Le juge administratif auquel incombe le devoir de lutter contre la « précarité juridique » se retrouve face à deux principes fondamentaux paraissant difficilement conciliables, il s'agit du principe de la légalité et celui de la sécurité juridique. La difficulté principale réside sans doute dans la suppression des actes administratifs unilatéraux dès lors que cette catégorie d'acte ne se caractérise non pas quantitativement mais qualitativement. En effet, un acte est individuel même s'il concerne un grand nombre d'individus et il est dès lors difficile de concilier les intérêts des différents partis. C'est ce qu'il ressort de l'arrêt du Conseil d'état du 6 novembre 2002, Mme Soulier.
En l'espèce, La commune de Castries ayant attribuée par arrêté du 25 août 1992 une bonification indiciaire à Mme Soulier alors que celle-ci, placée en congé de longue durée n'y avait pas droit. En juin 1993, le maire de la commune retire l'acte émis un an auparavant. La Cour d'appel administrative de Marseille dans un arrêt du 2 mai 2000 refuse d'annuler l'arrêté du 7 juin 1993, c'est cet arrêt qui est porté devant le Conseil d'état par Mme Soulier qui souhaite voir annuler sans renvoi l'arrêt du 2 mai 2000 en raison du non respect, par le maire de la commune, du délai imposé en matière de retrait. La requérante souhaite parallèlement obtenir de la commune de Castries la somme de 15 000Francs au titre des frais exposés. Dès lors, il se pose la question de savoir si le retrait du bénéfice, illégalement accordé, de la nouvelle bonification indiciaire à un agent, peut lui-même être déclaré illégal.
Le Conseil d'état dans l'arrêt Soulier, répond à cette question en dégageant d'une part, l'importance de la distinction entre actes administratifs créateurs de droit et ceux non créateurs de droit tout en définissant clairement la catégorie d'appartenance des actes à caractère pécuniaire (I) et d'autre part, en rappelant les conditions de mise en œuvre des procédés de suppression des actes administratifs unilatéraux selon qu'ils soient créateurs ou non de droit et entachés ou non d'irrégularité (II).
[...] Toutefois, ces deux modes de suppressions n'ont pas les mêmes effets et n'exigent pas les mêmes conditions à leur application. A. L'impossibilité de retrait de l'arrêté du 25 aout Fondement et limites du retrait des décisions créatrices de droit. Afin d'assurer le respect du principe de la légalité, un acte ayant été retiré n'est censé n'avoir jamais produit d'effet, il est donc rétroactif et remet en cause la stabilité juridique. En l'état actuel, le régime diffère principalement entre les décisions créatrices de droits et celles qui n'ont pas cet effet, d'où l'importance de cette distinction. [...]
[...] Cette mise en œuvre est toujours possible et est obligatoire lorsque l'acte est illégal dès son élaboration ou à la suite de changements de circonstances de droit ou de fait. Son régime diffère cependant selon que l'acte revêt ou non un caractère réglementaire. L'abrogation des règlements est libre à tout moment pour tout motif. Elle est obligatoire lorsqu'un administré en fait la demande en raison d'un règlement illégal, que l'illégalité existe depuis l'élaboration de l'acte ou qu'elle résulte d'un changement de circonstances. Posé en premier par l'arrêt Despujol (CE. sect., 1930), le principe a prit forme définitive avec l'arrêt Compagnie Alitalia (CE. [...]
[...] De plus, la demande peut être présentée à tout moment, sans condition de délai. Le refus implicite ou explicite d'abroger est quant à lui, susceptible de faire l'objet d'une annulation contentieuse. L'abrogation d'un acte individuel est possible dans les limites prévues par les textes, elle est obligatoire à la demande de toute personne intéressée, en cas de changements de circonstances de fait et de droit (CE Association les verts). Par ailleurs, l'abrogation est également possible lorsque, comme dans l'arrêt Soulier, l'acte est illégal dès son origine L'abrogation, solution implicite retenue par le Conseil d'État. [...]
[...] Le Conseil d'État dans l'arrêt Soulier, répond à cette question en dégageant d'une part, l'importance de la distinction entre actes administratifs créateurs de droit et ceux non créateurs de droit tout en définissant clairement la catégorie d'appartenance des actes à caractère pécuniaire et d'autre part, en rappelant les conditions de mise en œuvre des procédés de suppression des actes administratifs unilatéraux selon qu'ils soient créateurs ou non de droit et entachés ou non d'irrégularité (II). I. La distinction des actes administratifs unilatéraux Afin de mieux comprendre l'intérêt de cet arrêt, il est nécessaire de procéder à une distinction importante quant au régime juridique de ces actes en fonction des droits qu'ils créent ou non au profit des administrés. Toutefois, une telle distinction est parfois délicate à effectuer, tel a été le cas des actes à caractère pécuniaires jusqu'à un arrêt du Conseil d'État Sect novembre 2002, Mme Soulier). A. [...]
[...] Par l'arrêt du 6 novembre 2002, le Conseil d'État revient sur la jurisprudence antérieure en affirmant qu'une décision accordant un avantage financier crée des droits au profit de son bénéficiaire alors même que l'administration avait l'obligation de refuser cet avantage et met ainsi fin à la distinction opérée en fonction de la compétence de l'administration lors de l'élaboration de l'acte en question. Dès lors que les décisions d'ordre pécuniaires sont toutes considérées comme telles, leur régime juridique est plus aisément envisageable. Cependant, si le Conseil d'État admet qu'un tel acte soit créateur de droit alors même qu'il n'avait pas lieux d'exister, les décisions pécuniaires obtenues par fraude sont quant à elles, exclues de cette catégorie. II. La suppression des actes administratifs L'administration ayant compétence pour élaborer des actes juridiques, il est nécessaire que celle-ci puisse également les supprimer à certaines conditions. [...]
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