Par les arrêts Sarran (30 octobre 1998) et Syndicat national de l'industrie pharmaceutique (3 décembre 2001), le Conseil d'Etat avait affirmé la primauté de la Constitution sur le droit communautaire. Ainsi, il devrait logiquement pouvoir procéder à un contrôle de constitutionnalité des actes réglementaires de transposition d'une directive communautaire. Toutefois, les décrets de transposition se bornant souvent à reprendre à l'identique les dispositions des directives, un tel contrôle revient à contester, indirectement, la constitutionnalité de la directive elle-même – acte qui émane d'une autorité autre que l'autorité nationale. Une telle compétence du Conseil d'Etat n'est donc pas si évidente ; il s'agit ici bien de concilier la primauté de la Constitution dans l'ordre interne, garantie pour les actes réglementaires par le Conseil d'Etat, et la participation de la France aux Communautés Européennes.
[...] Ce sont ces modalités que nous examinerons dans une seconde partie. Ainsi, le Conseil d'Etat retient deux fondements constitutionnels au contrôle de constitutionnalité indirect (car s'effectuant par le biais d'un acte règlementaire de transposition) des directives communautaires. Plus encore, la reconnaissance cette compétence nouvelle est aussi rendue possible par une invitation implicite du Conseil constitutionnel dans sa jurisprudence récente. La reprise d'une jurisprudence récente du Conseil constitutionnel En 2006, le Conseil constitutionnel développa une nouvelle jurisprudence, invitant implicitement le Conseil d'Etat à effectuer un contrôle de constitutionnalité des actes réglementaires de transposition d'une directive communautaire. [...]
[...] En effet, comme le suggère le vice-président du Conseil d'Etat, deux lectures extrêmes de cet arrêt sont possibles, mais la lecture pertinente tient en leur juste milieu. On pourrait soutenir que le juge national s'efface totalement devant le juge communautaire. On pourrait dire également que cette décision porte la marque d'un certain souverainisme, puisque le Conseil d'Etat continue à contrôler les actes réglementaires de transposition au regard du droit constitutionnel, lorsque les principes de celui-ci n'ont pas d'équivalent en droit communautaire A la vérité, aucun des deux juges ne s'efface devant l'autre, mais cet arrêt retient une solution intermédiaire de conciliation entre les deux. [...]
[...] Le second fondement constitutionnel retenu par le Conseil d'Etat est l'article 88-1 C. En effet, le Palais-Royal considère qu'une obligation constitutionnelle de transposition des directives découle de l'alinéa premier de cet article, selon lequel La République participe aux Communautés Européennes et à l'Union Européenne, constituées d'Etats qui ont choisi librement, en vertu des traités qui les ont instituées, d'exercer en commun certaines de leurs compétences En cela, il reprend une jurisprudence récente du Conseil constitutionnel. En effet, dans sa décision 2004-496 DC du 10 juin 2004, le Conseil constitutionnel fit pour la première fois une lecture juridique de cet article 88-1, alors même que ses rédacteurs l'avaient conçu comme un article à caractère purement politique, de présentation générale du Titre XV (député A. [...]
[...] Si, à l'issue de cette phase de recherche, il appert qu'il n'existe pas d'équivalent communautaire au principe constitutionnel invoqué, alors il revient au juge administratif d'examiner directement la constitutionnalité des dispositions règlementaires contestées C'est donc le cas d'un principe constitutionnel spécifique à la France (puisque ne connaissant pas d'équivalent communautaire), pour lequel le Conseil d'Etat reprend la solution du Conseil constitutionnel : il effectue un contrôle de constitutionnalité direct de la directive. Si celle-ci ne s'avérait pas conforme au principe invoqué, l'acte règlementaire de transposition serait donc écarté. Mais comme le souligne la doctrine (F. [...]
[...] A contrario de cet article, le Conseil d'Etat en déduit que la suprématie ainsi conférée aux engagements internationaux ne saurait s'imposer, dans l'ordre interne, aux principes et dispositions à valeur constitutionnelle En cela, il reprend les termes exacts d'une jurisprudence déjà ancienne, trouvant son origine dans l'arrêt Sarran, Levacher et autres (30 octobre 1998), par lequel le Conseil d'Etat s'est trouvé être la première juridiction française à consacrer la primauté de la Constitution sur les engagements internationaux. En outre, par l'arrêt Syndicat national de l'industrie pharmaceutique décembre 2001), le Palais Royal a précisé que cette primauté s'appliquait également au droit communautaire. De là, la primauté des dispositions constitutionnelles sur celles d'une directive communautaire est évidente. [...]
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