Faute de service- faute personnelle- droit administratif- CE 17 juin 2009
D'après La Ferryère: "la faute de service est celle qui relève d'un administrateur plus ou moins sujet à erreur, la faute personnelle relève de l'homme avec ses faiblesses, passions et imprudence".
Dans une décision rendue le 17 juin 2009, un directeur de centre pénitentiaire, M. B décide d'abattre, avec la participation d'un membre de sa famille et de trois détenus munis de matériels du centre pénitentiaire, des arbres dans le but de dégager et permettre la vue sur le lagon depuis son logement de fonction. Ces arbres sont la propriété d'une personne privée. La propriétaire Mme A recherche la réparation du préjudice né de cette action, conduite sans son accord et assigne en justice M.B devant le tribunal judiciaire.
Le 15 janvier 2007, le tribunal civil de première instance de Papeete s'est reconnu incompétent pour ce genre de litige du fait qu'il en vient de la compétence des tribunaux administratifs de statuer sur ce genre du litige. Mme A a alors assigné en réparation devant le tribunal administratif, l'État, du fait des préjudices subis.
Le tribunal administratif de la Polynésie française a renvoyé le 18 novembre 2008 l'affaire devant le Tribunal des conflits pour qu'il soit décidé sur la compétence, en retenant, pour décliner la compétence de la juridiction administrative, que l'opération d'abattage avait été réalisée pour une finalité sans intérêt au service et portant une atteinte grave au droit de propriété de Mme A, présentait les caractères d'une voie de fait, quand bien même elle aurait été commise avec les moyens de l'administration et ne serait pas dépourvue de lien avec le service.
Une faute commise avec les moyens d'un service administratif, sous l'ordre du responsable du service, cependant sans intérêt au service, peut-elle être détachable de ce service ?
Sous-entendu : la responsabilité personnelle peut-elle être engagée durant l'exercice de fonctions administratives si la faute revêt un caractère personnel et sans intérêt pour le service?
Une faute commise par un directeur de service violant les libertés fondamentales et donc considérées comme une voie de fait peut-elle être rattachée au service et donc engager la responsabilité de l'administration?
Quelle juridiction est donc compétente pour répondre de ce litige ?
[...] Dans cette catégorie de faute, il y a deux critères, l'agent doit agir pour motif personnel et l'autre critère est qu'il doit agir en dehors du service. Il est très rare d'avoir une faute purement personnelle, car il y a souvent un lien avec le service puisque dans le cas précis il y a lien avec le service même si ce lien n'a pas d'intérêt au service. Par conséquent, la décision rendue accusant B d'avoir commis une faute personnelle est clairement justifiée. [...]
[...] La faute personnelle de 1ère catégorie. C'est le cas de la faute de l'agent public commise dans l'exercice de ses fonctions. Dans cette hypothèse est une faute personnelle la faute qui se détache des fonctions exercées par l'agent en raison de sa particulière gravité et qui révèle donc le comportement personnalisé d'un homme. Ce type de faute personnelle vise essentiellement trois hypothèses : 1ère hypothèse : celle où l'agent public a été animé, pendant son service, par des préoccupations d'ordre privé (volonté de nuire, malveillance délibérée). [...]
[...] Toutes ces difficultés rattachent la faute personnelle et le service. L'arrêt du CE, 3/02/1911, Anguet a inauguré la théorie de cumul de responsabilité : M. Anguet se rend à la poste et pendant qu'il effectue ses opérations postales le bureau ferme avant l'heure règlementaire. Un agent l'invite à sortir par la porte de service, mais M. Anguet s'égare dans les locaux. Il aboutit au centre de tri où deux agents le prennent pour un voleur, le jettent dehors et il se casse la jambe. [...]
[...] Il est difficile, même en cas de faute personnelle, de faire complètement abstraction du service, car généralement, c'est le service qui met en relation l'agent public, auteur du dommage, et la victime : CE, 21/04/1937, Quesnel : une receveuse des postes détourne des fonds que les clients venaient déposer sur leur compte épargne. Si le dommage a pu se produire c'est par le service parce qu'il s'agit d'une faute en relation avec le service. Il y a un lien entre la faute personnelle et le service qui lui a permis de commettre cette infraction. [...]
[...] Donc, à côté de la faute personnelle, figure aussi une faute de service. En l'espèce la décision a considéré que l'action de M.B de découper ces arbres n'avait aucun intérêt et lien avec le service seulement en l'utilisation des moyens mis à disposition par le service pour que M.B effectue cette faute. M.B n'a reçu aucun ordre de ces supérieurs et n'a demandé aucune autorisation pour engager l'action. Il a agi purement dans son intérêt personnel pour pouvoir profiter de la belle vue depuis son poste de fonction. [...]
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