Symbole du droit administratif français, la possibilité d'un recours pour excès de pouvoir semble toujours plus s'élargir.
Il a été défini notamment par le vice président du Conseil d'Etat Lafférierre, dans le cadre de ce qu'il appelle le contentieux de l'annulation. Ce fleuron du droit administratif permet au juge d'annuler une décision administrative entachée d'illégalité. C'est une arme redoutable en ce qu'il permet l'annulation de l'acte dès son entrée en vigueur : par une fiction juridique, il n'a jamais existé. Mais arme redoutable, il l'est tout autant du fait qu'il est ouvert à tous et contre toutes les décisions administratives depuis le célèbre arrêt Dame Lamotte rendu par le Conseil d'Etat il y a un demi-siècle (CE, ass, 17 février 1950).
Ouvert en cas d'illégalité de la décision administrative, cette illégalité se vérifie par rapport à de nombreuses normes, selon la théorie de la hiérarchie normative : une règle inférieure doit se conformer à toutes les règles qui lui sont supérieures. Dès lors, cette illégalité se vérifie par rapport aux actes réglementaires émanant d'une autorité supérieure, par rapport ensuite à la loi (c'est le contrôle de légalité) et aux traités internationaux depuis l'arrêt d'Assemblée de 1989 (CE, Ass, 20 octobre 1989, Nicolo). En ce qui concerne la Constitution, cette vérification est plus aléatoire et délicate du fait de la théorie de la loi écran, le juge administratif, n'étant pas le juge constitutionnel.
En l'espèce, deux parents d'élèves jumeaux exercent un recours pour excès de pouvoir contre la décision par laquelle la directrice de l'école avait séparé les deux enfants dans deux classes différentes et contre la décision de l'inspecteur d'académie du Val-d'Oise ayant rejeté leur recours hiérarchique. Les requérants invoquent la Constitution, et notamment son préambule, ainsi que plusieurs traités internationaux.
La difficulté en l'espèce reposait sur la nature de la décision prise par la directrice de l'école : s'agissait-il ou non d'une mesure d'ordre intérieur ? Cette mesure pouvait-elle faire l'objet d'un recours en annulation, au regard de la Constitution et notamment de son préambule, ainsi que de la Déclaration Universelle des Droits de l'Homme (DUDH) et de la convention de New York relative aux droits de l'enfant ?
[...] La Cour administrative d'Appel rappelle dans le considérant, une des conditions pour laquelle la qualification d'ordre intérieur doit être rejetée. B. Un rejet de plus en plus fréquent de la qualification de mesure d'ordre intérieur La jurisprudence définie par les arrêts Hardouin et Marie du Conseil d'Etat Ass février 1995) permet de rendre compte de ces conditions. Dans ces arrêts, deux espèces étaient jugées, plus ou moins similaires : il s'agissait en premier lieu d'un militaire, qui, ayant été surpris en état d'ébriété lors de ces fonctions, avait reçu une forte sanction. [...]
[...] Il est toutefois intéressant de soulever que le militaire a vu sa requête rejetée par le Conseil d'Etat, à l'inverse du détenu, car contrairement au premier, ce dernier voyait dans la décision prise par l'établissement de détention une atteinte à sa liberté fondamentale d'aller et venir. Dans le cas d'espèce, on peut s'interroger sur l'opportunité de la décision de la CAA de Versailles. La gravité de la décision ne semble pas être avérée, ainsi que l'importance des conséquences futures. Pour justifier sa décision, la Cour s'appuie exclusivement sur des certificats médicaux et sur l'objectif de l'école maternelle concernant l'éveil des personnalités des enfants. [...]
[...] Cette idée est à rapprocher notamment de la jurisprudence actuelle concernant les actes de gouvernement, eux aussi insusceptibles en principe d'être connus des juridictions administratives. Le conseil d'Etat va s'estimer de plus en plus régulièrement être compétent pour connaître de ses actes, en utilisant l'artifice des actes détachables Si le recours est recevable, il faut désormais se demander s'il est fondé, et dès lors s'interroger sur la possibilité des requérants de se prévaloir des textes invoqués. I. L'INVOCABILITE DE LA CONSTITUTION ET DES NORMES INTERNATIONALES Le premier texte invoqué par les requérants est une réponse ministérielle, qui n'a pas force normative. [...]
[...] Commentaire de l'arrêt de la 1ere chambre de la Cour Administrative d'Appel de Versailles du 17 février 2005 03VE02976, inédit au recueil Lebon Symbole du droit administratif français, la possibilité d'un recours pour excès de pouvoir semble toujours plus s'élargir. Il a été défini notamment par le vice président du Conseil d'Etat Lafférierre, dans le cadre de ce qu'il appelle le contentieux de l'annulation. Ce fleuron du droit administratif permet au juge d'annuler une décision administrative entachée d'illégalité. C'est une arme redoutable en ce qu'il permet l'annulation de l'acte dès son entrée en vigueur : par une fiction juridique, il n'a jamais existé. [...]
[...] Les recours contre de tels actes sont en principe irrecevables, c'est à dire que les juridictions administratives ne sauraient connaître contre elles de tels recours pour excès de pouvoir. Cependant ce principe n'est pas absolu. En l'espèce en effet, il s'agissait d'une norme prise par une directrice d'école, dans le cadre de la répartition des enfants dans les différentes classes. Une telle décision pourrait alors être qualifiée de mesure d'ordre intérieur : il s'agit bien d'un acte administratif individuel pris dans l'exercice des conduites des relations quotidiennes entre une école maternelle et ses usagers. [...]
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