utilité publique, intérêt général, expropriation, expropriation pour cause d'utilité publique, recours pour excès de pouvoir, excès de pouvoir, vice de procédure, acquisition foncière, théorie du bilan, interprétation in abstracto, arrêt Ville Nouvelle-Est, arrêt du 28 mai 1971, contrôle de légalité, légalité administrative
En l'espèce, le ministre de l'Équipement et du Logement a pris un arrêté le 3 avril 1968, déclarant d'utilité publique l'opération visant à acquérir des terrains afin de construire un ensemble d'habitations et d'installations. Cette opération impliquait l'expropriation et la démolition d'une centaine d'habitations. Une association a alors contesté l'arrêté de déclaration d'utilité publique en formant un recours en excès de pouvoir.
Par un jugement du 30 juillet 1969, le tribunal administratif de Lille annule pour excès de pouvoir l'arrêté du ministre. Le ministre forme un recours devant le Conseil d'État afin de faire annuler le jugement.
Pour annuler l'arrêté, le tribunal administratif se fondait sur l'absence de certains documents dans le dossier d'enquête. Il retenait donc un vice de procédure.
L'association contestait quant à elle la compétence du ministre ayant pris l'arrêté. Elle soutenait par ailleurs qu'en raison de l'importance de l'opération, une commission d'enquête aurait dû être désignée à la place du commissaire. Également, elle soutenait que les coûts des acquisitions foncières du dossier d'enquête étaient inexacts. Enfin, elle conteste l'utilité publique de l'opération et soutient que l'acte est entaché de détournement de pouvoir de la part du ministre.
[...] Cela parait paradoxal, car c'est une notion essentielle. Elle peut être parfois rattachée à l'intérêt général, à la nécessité publique ou parfois même à la présence d'un service public. Cette absence de consistance rend la définition malléable et cela peut constituer un réel problème d'insécurité juridique. Le seul cas où le juge pouvait, avant le présent arrêt, déclarer que l'opération n'était pas d'utilité publique, c'était en cas de détournement de pouvoir. Les chances de voir un recours aboutir étaient donc minces. [...]
[...] Par ailleurs le juge parle d'atteintes et inconvénients « excessifs » qui remettraient en cause la notion d'utilité publique, notamment en parlant d'atteinte au droit de propriété. Or, l'expropriation est en soi une privation totale du droit de propriété. Il est ainsi difficile d'apprécier le caractère excessif, puisque la nature même du droit d'exproprier suppose la privation d'un droit. Il faut également souligner que le juge dans le considérant précise que les inconvénients et leur caractère excessif sont appréciés au regard de l'intérêt que présente l'opération. [...]
[...] Contrairement à ce que qui aurait pu être attendu au regard de la jurisprudence passée, le juge ne s'est pas contenté ici d'examiner le projet de construction dans son ensemble de manière abstraite. Nul doute que le caractère d'utilité publique aurait été reconnu étant donné que le projet comprenait la construction de bâtiments universitaires. Le juge a néanmoins souhaité ici comparer les inconvénients, à savoir la destruction d'une centaine de maisons, avec les avantages du projet. Ceci est innovant et particulièrement appréciable. Le juge, dans son considérant de principe, expose les éléments à prendre en compte pour déterminer si l'opération projetée relève ou non de l'utilité publique. [...]
[...] Il en va de même pour le cout : les opérations coutent généralement très cher, car ce sont de gros projets. Il est difficile d'évaluer à quel moment le coût devient excessif, sauf en cas d'erreur d'appréciation manifeste d'une personne publique qui s'engagerait dans un projet alors qu'elle n'en avait absolument pas les moyens. Ainsi, si l'arrêt a le mérite de consacrer la théorie du bilan, on voit que, dans sa forme brute, elle pourrait ne pas être aussi efficace que souhaité. [...]
[...] Enfin, elle conteste l'utilité publique de l'opération et soutient que l'acte est entaché de détournement de pouvoir de la part du ministre. La haute juridiction administrative annule le jugement et rejette la demande de l'association. La haute juridiction accueille ainsi la demande du ministre requérant et affirme que l'arrêté est bien légal. Il est intéressant de remarquer que le juge détaille particulièrement son contrôle de l'utilité publique du projet dans son considérant de principe pour déterminer la légalité de l'acte. Afin de contrôler la légalité d'un arrêté de déclaration d'utilité publique, le juge doit-il mesurer l'ampleur des conséquences du projet ? [...]
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