Les mesures d'ordre intérieur sont des mesures destinées à régir l'organisation et le fonctionnement interne des services, ce que Mr Maurice HAURIOU qualifiait de "vie interne des services". Ces mesures s'imposent aux agents du service et en principe, n'ont aucune force obligatoire pour les administrés ; ces derniers ne peuvent s'en prévaloir pour un recours en excès de pouvoir. Et c'est ce que vont démontrer les juges du Conseil d'Etat dans un arrêt du 09 avril 2008, dans l'affaire "ROGIER" en matière de prison, dont les faits sont les suivants :
Le 11 juin 2007, le ministre de la justice a affecté le sieur ROGIER, détenu à la maison d'arrêt de Fresnes, au centre pénitentiaire de Caen.
Le sieur ROGIER forme une requête devant le juge des référés du tribunal administratif aux fins de faire suspendre la décision exécutée le 11 juin 2007 pour illégalité du fait de l'irrespect de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
Le 19 juillet 2007, le juge des référés du tribunal administratif de Paris rend une ordonnance rejetant la demande du requérant au motif qu'une décision de changement d'affectation d'un détenu, d'une maison d'arrêt vers un établissement pour peine, aussi appelé maison centrale, est une mesure d'ordre intérieur insusceptible de recours, après avoir vérifié l'absence de mise en cause des droits et libertés fondamentaux du détenu.
Le sieur ROGIER forme alors une requête devant le Conseil d'Etat aux fins d'une part de faire annuler l'ordonnance du 19 juillet 2007 et d'autre part, statuant en référé, d'enjoindre le ministre de la justice de le réintégrer dans son établissement d'origine dans un délai de dix jours après la solution qui sera rendue, accompagnée d'une astreinte de 1000 euros par jour de retard.
Le 09 avril 2008, les juges du Conseil d'Etat, réunis en assemblée plénière, rejettent la requête formée par le sieur ROGIER.
La question qui se posait aux juges du Conseil d'Etat était de savoir si une décision relative au changement d'affectation d'un détenu d'une maison d'arrêt vers une maison centrale constituait du fait de sa nature et de l'importance de ses effets sur la situation du détenu, une mesure d'ordre intérieur n'affectant pas les droits et libertés fondamentaux du détenu (...)
[...] Ainsi, sur la question du transfert de détenu d'un établissement pénitentiaire à un autre, il a fallu attendre que le Conseil d'Etat soit réuni en assemblée le 14 décembre 2007, dans l'affaire opposant ministre de la justice Mr BOUSSOUAR”, pour qu'il soit admis pour la première fois, que ce type de décision puisse faire l'objet d'un recours pour excès de pouvoir. Le recours pour excès de pouvoir se définit comme le recours juridictionnel dirigé en vue de faire annuler pour cause d'illégalité, des actes unilatéraux émanant soit d'une autorité administrative, soit d'un organisme privé agissant dans le cadre d'une mission de service public. De cette définition, on en déduit que la décision de transfert d'un détenu d'un établissement pénitentiaire à un autre est un acte administratif unilatéral. [...]
[...] Enfin, il faut voir que de cette solution, il en ressort un recul de plus en plus important des mesures d'ordre intérieur. Le recul de plus en plus important des mesures d'ordre intérieur La reconnaissance du respect de certains droits fondamentaux des détenus pour le cas d'espèce, tend inévitablement à faire reculer les mesures d'ordre intérieur. Et les juges dans les arrêts postérieurs continueront sur la même lignée. Nous en voulons pour preuve une décision de la cour de Strasbourg “KHIDER France” en date du 09 juillet 2009, dans laquelle la cour a estimé que l'application de mesures de surveillance renforcée s'analysait comme un traitement inhumain et dégradant, méconnaissant l'article 3 de la Convention européenne des droits de l'homme qui prohibe la torture et les traitements ou peines inhumains ou dégradants. [...]
[...] Et c'est ce que vont démontrer les juges du Conseil d'Etat dans un arrêt du 09 avril 2008, dans l'affaire en matière de prison, dont les faits sont les suivants: Le 11 juin 2007, le ministre de la justice a affecté le sieur ROGIER, détenu à la maison d'arrêt de Fresnes, au centre pénitentiaire de Caen. Le sieur ROGIER forme une requête devant le juge des référés du tribunal administratif aux fins de faire suspendre la décision exécutée le 11 juin 2007 pour illégalité du fait de l'irrespect de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. [...]
[...] Mais c'est surtout au regard des arrêts rendus par la cour européenne des droits de l'homme que la solution d'espèce n'est pas sans importance: en effet, dans ses arrêts, la cour invoque, notamment pour ce qui nous concerne, l'article 3 de la convention relatif aux conditions inhumaines et dégradantes: et c'est sur ce fondement, que la cour a condamné la France pour incompatibilité avec l'article d'une mesure de maintien en détention d'un détenu dans un état de santé critique (CEDH 14 novembre 2002 “MOUISEL France”). Et c'est peut être suite à cette jurisprudence que le requérant, dans notre cas d'espèce, s'est prévalu de cet article 3 pour dénoncer son lieu de détention comme inadapté à son état de santé. Cependant, il convient de faire observer, que l'invocation de l'irrespect de ces droits et libertés ne peut en aucun cas suffire pour que la requête soit directement soumise au contrôle du juge. [...]
[...] En conclusion, la décision de transfert d''un détenu d'un établissement pénitentiaire à un autre, constitue un acte administratif unilatéral et peut donc faire l'objet d'un recours pour excès de pouvoir. Pour autant, dans notre cas d'espèce, les juges ne retiennent pas que la décision de changement d'affectation du requérant de la maison d'arrêt de Fresnes à la maison centrale de Caen, soit une décision susceptible de recours pour excès de pouvoir mais constitue une mesure d'ordre intérieur. Ainsi, il convient d‘étudier en quoi la décision d'affectation du requérant d'une maison d'arrêt vers un établissement pour peine est constitutive d'une mesure d'ordre intérieur. [...]
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