Par une décision du 8 février 1999 (CE, 8 février 1999, Fédération des associations de protection de l'environnement et de la nature des Côtes d'Armor, Rec. 20 ; JCP 1999 n° 22, IV n° 2006 p. 1060, note Rouault), les deuxième et sixième sous-sections réunies du Conseil d'État ont eu à connaitre de l'intérêt à agir des associations de protection de l'environnement.
La Fédération des associations de protection de l'environnement et de la nature des Côtes d'Armor (FAPENCA) demandait en effet au Conseil d'État juge de cassation d'annuler l'arrêt du 23 novembre 1995, par lequel la Cour administrative d'appel de Nantes avait annulé le jugement du 24 mai 1995 du Tribunal administratif de Rennes. La juridiction de premier ressort avait ainsi ordonné qu'il soit sursis à l'exécution de l'arrêté du 16 décembre 1997 par lequel le maire de la commune de Binic avait délivré un permis de construire à la Société civile immobilière du Corps de Garde. Ce permis autorisait la rénovation et la reconstruction d'un bâtiment situé à proximité immédiate du littoral, au sein d'une zone non urbanisée. La FAPENCA ayant notamment pour but de préserver et d'améliorer la qualité du littoral, elle souhaitait donc que soit annulé ce permis de construire et, dans l'attente d'un jugement au fond, qu'il soit sursis à son exécution.
Le problème juridique formant l'objet du litige était donc celui de la légalité du permis de construire. En l'espèce, le Conseil d'État juge d'abord que le préjudice dont se prévaut la fédération et qui résulte pour elle de l'exécution de l'arrêté justifie qu'il soit sursis à l'exécution de l'arrêté. Ensuite, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article ND 1-II du règlement du plan d'occupation des sols de la commune, qui fixe la surface maximale d'extension des habitations existantes, paraît de nature, pour le juge administratif, à justifier son annulation.
Cependant, la véritable question de droit que pose cette affaire est celle de la recevabilité de la requête de la FAPENCA. Plus précisément, la fédération pouvait-elle justifier un intérêt lui donnant qualité à agir ?
Si cet arrêt ne bouleverse aucunement l'état du droit, il donne cependant une illustration intéressante de la complexité du régime qui gouverne l'intérêt à agir auprès des juridictions administratives, notamment s'agissant des groupements.
[...] Sur le fondement de cette jurisprudence et relevant qu'aux termes de l'article 2 de ses statuts, la FAPENCA a notamment pour objet de susciter ou de participer à toutes actions ou interventions visant à préserver ou à améliorer la qualité du milieu naturel et de l'environnement en général la Cour administrative d'appel de Nantes avait donc jugé que la fédération requérante n'avait, eu égard à son objet statutaire, pas intérêt à agir en l'espèce. Le Conseil d'État casse une nouvelle fois cette décision au regard des dispositions législatives applicables aux associations de protection de l'environnement. En effet, l'aliéna 2 de l'article L. 252-4 du Code rural dispose que : Toute association agréée au titre de l'article L. [...]
[...] C'est en s'appuyant sur cette jurisprudence que la Cour administrative d'appel de Nantes a pu considérer que l'agrément accordé sur le fondement de l'article L. 160-1 du Code de l'urbanisme en 1981 par le préfet des Côtes d'Armor à la FAPENCA était sans incidence sur la recevabilité de sa requête. Pourtant, le Conseil d'État juge qu'en statuant ainsi, la Cour n'a pas justifié légalement sa décision. La Cour administrative d'appel de Nantes n'a en effet pas pris en compte les dispositions législatives spéciales qui régissent l'agrément de certaines associations environnementales. [...]
[...] Ainsi, selon les termes du commissaire du gouvernement Théry, il faut ouvrir aux administrés autant qu'il est possible l'accès au prétoire [ . ] sans méconnaître pour autant la hiérarchie naturelle des intérêts lésés, sans permettre en conséquence à des administrés qui ne seraient touchés que d'une façon très secondaire et très indirecte, de remettre rétroactivement en cause des situations acceptées par ceux qui étaient directement visés (conclusions sur CE Sect mai 1971, Damazio, Rec. 391). Le requérant doit donc invoquer un intérêt lésé, lequel ne doit être ni trop indirect, ni trop incertain (CE octobre 1978, Association du quartier La corvée La roche aux fées ; DA 1978, 321). [...]
[...] Le Conseil d'État lui donne tort en raison du régime législatif spécial gouvernant l'intérêt donnant qualité à agir des associations agréées de protection de l'environnement Il se saisit par ailleurs du fond du litige et juge recevable la requête de la fédération (II). Si cet arrêt ne bouleverse aucunement l'état du droit, il donne cependant une illustration intéressante de la complexité du régime qui gouverne l'intérêt à agir auprès des juridictions administratives, notamment s'agissant des groupements. I Le régime de l'intérêt à agir des associations de protection de l'environnement Le régime de l'intérêt donnant qualité à agir des associations agréées de protection de l'environnement repose sur les deux éléments qui caractèrisent ces associations : l'agrément dont elles peuvent bénéficier et l'objet statutaire qu'elles se donnent Dans un cas comme dans l'autre, la loi a ainsi entendu faciliter la formation d'un intérêt donnant qualité à agir devant les juridictions administratives. [...]
[...] 252-4 du même code dispose en deuxième lieu que : toute association ayant pour objet la protection de la nature et de l'environnement peut engager des instances devant les juridictions administratives pour tout grief se rapportant à celle-ci. De part ces dispositions législatives spéciales, les associations agréées en vertu des articles L. 252-1 et suivants du Code rural c'est-à-dire les associations de protection de l'environnement peuvent faire valoir une qualité à agir du fait de leur agrément. Ceci à condition cependant que l'intérêt invoqué soit pertinent au regard de l'objet statutaire de l'association en cause. B. [...]
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