apprécier la légalité de la résiliation unilatérale du contrat.
[...] D'une part, dans l'arrêt du Conseil d'Etat, Compagnie nouvelle du gaz de Deville-lès-Rouen, le 10 janvier 1902, et plus clairement dans l'arrêt Compagnie générale française des tramways du 21 mars 1910, le Conseil d'Etat a consacré le pouvoir de modification unilatérale : l'administration a le droit d'imposer à son concessionnaire d'augmenter le nombre de rames de tramways en service,et ce, pour assurer, dans l'intérêt du public, la marche normale du service D'autre part, et c'est le pouvoir en cause dans notre cas, la personne publique peut résilier le contrat pour un motif d'intérêt général, même lorsqu'il n'y a pas eu de faute de la part du cocontractant. Ceci est consacré dans l'arrêt du Conseil d'Etat, Distillerie de Magnac- Laval du 2 mai 1958. Mais dans ce cas-ci, le cocontractant n'ayant pas commis de faute, il pouvait prétendre à une indemnisation intégrale. Ceci s'oppose à notre arrêt Codiam puisque la résiliation du contrat résulte d'une faute de la société. [...]
[...] Il confirme alors la résiliation unilatérale et rejette la demande d'indemnités de la société Codiam. Cette solution se trouve au cœur d'un conflit jurisprudentiel. En effet, d'autres solutions rendues par le Conseil d'Etat quelques années après donnent une solution totalement inverse pour des faits similaires. En effet, dans l'arrêt Codiam rendu par le tribunal des conflits en 2007, où l'activité de la société était la même, la simple participation à un service public ne fait pas de celle-ci un contrat administratif. [...]
[...] Cela doit être contrôlé par la juridiction administrative, compétente pour ces litiges, au regard des faits. La compétence de la juridiction administrative pour contrôler la résiliation du contrat au regard de l'intérêt général Le contrat étant administratif, il appartient donc à la juridiction administrative d'apprécier la légalité de la résiliation unilatérale du contrat. En l'espèce, le juge reconnaît le manquement aux obligations prévues par le contrat de la société Codiam, et ajoute que cela a privé certains malades soit de la possibilité de disposer d'un téléviseur, soit d'obtenir en cas de sortie anticipée, le remboursement, prévu par le contrat, du montant de la location Ceci constitue pour le Conseil d'Etat d'un manquement grave aux obligations contenues dans le contrat justifiant sa résiliation au regard de l'intérêt général. [...]
[...] On peut en déduire leur inexistence dans le contrat en cause. D'ailleurs, le juge s'attache uniquement à définir l'objet même du contrat. En effet, il énonce clairement les obligations de la société Codiam, découlant du contrat : il s'agit de quotidiennement proposer la location de téléviseurs aux malades et recueillir le montant des locations Par suite, il poursuit son raisonnement en définissant le service public hospitalier, à savoir la dispense de soins mais également l'aménagement des conditions de séjour des malades C'est de cette façon que le juge, considérant que la location de téléviseur aux malades correspond à une partie du service public hospitalier, à savoir, l'aménagement des conditions de séjour des malades, qu'il va en conclure que le contrat a eu pour objet de faire participer la société Codiam à l'exécution du service public hospitalier Ainsi, il est clair que la société Codiam participe à une mission de service public. [...]
[...] L'analyse de l'objet du contrat litigieux: une étape préalable essentielle à l'établissement de la compétence de la juridiction administrative Le contrat ayant pour objet la location de téléviseurs aux malades hospitalisés, conclu entre un préfet de police et une société privée, n'est pas qualifié légalement. Il convient donc de se tourner vers les critères jurisprudentiels permettant de qualifier ou non un contrat administratif L'insuffisance du critère organique mène les juges à se tourner vers le critère de l'objet du contrat pour qualifier le contrat. L'insuffisance du critère organique à la qualification du contrat Il est habituel de considérer qu'un contrat ne peut être administratif que s'il y a présence d'une personne publique. Cependant, la jurisprudence a présenté plusieurs exceptions. [...]
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