De Minimis Non Curat Praetor. Par ce vieil adage latin qui signifie que le chef ne s'occupe pas des plus petits détails, le Conseil d'État et le tribunal administratif sont, pendant longtemps, restés en dehors des mesures d'ordre intérieur et de leurs recours en appel. Or, dans deux décisions rendues le 17 février 1995, le Conseil d'État opéra un revirement de jurisprudence en acceptant de connaître des mesures disciplinaires, prises à l'encontre d'un détenu et d'un militaire.
Le 8 novembre 1995, vers minuit quarante-cinq, le maître timonier Hardouin rejoignit son unité en état d'ébriété et refusa de se soumettre à une épreuve d'alcootest. En conséquence, il fut puni pour ce motif de 10 jours d'arrêt. Dans le cas de M. Marie, qui est un détenu de la prison de Fleury-Mérogis, celui-ci écrivit au chef du service de l'inspection générale des affaires sociales, pour se plaindre du fonctionnement du service médical de l'établissement. Pour ce motif, il se vit infliger une sanction de mise en « cellules de punition » pour une durée de huit jours avec sursis.
Les deux victimes des sanctions disciplinaires exercèrent, chacune, un recours hiérarchique qui fut rejeté. Chacune d'entre elles saisira alors respectivement les tribunaux administratifs de Rennes et de Versailles, qui, en se référant à la jurisprudence traditionnelle du Conseil d'État, déclarèrent leur requête irrecevable. Or sur l'appel des intéressés, le Conseil d'État changea la jurisprudence, estimant que les sanctions frappant Messieurs Hardouin et Marie pouvaient faire l'objet d'un recours en excès de pouvoir.
Bien que les arrêts apparaissent semblables sur la forme, le fond de l'affaire est différent puisque le conseil d'État déclara que la sanction prononcée contre M. Hardouin était légale, alors qu'il annula celle prononcée contre M. Marie.
La question qui se dégage de cet arrêt est la suivante : le Conseil d'État peut-il être le juge d'un déféré d'une mesure d'ordre intérieur dans le cadre d'un recours pour excès de pouvoir ?
[...] Le conseil d'État, par ce revirement jurisprudentiel, a modifié les critères définissant les mesures d'ordre intérieur et en a réduit leur champ d'application. Ainsi, ne sera pas une mesure d'ordre intérieur, celle qui, eu égard de sa nature et de sa gravité, a des effets directs sur la liberté d'aller et venir, et des conséquences sur la situation statutaire de la personne concernée. Dans l'arrêt, il est possible de voir l'évolution de la jurisprudence. Les mesures disciplinaires ont longtemps été considérées comme des mesures d'ordre intérieur, c'est-à-dire comme des mesures à caractère non décisoire, de faible importance pratique et d'une relative minceur juridique. [...]
[...] Il y a donc des modifications importantes apportées à la notion de mesures d'ordre intérieur, nous avons évoqué le cas des prisons et des casernes, mais ce fut aussi le cas dans les établissements scolaires. Le 2 novembre 1992, le conseil d'État dans un arrêt Kherouaa (dans l'affaire des foulards islamiques revient sur la jurisprudence antérieure et fait du règlement intérieur, une décision faisant grief. Une question se pose, notamment au sujet de l'avenir de la jurisprudence Hardouin et Marie. [...]
[...] Ass février 1995 Hardouin et Marie De Minimis Non Curat Praetor. Par ce vieil adage latin qui signifie que le chef ne s'occupe pas des plus petits détails, le Conseil d'État et le tribunal administratif sont, pendant longtemps, restés en dehors des mesures d'ordre intérieur et de leurs recours en appel. Or, dans deux décisions rendues le 17 février 1995, le Conseil d'État opéra un revirement de jurisprudence en acceptant de connaître des mesures disciplinaires, prises à l'encontre d'un détenu et d'un militaire. [...]
[...] Dans l'arrêt, le Conseil d'État dit qu'elles régissent la vie intérieure des services Elles s'imposent aux agents du service. Elles doivent être respectées par les agents à travers une relation hiérarchique, elles n'ont donc pas de force obligatoire pour les administrés. Elles ne sont détenues que par l'autorité supérieure sans qu'aucun texte ne soit nécessaire. Cette solution fut consacrée par l'arrêt du Conseil d'État du 30 juin 1950 dans l'arrêt Quéralt. C'est un principe général du droit. Traditionnellement, afin de justifier la recevabilité du recours pour excès de pouvoir des décisions disciplinaires, le conseil d'État procède en deux temps. [...]
[...] Certaines limites sont donc maintenues par le Conseil d'État, limites qu'il a constamment rappelées dans ses affaires ultérieures. Au niveau militaire, le Conseil d'État a admis d'une façon générale qu'une punition disciplinaire pouvait faire l'objet de recours pour excès de pouvoir, notamment, dans une décision Monfroy du 12 juillet 1995. Au sujet des détenus, le conseil d'État se fonde sur la nature et la gravité de la mesure, pour estimer qu'elle est susceptible de recours pour excès de pouvoir. Par exemple, dans une décision Fauqueux du 28 février 1996, le conseil d'État a considéré que la mise en isolement d'un détenu n'aggrave pas les conditions de détention et n'est pas susceptible d'exercer une influence sur la situation juridique de l'intéressé, et donc, n'est pas susceptible de recours pour excès de pouvoir. [...]
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