Le Conseil d'Etat allait-il faire application de sa jurisprudence Nicolo de 1989 en acceptant de contrôler, pour la première fois, la compatibilité d'une loi et d'une norme internationale antérieure, mais non communautaire ? S'il acceptait de réaliser ce contrôle, quelle position prendrait-il sur la question de la légalisation de l'avortement ? Ces questions nous portent à étudier dans un premier temps les moyens tirés de la violation du code de la santé publique (I), puis les moyens tirés de l'incompatibilité de la loi française avec la Convention européenne des droits de l'Homme (II)
[...] Commentaire d'arrêt: CE décembre 1990, confédération nationale des associations familiales catholiques Introduction L'avortement, pourtant légalisé depuis les lois du 17 janvier 1975 et du 31 décembre 1979, suscite encore une vive contestation au sein de la population. C'est ce qu'illustre l'arrêt du Conseil d'Etat du 21 décembre 1990. Dans cette affaire, la Confédération nationale des associations familiales catholiques conteste la légalité de l'arrêté ministériel du 28 décembre 1988 pris par le ministre de la Solidarité, de la Santé et de la Protection sociale, relatif à la détention, la distribution, la dispensation et l'administration de la spécialité Myfégine. [...]
[...] Selon le C.E, l'appréciation portée par le ministre sur l'absence de danger ( ) n'est pas entaché d'erreur manifeste Ici, le C.E précise qu'il n'entend procéder qu'à un contrôle restreint, c'est à dire vérifier que l'administration n'a pas commis d'erreur manifeste. - Arrêt Lagrange (1961) On peut imaginer deux raisons pour lesquelles le C.E n'a pas procédé à un contrôle plus approfondi : - Il s'agit d'apprécier un danger, soit la simple éventualité d'un dommage, éventualité dont l'appréciation est difficile (Arrêt Librairie François Maspéro (1973)). - En matière médicale, il est difficile d'opérer un contrôle de légalité par des non spécialistes. L'arrêt sur ce point semble concerner la mise sur le marché de tous les médicaments. B. [...]
[...] Cependant, le C.E a considéré que la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'Homme pouvait être invoquée. Ceci suppose alors une double appréciation : - Applicabilité de la Convention en droit français. - Compétence du C.E pour écarter une loi incompatible. Sur le premier point, le C.E note que la Convention a été régulièrement ratifiée et publiée comme l'exige l'article 55 de la Constitution de 1958. Sur le second point, la question se posait de savoir si le C.E allait appliquer sa jurisprudence Nicolo qui admet que les juridictions administratives françaises peuvent écarter une loi incompatible avec un traité, même si la loi est postérieure au traité. [...]
[...] Première partie : Les moyens issus de la violation du code de la santé publique Il s'agit d'abord pour le C.E de déterminer la nature juridique exacte de la pilule par rapport aux notions du code de la santé publique. La décision montre que ce produit a une double nature : - médicament fabriqué par un laboratoire pharmaceutique - produit ayant la propriété d'interrompre la grossesse Ceci fait entrer en ligne de compte deux dispositions du code de la santé publique : - celles relatives à la commercialisation des médicaments - celles visant à encadrer le droit à l'avortement A. [...]
[...] Application de la Convention On notera l'importance dans la distinction des termes : ici, le C.E fait référence à l'incompatibilité et non pas à la non conformité Ceci signifie que le C.E procède à un contrôle général visant à vérifier qu'il n'y a pas de contradictions graves entre la loi et la Convention internationale, le contrôle de conformité imposant un formalisme beaucoup plus important. D'autre part, nous pourrons noter le double apport de cet arrêt en matière de garantie des droits fondamentaux : - Le C.E considère que l'avortement n'est pas contraire au principe général du droit à la vie. - La Convention européenne de sauvegarde des droits de l'Homme fait son entrée au sein des normes supra législatives appliquées par le C.E. [...]
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