La portée juridique de la Charte de l'environnement dépend de la possibilité de l'invoquer devant le juge administratif à l'encontre de normes de mise en œuvre qui lui seraient contraires y compris les normes antérieures à la Charte.
En principe, le juge administratif n'a pas le contrôle de constitutionnalité des lois. Or, par cet arrêt, il s'arroge un certain contrôle constitutionnel.
Le 7 février 2005, Le Ministre de l'écologie et du développement durable a adopté un arrêté fixant les règles techniques auxquelles doivent satisfaire les élevages soumis à autorisation.
L'Association "Eau et rivières de Bretagne" a saisi le Conseil d'Etat d'une requête aux fins d'annulation de l'arrêté ministériel du 7 février 2005 fixant les règles relatives à certains élevages soumis à autorisation (bovins, volailles, gibier à plumes et porcs) et à titre subsidiaire des articles 16 1 et 18-4° sur les règles en matières d'épandage.
[...] Ainsi, les futures saisines du Conseil constitutionnel au regard de la Charte de l'environnement permettront aussi sans doute de déterminer l'étendue de la compétence du Parlement dans ce domaine et de fixer la frontière entre ce qui relève de la loi et ce qui relève du règlement. On peut en effet penser, comme le Professeur Karine Foucher (Université de Nantes) qui a consacré un article à cette question, que la constitutionnalisation de la charte de l'environnement aura pour effet de déplacer la ligne de partage entre la compétence du législateur et celle du pouvoir règlementaire dans un certain nombre de domaines qui étaient à l'origine de la compétence règlementaire. [...]
[...] En conséquence, le Conseil d'Etat estime que la procédure d'adoption suivie était régulière. Sur la légalité interne Lorsque des dispositions législatives ont été prises pour assurer la mise en oeuvre des principes énoncés aux articles et 6 de la Charte de l'environnement de 2004, à laquelle le Préambule de la Constitution fait référence en vertu de la loi constitutionnelle no 2005-205 du 1er mars 2005, la légalité des décisions administratives s'apprécie par rapport à ces dispositions, sous réserve, s'agissant de dispositions législatives antérieures à l'entrée en vigueur de la charte de l'environnement, qu'elles ne soient pas incompatibles avec les exigences qui découlent de cette charte; qu'ainsi la légalité de l'arrêté attaqué doit être appréciée au regard des dispositions du code de l'environnement qui imposent aux installations classées des sujétions destinées notamment à la protection de l'eau. [...]
[...] Or, paradoxalement, la Constitutionnalisation de la Charte de l'environnement risquait d'entraîner un moindre contrôle du juge administratif sur des actes règlementaires non conformes à la Constitution : Le juge administratif est en effet juge de la légalité au sens strict, c'est-à-dire juge de la conformité de l'acte administratif à la norme législative, mais non en principe juge constitutionnel. L'arrêt qui nous est soumis apporte une réponse à cette question. Il constitue une des premières décisions du Conseil d'Etat sur la Charte de l'environnement de valeur constitutionnelle. Il est particulièrement intéressant puisqu'il montre la marche qu'il entend suivre pour opérer un contrôle de la légalité des actes administratifs dans ce domaine. [...]
[...] Motivation de l'arrêt Sur la légalité externe (La procédure d'adoption du texte attaqué) Le Conseil d'Etat estime que la procédure d'adoption du texte a été respectée : le ministre chargé des installations classées était compétent pour fixer par arrêté de telles mesures visant à prévenir et à réduire notamment les risques pollution après avis des organisations professionnelles intéressées. Les ministres intéressés, à savoir, le ministre de la Santé et le ministre de l'Agriculture ont été consultés sur le projet d'arrêté. Le Conseil supérieur des installations classées s'est prononcé sur le projet d'arrêté et ses réserves ont été prises en compte. [...]
[...] Il en résulte que le juge administratif ne contrôle pas la constitutionnalité d'une loi. Étant le juge du pouvoir exécutif, il ne peut, au nom de la séparation des pouvoirs, contrôler le travail du législateur. Dans l'arrêt Association Eaux et rivière de Bretagne le Conseil d'Etat rappelle ce principe en affirmant que la loi postérieure à la norme constitutionnelle fait écran entre celle-ci et un acte infra législatif. Le Conseil d'Etat affirme ainsi clairement sa position : la théorie de la loi-écran s'applique pour les lois adoptées postérieurement à une norme constitutionnelle. [...]
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