Si la détermination de la nature d'un contrat est peut-être l'une des démarches les plus juridiques que l'on puisse trouver, elle n'en est pas moins la plus aisée.
Une délibération du conseil municipal de la commune de Lambesc en date du 29 mars 1994 avait attribué à la société Silim Environnement un contrat relatif à la collecte et au transport des ordures ménagères et à la gestion de la décharge communale. Le contrat avait alors été conclu entre la commune et la société.
Après que ces deux actes aient fait l'objet d'un recours gracieux présenté par le sous-préfet, le préfet a déféré l'acte devant le tribunal administratif. Le Conseil d'Etat, saisi en appel, a dû, dans l'arrêt du 15 avril 1996, Préfet des Bouches-du-Rhône c/ Commune de Lambesc, se prononcer sur la recevabilité du recours devant les premiers juges ainsi que sur la nature du contrat litigieux.
Si la solution dégagée par le juge s'agissant du premier point est sans grande importance puisqu'elle applique la jurisprudence classique en matière de délais de recours, la réponse apportée au second point est nettement plus intéressante et accaparera toute notre attention. En effet, dans un considérant de principe, le Conseil d'Etat affirme que « les dispositions de la loi du 29 janvier 1993 (…) et notamment celles de son article 38 relatif aux délégations de service public des personnes morales de droit public, n'ont pas eu pour objet et ne sauraient être interprétées comme ayant pour effet de faire échapper au respect des règles régissant les marchés publics, tout ou partie des contrats dans lesquels la rémunération du cocontractant de l'administration n'est pas substantiellement assurée par les résultats de l'exploitation ».
L'arrêt est donc particulièrement novateur en ce qu'il protège le champ d'application du Code des marchés publics d'un éventuel rétrécissement suite à la loi dite « loi Sapin » du 29 janvier 1993 (I) et en ce qu'il précise l'élément de distinction entre les délégations de service public d'un coté et les marchés publics de l'autre (II).
[...] I Le champ d'application du Code des marchés publics L'arrivée de la loi Sapin dans le corpus juridique français en 1993 a engendré de grands débats doctrinaux sur la question de savoir si son champ d'application empiétait sur celui du Code des marchés publics L'arrêt Préfet des Bouches-du-Rhône de 1996 est venu apporter une solution quant à la coexistence de ces deux textes Les bouleversements engendrés par la loi Sapin La loi du 29 janvier 1993, relative à la prévention de la corruption et à la transparence de la vie économique et des procédures publiques, prévoit de soumettre les conventions de délégation de service public à un régime de mise en concurrence. Avant son entrée en vigueur, le Code des marchés publics exigeait déjà le respect de certaines règles à l'occasion de la conclusion de certains contrats de délégation de service public. Cependant, ces deux textes semblaient ne pouvoir s'appliquer simultanément aux mêmes actes puisqu'ils étaient, par certaines dispositions, contraires. [...]
[...] Mais, d'autre part, la notion de rémunération reste également ambiguë : ne pourrait-on pas considérer en effet qu'un prix versé en fonction des résultats d'exploitation peut correspondre à l'exigence posée par le Conseil d'Etat pour soumettre l'acte à la loi Sapin ? On est porté à croire que non puisque le juge demande que la rémunération soit assurée et non déterminée par les résultats d'exploitation. [...]
[...] On parlait ainsi du principe de l'intuitus personae. Les deux régimes étant ainsi incompatible, il fallait donc en déduire que les notions de délégation de service public et de marché public étaient deux notions bien distinctes. La question s'est alors posée de savoir s'il ne convenait pas, suite à la loi Sapin, de se fonder sur le critère de l'objet du contrat pour distinguer la délégation de service public du marché public : tout contrat dont l'objet est de confier au cocontractant l'exécution-même du service public serait une délégation de service public et non un marché public. [...]
[...] Une délibération du conseil municipal de la commune de Lambesc en date du 29 mars 1994 avait attribué à la société Silim Environnement un contrat relatif à la collecte et au transport des ordures ménagères et à la gestion de la décharge communale. Le contrat avait alors été conclu entre la commune et la société. Après que ces deux actes aient fait l'objet d'un recours gracieux présenté par le sous-préfet, le préfet a déféré l'acte devant le tribunal administratif. Le Conseil d'Etat, saisi en appel, a dû, dans l'arrêt du 15 avril 1996, Préfet des Bouches-du-Rhône Commune de Lambesc, se prononcer sur la recevabilité du recours devant les premiers juges ainsi que sur la nature du contrat litigieux. [...]
[...] Le présent arrêt montre que tel n'est pas le cas puisque le Conseil d'Etat précise que les contrats dans lesquels la rémunération du cocontractant de l'administration n'est pas substantiellement assurée par les résultats de l'exploitation restent soumis au Code des marchés publics. En l'espèce, le contrat conclu avec la société prévoyait que cette dernière serait rémunérée au moyen d'un prix payé par la commune Il en résultait donc que le contrat était soumis aux dispositions du Code des marchés publics et que, ne les ayant pas respectées, il était entaché d'irrégularité. Ce critère n'est pas dépourvu de cohérence. [...]
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