La formulation selon laquelle « nul ne peut s'enrichir injustement aux dépens d'autrui » est un principe général du droit qui imprègne actuellement le droit de l'action en restitution de sommes indûment versées, et vers lequel l'arrêt rendu par la Première Chambre Civile de la Cour de Cassation le 13 octobre 1998 a effectué un premier pas marquant.
Il s'agissait en effet en l'espèce d'une SCP notariale Fabre & Goujon, ayant versé par erreur à la place des consorts Champredonde le prix de règlement d'un immeuble au vendeur, à hauteur de 260 000 francs.
La SCP notariale, ici solvens, a donc assigné les consorts Champredonde, véritables débiteurs de l'obligation de paiement, en restitution de la somme ainsi indûment versée. La Cour d'Appel de Riom a, dans un arrêt du 10 octobre 1996, fait droit à cette demande, si tant et bien que les consorts Champredonde ont formé un pourvoi en cassation.
Dans ce pourvoi, ils soutiennent le moyen selon lequel « l'action en répétition de l'indu peut être engagée soit contre celui qui a reçu le paiement, soit contre celui pour le compte duquel il a été reçu, mais qu'elle ne peut être dirigée contre celui pour le compte duquel le paiement a été effectué ». La Cour d'Appel, en statuant comme elle l'a fait, aurait alors violé l'article 1377 alinéa 1er du Code Civil.
En l'espèce, il s'avère que la Haute Juridiction a rejeté ce pourvoi, et a donc condamné les consorts Champredonde à rembourser au solvens la SCP notariale la somme que ce dernier a indûment versée.
Ce faisant, la Cour de Cassation a été confrontée au problème de savoir si un solvens ayant par erreur versé une somme à un accipiens pouvait conduire une action, qui ressemble en l'espèce fort à une répétition de l'indu, contre le véritable débiteur de l'obligation. Une réponse affirmative n'est-elle pas pour le moins ambiguë au regard de l'état du droit positif en 1998 ?
Il apparaît en effet que si la Cour de Cassation a, dans son arrêt du 13 octobre 1998, procédé à un infléchissement attendu de sa jurisprudence en matière d'action d'un solvens en répétition de sommes indûment versées contre le véritable débiteur d'une obligation (I), il n'en est pas moins que la solution ici préconisée apporte plusieurs ambiguïtés quant à l'état actuel du droit à la répétition de l'indu (II).
[...] C'est à ce moment précis qu'entre en jeu la formulation de la Première Chambre Civile quant à l'erreur (cf. IIB). En effet, la doctrine est unanime pour considérer que la preuve de l'erreur serait à même de démontrer l'absence de cause juridique dans les relations entre le solvens et le véritable débiteur. A supposer alors que l'arrêt du 13 octobre 1998 présenterait une forme d'enrichissement sans cause, il faut toutefois noter qu'à cette date, l'enrichissement sans cause est perçu comme une action qui ne doit rester que marginale, ce qui veut dire qu'elle ne peut s'appliquer que de façon subsidiaire, dans les cas où le solvens malencontreux n'a aucune autre possibilité d'indemnisation. [...]
[...] Cf. distinction opérée par J.Mestre entre le profit intellectuel et le profit matériel tiré d'une prestation, RTDCiv 1985 ; p.728. A.Bénabent, Droit Civil : Les Obligations, 10e édition, 482. [...]
[...] En effet, l'article 1377 évoquant une situation qui s'avère être la plus proche des faits de l'espèce en ceci qu'il évoque le cas de l'erreur commise par le solvens, ne fait allusion qu'à un droit de répétition contre le créancier. Ceci semble être un principe de l'action en répétition de l'indu : le défendeur à l'action, ne peut, selon les articles 1235, 1376s. du Code Civil, être que le créancier de l'obligation de paiement. Ce principe a notamment été mis en valeur par la jurisprudence constante de la Première Chambre Civile relatant de l'action fondée sur l'article 1377 du Code Civil. [...]
[...] Une réponse affirmative n'est-elle pas pour le moins ambiguë au regard de l'état du droit positif en 1998 ? Il apparaît en effet que si la Cour de Cassation dans son arrêt du 13 octobre 1998, procédé à un infléchissement attendu de sa jurisprudence en matière d'action d'un solvens en répétition de sommes indûment versées contre le véritable débiteur d'une obligation il n'en est pas moins que la solution ici préconisée apporte plusieurs ambiguïtés quant à l'état actuel du droit à la répétition de l'indu (II). [...]
[...] Commentaire d'arrêt, Chambre Civile 1ère octobre 1998 La formulation selon laquelle nul ne peut s'enrichir injustement aux dépens d'autrui est un principe général du droit qui imprègne actuellement le droit de l'action en restitution de sommes indûment versées, et vers lequel l'arrêt rendu par la Première Chambre Civile de la Cour de Cassation le 13 octobre 1998 a effectué un premier pas marquant. Il s'agissait en effet en l'espèce d'une SCP notariale Fabre & Goujon, ayant versé par erreur à la place des consorts Champredonde le prix de règlement d'un immeuble au vendeur, à hauteur de francs. [...]
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