Dans un avis rendu le 6 mars 1986 (n° 339710, EDCE 1987, n° 38, p. 178), l'assemblée générale de la section travaux publics du Conseil d'État a précisé la place qu'occupe l'arbitrage dans la procédure administrative contentieuse.
En l'espèce, l'État, la région Ile-de-France, le département du Val-de-Marne et l'établissement public d'aménagement de la ville nouvelle de Marne-la-Vallée souhaitaient conclure un contrat avec la société Walt Disney Productions, afin de régler l'aménagement d'un parc de loisirs (Eurodisney).
La société Walt Disney Productions, société commerciale américaine, voulait faire figurer dans ce contrat une clause compromissoire. L'arbitrage étant en principe prohibé en matière administrative, le ministre compétent a alors saisi pour avis le Conseil d'État, pour que ce dernier exprime sa position sur le sujet.
Eu égard à la multiplicité des acteurs, les problèmes de droits soulevés étaient multiples. Le Conseil d'État devait ainsi étudier le régime applicable en matière d'arbitrage à l'État, aux collectivités territoriales et aux établissements publics à caractère industriel et commercial. Il devait également se prononcer sur le droit applicable à la société Walt Disney Productions.
Cependant, de cet arsenal de problèmes émergeait une seule et même question, d'ordre général. Quel est le champ d'application du principe de la prohibition de l'arbitrage en matière de contentieux administratif ? Est-il large ? Souffre-t-il des exceptions ?
Le Conseil d'État va livrer une réponse claire au ministre. Il donne ainsi une interprétation stricte du principe d'interdiction de l'arbitrage (I). Il n'admet en contrepartie que des dérogations restreintes à ce principe (II). Bien que court et clair, cet avis de la section des travaux publics est néanmoins très riche.
[...] Sans être complet, l'article L. 311-6 du CJA énumère les principaux cas où la loi a pu autoriser le recours à l'arbitrage. Le Code dispose ainsi : Par dérogation aux dispositions du présent code déterminant la compétence des juridictions de premier ressort, il est possible de recourir à l'arbitrage dans les cas prévus par : 1º L'article 69 de la loi du 17 avril 1906 portant fixation du budget général des dépenses et des recettes de l'exercice 1906, repris à l'article 132 du nouveau code des marchés publics ; 2º L'article 7 de la loi nº 75-596 du 9 juillet 1975 portant dispositions diverses relatives à la réforme de la procédure civile ; 3º L'article L. [...]
[...] Cette dérogation accordée par le Conseil d'État est cependant bien maigre en vérité, pour au moins deux raisons. D'une part, dans le cadre de relations contractuelles, il est difficile de voir en quoi le simple avis d'une instance ou d'un expert serait de nature à éteindre un conflit qui a pu justifier son intervention. Car ou les cocontractants règlent leur différent seuls, et cette mesure est inutile ; ou bien ils ne le peuvent, et c'est alors que le désaccord est tel qu'il nécessite un organisme doté de l'autorité de la chose jugée. [...]
[...] Selon la formule du Professeur Laferrière : L'État ne [saurait être] jugé que par des juridictions instituées par la loi. Suivant un raisonnement plus juridique cependant, le Conseil d'État considère dans cet avis que le principe d'interdiction de l'arbitrage aux personnes morales de droit public résulte d'un principe général du droit plus large, dont l'article 2060 ne fait en quelque sorte que s'inspirer. Il précise ainsi le fondement du principe de prohibition du compromis en matière administrative. Ce principe général, c'est celui du caractère d'ordre public que revêtent les règles de compétence. [...]
[...] Pour le juge administratif, l'honneur est sauf. Barthélemy Mercadal et Patrice Macqueron, Le droit des affaires en France Éditions Francis Lefebvre, pp.391-393. CE février 1823, Héritiers Hébrard, Rec ; CE Sect janvier 1987, Debachy, Rec Le Code de justice administrative (CJA) renvoie lui-même parfois directement aux dispositions du Nouveau code de procédure civile. C'est par exemple le cas pour le régime des délais de distance (article R. 421-7 CJA). Pierre-Laurent Frier, Précis de droit administratif, 2ème édition, Montchrestien p Dominique Turpin, Contentieux administratif, 3ème édition, Hachette supérieur p.12. [...]
[...] La juridiction administrative suprême rappel dans cet arrêt que seul le législateur peut donner compétence aux Cour administratives d'appel pour connaître de décisions qui ne sont pas rendues par un tribunal administratif (article L. 321-1 du Code de justice administrative). Or, si la décision arbitrale revêt l'autorité de la chose jugée en premier ressort, elle ne constitue en aucun cas un jugement de tribunal administratif. La décision du Conseil d'État semble donc tout à fait cohérente sur ce point. Or, s'agissant de la dérogation conventionnelle accordée par le Conseil d'État, celle-ci nie tout aspect de jugement. L'avis donné n'est qu'un avis. [...]
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