Le 18 juin 1989, les citoyens français furent appelés à élire au suffrage universel direct leurs représentants à l'Assemblée des Communautés européennes qui est devenue le Parlement européen depuis l'entrée en vigueur de l'Acte unique du 28 février 1986. Ces élections ont intéressé les amateurs de procédure contentieuse.
M. Roujansky a formulé une requête, le 28 juin 1989, au secrétariat du contentieux du Conseil d'État afin qu'il annule ces opérations électorales. En effet, il considère que les modalités d'organisation de l'élection des représentants au Parlement européen fixées par la loi du 7 juillet 1977 sont contraires à la Constitution, notamment aux articles 2, 3, 34 et 53.
Le Conseil d'État est saisi et il va juger en premier et dernier ressort. En effet, selon une réforme de 1953, celui-ci est compétent pour juger en premier et dernier ressort les contentieux relatifs aux élections au Parlement européen.
Ainsi on peut se poser la question : le juge administratif est-il compétent pour apprécier la constitutionnalité d'un acte administratif pris en application d'une loi ?
Dans un arrêt du 20 octobre 1989, le Conseil d'État a considéré qu'il n'appartient pas au juge administratif d'apprécier la constitutionnalité de la loi du 7 juillet 1977. Il a donc rejeté la demande de M. Roujansky.
Considérant que les opérations électorales du Parlement européen ont été prises en application de la loi du 7 juillet 1977, on peut établir que le juge administratif ne peut vérifier directement leur constitutionnalité. Or, ce dernier n'est pas compétent pour vérifier la constitutionnalité de la loi de 1977 ; par conséquent il ne peut pas apprécier celle des modalités d'organisation de l'élection des représentants au Parlement européen.
[...] L'écran législatif limite le pouvoir du juge administratif ne pouvant vérifier la constitutionalité d'une loi. Mais dans un arrêt rendu le même jour (l'arrêt Nicolo), le Conseil d'Etat a mis en évidence que cette théorie ne s'appliquait plus au contrôle de conformité des lois aux traités. Cette solution met fin à la jurisprudence semoule qui considérait qu'en vertu de la présence de l'écran législatif, les lois postérieures et contraires au traité ne devaient pas se soumettre à celui- ci. Désormais, le Conseil d'Etat n'est plus limité et peut vérifier la conformité des lois postérieures aux traités et ces lois doivent s'y soumettre. [...]
[...] En effet, le juge administratif ne peut pas apprécier la constitutionnalité des opérations électorales européennes car elles ont été prises en application de la loi de 1977 et le juge administratif refuse de vérifier la constitutionnalité de cette loi (CE 15 octobre 1965, Union fédérale des magistrats et Reliquet). La loi fait donc obstacle (écran) au contrôle du juge administratif quant à l'appréciation de la validité des opérations électorales qui faisaient l'objet du recours. Le juge administratif refuse donc toute censure de l'acte administratif car agir autrement reviendrait pour lui à dire que la loi est contraire à la Constitution ce qu'il ne peut pas établir. [...]
[...] À partir de là, la loi de 1977 va donc s'imposer à toutes les autorités administratives et aux juridictions. Cette loi est donc devenue un acte suprême, comme l'a souligné le doyen Vedel, c'est un acte incontestable B La théorie de l'écran législatif limite les pouvoirs du juge administratif Dans le cadre du contrôle de constitutionnalité des décisions administratives, la juridiction administrative joue un rôle important. Mais ce contrôle va connaître une limite inhérente aux compétences du juge administratif. En effet il est compétent pour veiller au respect de la loi mais il ne peut, en aucun cas, contrôler la conformité des lois à la Constitution. [...]
[...] Le seul moment où l'on peut vérifier la constitutionnalité d'une loi se situe entre l'adoption de celle-ci par le Parlement et sa promulgation. Après cette dernière, la loi devient un acte incontestable Le contrôle de la constitutionnalité d'une loi relève de la compétence exclusive du Conseil Constitutionnel mais uniquement avant sa promulgation Après son adoption par le Parlement, le texte de la loi du 7 juillet 1977 a été transmis au Président de la République pour qu'il la promulgue. Pour se faire, le Président de la République dispose d'un délai de 15 jours. [...]
[...] Pour ce faire, il devrait vérifier la constitutionnalité de la loi du 7 juillet 1977 mais est- il compétent pour le faire ? II Le juge administratif n'est pas compétent pour apprécier la constitutionnalité de la loi de 1977 et par conséquent celle des opérations électorales La Constitution de 1958 a mis fin à la souveraineté de la loi. Cette dernière n'est plus la norme suprême, elle est soumise à la Constitution et aux normes internationales et son domaine n'est plus illimité. Le contrôle de la conformité des lois à la Constitution est l'une des innovations fondamentales de la Constitution de 1958. [...]
Bibliographie, normes APA
Citez le doc consultéLecture en ligne
et sans publicité !Contenu vérifié
par notre comité de lecture