Cet arrêt du Conseil d'Etat du 15 octobre 2004, Commune de la Rochette, a ici pour intérêt d'illustrer la manière dont le juge administratif fait usage de l'obligation de compatibilité entre les différents documents d'urbanisme. L'appréciation de cette obligation va se situer dans une continuité jurisprudentielle, ayant tendance à interpréter de façon « laxiste » cette notion d'obligation de compatibilité entre documents d'urbanisme, ici appliquée entre le schéma directeur de la région parisienne et un plan d'occupation des sols.
Pour en venir au faits, la commune de la Rochette, de par la révision de son plan d'occupation des sols (POS) approuvé par décret le 13 décembre 1994, décide de classer en zone INA une zone comprenant une partie du bois de Campouais. Cette zone au regard du schéma directeur de la région parisienne (SDRIF) constituait un espace boisé tendant à être préservé de l'urbanisation. Le 17 avril 1997, une autorisation de défrichement concernant cette zone INA est délivrée par le préfet. Par suite, un permis de construire vingt maisons individuelles est accordé par arrêté le 17 octobre 1997 à la société Gill Promotion.
Dès lors, l'association seine-et-marnaise pour la sauvegarde pour la sauvegarde de la nature saisi le tribunal administratif (TA) de Melun en demande d'annulation du permis de construire. Le TA de Melun fait droit à la prétention de l'association et annule ainsi l'arrêté du maire de la Rochette à la date du 2 juillet 1998. La commune de la Rochette interjette appel devant la cour administrative d'appel (CAA) de Paris et demande d'annulation du jugement du TA de Melun. La CAA de Paris confirme le jugement du TA de Melun le 21 septembre 2000, ce qui amène la commune de la Rochette à former un pourvoi en cassation devant le Conseil d'Etat en demande d'annulation des deux jugements antérieurs.
Dans cette affaire, le juge se voit tout d'abord confronté au problème de compatibilité entre documents d'urbanisme, en l'espèce entre le SDRIF et le POS de la commune de la Rochette. En effet, le TA de Melun et la CAA de Paris ont tous les deux annulé le permis de construire au motif que les règlements du POS, en vertu duquel le permis de construire a été accordé, étaient incompatibles avec les prescriptions du SDRIF. Le juge de cassation doit ici apprécier si le POS doit respecter une stricte compatibilité avec le SDRIF. Ainsi, soit le POS doit être strictement compatible aux prescriptions du SDRIF et alors le POS sera jugé incompatible avec le SDRIF si les règlements du POS s'écartent des dispositions du SDRIF. Ou bien la notion de compatibilité entre les documents peut être appréciée de façon plus large et ainsi écarter le POS de l'incompatibilité avec le SDRIF. Le second problème que doit résoudre le juge sera de déterminer si, par la voie de l'exception, d'autres documents d'urbanisme peuvent s'opposer soit au POS ou bien encore au permis de construire pour en apprécier leur compatibilité. En l'espèce, l'arrêt précise l'existence d'un schéma directeur (SD) de la région melunaise. Le juge pourrait donc apprécier la compatibilité du POS par rapport au SD, appliquant ainsi le principe de compatibilité limitée qui consiste à apprécier la compatibilité d'un document d'urbanisme avec la norme immédiatement supérieure. Ainsi, soit le juge prend en compte l'existence du SD et le considère incompatible avec le POS, alors le permis de construire ne sera dès lors pas légal. Ou bien le juge considère que le SD n'est pas opposable au POS, et donc n'affectera pas le permis de construire.
Dans ses solutions, le juge considère tout d'abord que les dispositions du SDRIF « ne sauraient avoir légalement pour effet d'imposer une stricte conformité des plans d'occupations des sols à leur égard ». Ainsi le POS n'est pas jugé incompatible avec le SDRIF pour divers raisons que nous développerons par la suite. Ensuite, sur l'opposabilité du SD, le juge décide de ne pas prendre en considération le SD de la région melunaise, et donc ne l'oppose pas au POS, ainsi qu'au permis de construire en ce fondant sur le fait que le permis de construire « n'a pas été pris en application du SD ».
D'autres problèmes de droit sont par ailleurs évoqués dans le présent arrêt, cependant ils ne semblent pas d'importance majeure dans la portée jurisprudentielle de l'arrêt.
Tout d'abord, l'association tente d'opposer, par la voie de l'exception, les illégalités dont serait porteuse une autorisation de défrichement délivrée par le préfet le 14 avril 1997 aux entrepreneurs des constructions autorisées par le permis de construire. Ecartant les différents moyens par lesquels les requérants invoque l'illégalité de l'autorisation, notamment au regard de l'article L 311-3 du code forestier, le juge estime que le préfet n'a pas commis d'erreur d'appréciation, étant donné la faible superficie à défricher. De plus le juge réaffirme un autre principe, celui le l'indépendance des législations. En effet, il n'est pas possible d'invoquer l'illégalité de l'autorisation sur des moyens tirés de son incompatibilité avec le SDRIF étant donné que ce dernier ressort du droit de l'urbanisme, et que le régime des autorisations de défrichement dépend d'une autre législation.
Un autre problème est celui de la compétence du CE à juger l'affaire. Le CE a ici pleine compétence à juger l'affaire, étant à la fois juge de cassation et juge de fond. En effet, il est juge de cassation dans le sens où le CE est saisi en dernier ressort. Il doit donc examiner l'affaire par d'autres moyens et trancher l'affaire au fond dans « l'intérêt d'une bonne administration de la justice ».
Ensuite, l'association évoque différents moyens fondés sur un vice de procédure. La commune n'aurait pas respecté les délais de procédure, ni fournis la totalité des documents, avis, et documents graphiques requis par l'article L 421-2 du code de l'urbanisme. Cependant l'association n'a pas fourni suffisamment de précisions pour apprécier le moyen des vices de procédure, et les documents graphiques répondaient aux prescriptions de l'article L 421-2. Ces moyens ne sont donc pas retenus par le juge.
Enfin, l'association soulève que le maire n'était pas compétent pour la délivrance du permis de conduire. Ce moyen est vite écarté par le juge étant donné que d'après les dispositions de l'article 421-2-1 du code de l'urbanisme « le permis de construire est délivré par le maire au nom de la commune ».
Après avoir évoqué les différents problèmes de droit soulevés par le juge et ses solutions, il convient désormais d'étudier plus en détail le raisonnement juridique qui a conduit le juge à annuler les jugements du TA de Melun et de la CAA de Paris. Ainsi, la notion d'obligation de compatibilité appliquée au POS et au SDRIF sera appréciée de façon large (I). Cette exigence de compatibilité souple sera par ailleurs renforcée par le refus par le juge de prendre en considération la possible opposabilité d'un schéma directeur régional dans l'appréciation de la compatibilité des différents documents d'urbanisme (II).
[...] La CAA de Paris confirme le jugement du TA de Melun le 21 septembre 2000, ce qui amène la commune de la Rochette à former un pourvoi en cassation devant le Conseil d'Etat en demande d'annulation des deux jugements antérieurs. Dans cette affaire, le juge se voit tout d'abord confronté au problème de compatibilité entre documents d'urbanisme, en l'espèce entre le SDRIF et le POS de la commune de la Rochette. En effet, le TA de Melun et la CAA de Paris ont tous les deux annulé le permis de construire au motif que les règlements du POS, en vertu duquel le permis de construire a été accordé, étaient incompatibles avec les prescriptions du SDRIF. [...]
[...] CE octobre 2004, Commune de la Rochette Cet arrêt du Conseil d'Etat du 15 octobre 2004, Commune de la Rochette, a ici pour intérêt d'illustrer la manière dont le juge administratif fait usage de l'obligation de compatibilité entre les différents documents d'urbanisme. L'appréciation de cette obligation va se situer dans une continuité jurisprudentielle, ayant tendance à interpréter de façon laxiste cette notion d'obligation de compatibilité entre documents d'urbanisme, ici appliquée entre le schéma directeur de la région parisienne et un plan d'occupation des sols. [...]
[...] II) Le refus par le juge de l'opposabilité d'un Schéma Directeur aux documents d'urbanisme en présence Le juge va ici écarter un schéma directeur de la région melunaise qui aurait pourtant pu constituer un élément intéressant au regard du principe de compatibilité limitée, mais que le juge mettra cependant à l'écart Le juge écartera par ailleurs la possibilité d'opposer ce SD, mais aussi le SDRIF, à la légalité du permis de construire Le Schéma Directeur écarté dans l'appréciation de compatibilité : le principe de compatibilité limitée éludé L'arrêt évoque l'existence d'un autre SD, celui de la région melunaise. L'association tente de l'invoquer par la voie de l'exception d'illégalité, qui peut permettre aux requérants d'échapper à l'application d'actes illégaux qui n'auraient pas fait l'objet de recours dans les délais légaux. En effet, l'association essaie de démontrer que le SD de la région melunaise était incompatible avec le SDRIF. En faisant cela, elle aurait pu amener le juge à considérer la règle de la compatibilité limitée. [...]
[...] Enfin, l'association soulève que le maire n'était pas compétent pour la délivrance du permis de conduire. Ce moyen est vite écarté par le juge étant donné que d'après les dispositions de l'article 421-2-1 du code de l'urbanisme le permis de construire est délivré par le maire au nom de la commune Après avoir évoqué les différents problèmes de droit soulevés par le juge et ses solutions, il convient désormais d'étudier plus en détail le raisonnement juridique qui a conduit le juge à annuler les jugements du TA de Melun et de la CAA de Paris. [...]
[...] Dans cette jurisprudence, le juge contrôle la compatibilité d'un POS avec un SD régional, celui de la région toulousaine. Le CE ne nie pas la nécessité de la compatibilité entre les deux documents d'urbanisme, mais il en fait une application plus laxiste, sous-entendant que le POS doit avoir une compatibilité simple avec les SD régionaux, tant qu'ils ne diffèrent pas de manière excessive des orientations de ces derniers. Pour appliquer cette compatibilité souple, le juge fait un contrôle de proportionnalité de la zone litigieuse par rapport à la superficie totale du territoire de la commune situé dans la coupure verte La proportion étant très faible le juge conclut qu'il n'y a pas incompatibilité entre les dispositions du SD et le POS. [...]
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