Arrêt Bizouerne, Conseil d’Etat, 1er février 2012 - La responsabilité pour faute de l’Etat

Extraits

[...] Arrêt Bizouerne, Conseil d'Etat, 1er février 2012 - La responsabilité pour faute de l'Etat En l'espèce, M. Bizouerne exerce l'activité de pisciculteur. Son exploitation a subi des dommages conséquents résultants de la prolifération de cormorans, dommage expertisé par le tribunal administratif de Dijon. Cet oiseau est protégé par plusieurs lois notamment celle du 10 juillet 1976. Celle-ci a engendré un développement conséquent de cette espèce. M Bizouerne et l'EARL L'Etang de Galetas saisissent le préfet de l'Yonne d'une demande en indemnisation des préjudices occasionnés à leur activité. [...]

[...] Il convient de définir l'aléa anormal comme excédant les aléas inhérents à l'activité. D'après la jurisprudence, l'aléa anormal constitue la charge à laquelle le requérant ne pouvait légitimement s'attendre. En l'espèce, le Conseil d'Etat reproche à l'arrêt attaqué de ne pas avoir pris en considération les aléas normaux qui peuvent découler de l'activité de M. Bizouerne et de l'EARL l'Etang de Galetas. Il ne lui reproche donc pas son appréciation des autres conditions relatives à la gravité et à la spécialité. [...]

[...] Les conditions extrêmement restrictives de la responsabilité du fait des lois se sont vues modifiées par une jurisprudence récente. B. Un assouplissement jurisprudentiel des conditions d'engagement de la responsabilité de l'État du fait des lois Il y a eu beaucoup de cas où des requérants ayant subi un préjudice et demandant réparation se voyaient refuser une indemnisation quelconque. Cela pouvait être parce que la loi en question ne prévoyait pas d'indemnisation ou parce que le préjudice subi ne revêtait pas un caractère suffisamment spécial ou grave. [...]

[...] Cet arrêt est doublement intéressant en ce qu'il nous permet d'étudier la notion de responsabilité sans fautes de l'État mais aussi de traiter l'évolution des modalités d'indemnisation de la victime (II). I/La rupture d'égalité devant les charges publiques : une responsabilité sans fautes de l'État La possibilité d'engager la responsabilité de l'État du fait des lois a d'abord été consacrée en 1938 au travers d'un arrêt primordial Pendant longtemps cette responsabilité n'était que peu engagée en pratique avant d'observer récemment une évolution de la jurisprudence administrative A. [...]

[...] Il faut noter que le Conseil d'État dans sa décision ne remet pas en cause les conditions relevées par les juges du fond. En l'espèce, M. Bizouerne et l'EARL L'Etang de Galetas ont bien subi un préjudice grave et spécial du fait de la surpopulation de cormorans et l'intérêt de l'arrêt ne concerne pas ces conditions-ci. En effet, l'intérêt réside dans l'évaluation du préjudice subi et de son indemnisation pour lesquelles les juges du fond auraient dû prendre en compte l'aléa normal inhérent à la situation des requérants. [...]