Nous ne sommes pas sur Terre pour juger mais pour apprécier a dit un célèbre œnologue en parlant des délices du vin… Et si le rôle du magistrat était plutôt de juger l'appréciation ? C'est bien ce qui lui est demandé en l'espèce : juger l'appréciation d'un maire qui a d'une part pris un arrêté contre le stationnement continu de camions-citernes sur la voie publique et d'autre part refusé de prendre une mesure de police, et plus particulièrement un couvre-feu à l'encontre des mineurs de moins de 13 ans non accompagnés, sur le territoire de sa commune.
[...] En effet, selon l'article 21 de la loi n°2000-321 du 12 avril 2000, le silence gardé pendant plus de deux mois par l'autorité administrative sur une demande vaut décision de rejet Le principe est donc : qui ne dit mot refuse. Et c'est contre ce refus que l'Association a saisi le tribunal administratif de Rennes de recours pour excès de pouvoir, qui est un acte de procédure par lequel on saisit le juge administratif d'une demande tendant à l'annulation d'un acte administratif que l'on estime illégal. Seulement le tribunal administratif a rejeté la demande d'annulation de la décision implicite de rejet. L'Association a par la suite interjeté appel devant la cour administrative d'appel de Nantes. [...]
[...] Tout d'abord parce que l'administration ne peut en principe exiger des bénéficiaires du service public de la police le paiement d'une redevance. La seconde raison, celle qui nous intéresse, est que contrairement à la plupart des autres services publics, le service public de la police ne peut être délégué purement et simplement à une personne privée (C.E., Sect mai 1958, Consorts Amoudruz). *Au vu de cette considération, la demande de l'Association des Commerçants Citoyens de la ville de DOL de Bretagne est illégale. [...]
[...] L'arrêt soulève ici le problème de la légalité de l'appréciation du maire au sujet de la demande d'abrogation et d'instauration d'un couvre-feu qui lui est soumise. Le juge doit ici rappeler le bien-fondé des décisions rendues, les règles légales et jurisprudentielles auxquelles elles obéissent. Le juge devait alors dans un premier temps remonter à la source du litige afin de déterminer si la mesure prise par le maire était légale ou pas. Et c'est ce qu'il fait de manière didactique puisqu'après avoir justifié la légalité de l'arrêté municipal par la mission de police administrative incombant au maire, il la justifie par le respect des interdictions formelles qui s'imposent à ce genre de décision. [...]
[...] En effet, seule la loi peut prévoir une telle atteinte aux libertés publiques (C.E janvier 1932, Société des autobus antibois). B.Une décision prétorienne justifiée par la mission de police administrative incombant au maire : l'ordre public comme maître mot 1. La vérification de motifs valables : un réel danger pour l'ordre public *Lorsqu'il exerce un contrôle de la mesure de police, le juge porte une attention particulière aux motifs qui ont incité l'autorité administrative à prendre une mesure de police. [...]
[...] *Ainsi, en refusant de prendre un arrêté instaurant un couvre-feu, le maire a refusé d'appliquer une demande excessive qui, si elle précise une plage horaire de l'interdiction, ne précise pas l'étendue des secteurs qui doivent être concernés. Annexe : Cour Administrative d'Appel de Nantes juillet 2005, Association des Commerçants Citoyens de DOL de Bretagne Vu la requête, enregistrée le 3 septembre 2001 au greffe de la cour, présentée pour l'Association des Commerçants Citoyens de la ville de DOL de Bretagne par Me de Brisis ; L'Association des Commerçants Citoyens demande à la cour : d'annuler le jugement en date du 5 juillet 2001 du tribunal administratif de Rennes en tant qu'il rejette sa demande d'annulation de la décision implicite par laquelle le maire de DOL de Bretagne a rejeté sa demande tendant à ce que le maire abroge l'arrêté en date du 26 juin 2000 par lequel ce dernier a interdit la livraison et la distribution de carburant par camions- citernes stationnés de manière continue sur la voie publique ou sur les parkings publics, et à ce que le maire soit réglemente la circulation, dans la commune, des mineurs de moins de treize ans non accompagnés d'une personne majeure, soit confie à l'Association des Commerçants Citoyens le soin de surveiller la circulation de ces mineurs ; d'annuler pour excès de pouvoir cette décision implicite de rejet ; Considérant qu'aux termes de l'article L.2212-1 du code général des collectivités territoriales le maire est chargé du service public particulier de la police administrative dont la finalité d'intérêt général est le maintien de l'ordre public sur le territoire de la commune ; Considérant que, par un arrêté à caractère réglementaire daté du 26 juin 2000, le maire de DOL de Bretagne a interdit, du Ier juillet au 31 août de chaque, année et de 9 heures à 19 heures 30, la livraison et la distribution de carburant par camions-citernes stationnés de manière continue sur la voie publique ou sur les parkings publics , Considérant que par une réclamation parvenue au maire de DOL de Bretagne le 25 juillet 2000, l'Association des Commerçants Citoyens a demandé au maire, d'une part d'abroger sa décision du 26 juin 2000, et d'autre part soit d'interdire, au contraire, pour toujours, la circulation dans la ville, entre 23 heures et 6 heures, des mineurs de moins de treize ans non accompagnés d'une personne majeure soit de confier à l'Association des Commerçants Citoyens le soin de surveiller la circulation desdits mineurs ; Considérant qu'aux termes de l'article 21 de la loi du 12 avril 2000 Sauf dans les cas où un régime de décision implicite d'acceptation est institué dans les conditions prévues à l'article 22, le silence gardé pendant plus de deux mois par l'autorité administrative sur une demande vaut décision de rejet , qu'ainsi, à la date du 25 septembre 2000, le maire de DOL de Bretagne est réputé avoir rejeté implicitement la double demande de l'Association des Commerçants Citoyens ; Sur la légalité de l'arrêté du 26 juin 2000 relatif aux camions-citernes : Considérant qu'il ressort des pièces du dossier qu'en estimant qu'eu égard à la densité et aux difficultés de circulation et de stationnement dans la commune en période d'affluence touristique, et aux risques d'incendie sur la voie publique liés à cette activité, la livraison et la distribution de carburant par camions-citernes stationnés de manière continue sur la voie publique ou sur les parkings publics, en journée, pendant la période estivale, étaient susceptibles de menacer la sécurité et la tranquillité publiques, le maire de DOL de Bretagne n'a pas commis d'erreur d'appréciation ; Considérant que le stationnement des camions-citernes sur la voie publique ou sur les parkings publics n'est prohibé par l'arrêté que s'il est continu et a pour objet la création d'un point de vente ou de livraison de carburant par les sociétés distributrices , qu'ainsi, contrairement à ce que soutient l'association requérante, l'arrêté litigieux n'édicte pas une interdiction générale et absolue des activités de livraison et de distribution de carburant par camions-citernes ; qu'en ne subordonnant pas à autorisation l'exercice d'activités professionnelles, contrairement à ce que soutient l'association requérante, il ne porte pas atteinte au principe de la liberté du commerce et de l'industrie ; Sur la légalité du refus de réglementer la circulation des mineurs : Considérant que le refus opposé par un maire à une demande tendant à ce qu'il fasse usage des pouvoirs de police que lui confère le code général des collectivités territoriales n'est entaché d'illégalité que dans le cas où, en raison de la gravité du péril résultant d'une situation particulièrement dangereuse pour l'ordre public, cette autorité n'ordonne pas les mesures indispensables pour faire cesser ce péril grave, Considérant qu'il ne ressort pas du dossier que la liberté de circulation des mineurs ait exposé l'ordre public ou les intéressés à un péril d'une telle nature ou à des risques particuliers, Considérant qu'une personne privée ne peut se voir confier des tâches de surveillance de la voie publique, lesquelles relèvent, dans les communes, de la police municipale ; Considérant qu'il résulte de ce qui précède que l'Association des Commerçants Citoyens n'est pas fondée à demander l'annulation de la décision attaquée; DÉCIDE : Article : La requête de l'Association des Commerçants Citoyens est rejetée [ . [...]
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