La voie normale de l'appel ne passant plus par le seul Conseil d'Etat, ce dernier continue au moins à en définir les principes comme à en superviser l'exercice.
L'arrêt « Office public d'habitations à loyer modéré de la ville de Caen » rendu le 11 juin 1999 par la section du contentieux du Conseil d'Etat, s'inscrit dans le cadre juridique du régime de l'appel principal, qui implique, outre la présence effective de l'appelant en première instance et un intérêt à agir en appel, que la requête obéisse à certaines formes.
A l'origine du litige, un différend opposait l'OPHLM de Caen à des constructeurs immobiliers à propos d'un vice de construction.
L'OPHLM saisit le tribunal administratif de Caen, mais les juges de première instance ne font pas droit à ses demandes. En appel, les juges du fond rejettent à nouveau les requêtes comme irrecevables, au motif que la requérante s'était limitée à joindre les demandes en première instance aux requêtes d'appel, sans présenter à la Cour de nouveaux moyens. Sur pourvoi, le Conseil d'Etat adhère au raisonnement de la Cour administrative d'appel.
Les Hauts magistrats doivent donc s'interroger sur la question suivante: les juges du fond ont-ils jugé, à bon droit, que les requêtes d'appel étaient irrecevables, au motif que la requérante s'était bornée à se référer aux moyens soulevés en première instance ? Ainsi, une telle question de procédure suscite-t-elle un intérêt majeur, puisque grâce à son dispositif, le Conseil d'Etat clarifie une jurisprudence quelque peu fluctuante quant au problème de la motivation de la requête d'appel.
En effet, les hauts magistrats tranchent définitivement la question, en admettant que la motivation de l'appel ne doit pas se faire par référence au mémoire de première instance (I) ; mais nous verrons que si cette règle a apporté une uniformisation jurisprudentielle nécessaire, sa portée a été perçue comme quelque peu restrictive (II).
[...] Par ailleurs, cette obligation de fournir une nouvelle argumentation en appel signifie qu'elle ne peut être contournée en permettant un simple décalque du mémoire de première instance. Ainsi, le requérant doit indiquer en quoi les premiers juges ont commis une erreur en répondant à ses moyens. Aussi, plusieurs arrêts ultérieurs ont été rendus dans la lignée de la décision OPHLM de la ville de Caen puisque dans une décision Société Les techniques de communication rendue le 27 juin 2005, le Conseil d'Etat énonce qu'une requête d'appel qui se borne à reproduire intégralement et exclusivement le texte du mémoire de première instance, ne satisfait pas aux prescriptions de l'article R 87 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel. [...]
[...] Cette décision apporte une rationalisation nécessaire du contentieux. Cependant, elle paraît, à certains points de vue, critiquable. C . Mais dont la portée doit être limitée La décision OPHLM de la ville de Caen met en évidence une portée assez restrictive, d'autant plus que la cour administrative d'appel commençait à en faire un grand usage dans le traitement de ses décisions. Tentait-elle d'échapper à sa tâche ? Dans tous les cas, son dispositif devait être canalisé si l'on ne voulait pas voir une affluence du contentieux en cassation dans ce domaine. [...]
[...] En effet, partant d'un arrêt Epoux Neel du 23 janvier 1970, celui-ci a pleinement admis la recevabilité des requêtes qui seraient motivées par simple référence au mémoire de première instance, dès lors que copie en était jointe. Puis, dans l'affaire Malgorn du 28 mars 1972, il convient que le renvoi aux moyens de première instance puisse être recevable, à condition que le dossier ait été parvenu avant l'expiration du délai. Quelques années plus tard, c'est vers une direction toute autre que se dirige la Haute juridiction. [...]
[...] En définitive, si une telle incertitude engendre une interprétation aussi différente de la part des cours administratives d'appel, un contentieux en cassation pourrait être tout autant évité. L'obligation de fournir une requête motivée en appel vient donc mettre un terme à des années d'incertitudes jurisprudentielles. B. L'obligation d'une nouvelle motivation en appel Le double degré de juridiction lorsqu'il existe, ne doit pas être conçu par les justiciables comme une loterie qui offrirait une double chance avec le même bulletin Tel a été le point culminant de l'argumentation de Catherine BERGEAL, commissaire du gouvernement. [...]
[...] L'abandon de la motivation du recours d'appel par référence au mémoire de première instance La position du Conseil d'Etat sur la question de la motivation de la requête d'appel n'était pas fixée Aussi, décide t-il que la requête d'appel doit désormais être motivée A. Une jurisprudence fluctuante quant à la motivation de la requête d'appel L'appel est une voie de recours ouverte contre les jugements rendus en premier ressort, et qui a vocation à permettre la réformation ou le contrôle de la régularité des jugements. [...]
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