Les articles 1355, 1357 et 1358 de l'avant projet de réforme du droit des obligations concernent le domaine délicat de la responsabilité des personnes chargées de régler le mode de vie des mineurs non émancipés et des majeurs nécessitant une surveillance particulière.
Ces articles mettent en œuvre une responsabilité de plein droit des personnes chargées de régler le mode de vie ou d'organiser, contrôler et encadrer l'activité d'autrui dans leur propre intérêt, à la condition de démontrer la faute de l'auteur direct du dommage (article 1355). Ce principe est appliqué par l'article 1357 qui dispose qu' « est responsable des dommages causés par un majeur dont l'état ou la situation nécessite une surveillance particulière la personne physique ou morale chargée, par une décision judiciaire, administrative ou conventionnelle de régler son mode de vie ». Enfin, l'article 1358 pose une exception à cette règle en mettant une place une présomption de faute des personnes exerçant à titre professionnel une mission de surveillance d'autrui.
L'avant projet de réforme du droit des obligations, dirigé par le professeur Catala, a pour but l'harmonisation du droit français sur celui de ses voisins européens. Rédigé par de nombreux auteurs, cet avant projet combine les solutions du droit comparé, du droit positif et des solutions doctrinales.
Sur le plan du droit interne, la question de la responsabilité du fait d'autrui a connu de très importantes évolutions. Si les alinéas 4 et suivants de l'article 1384 du Code Civil listent des cas de responsabilité du fait d'autrui, il n'existait pas dans l'esprit des rédacteurs de principe général : la liste était limitative et non énonciative. Mais la nécessité sociale (en particulier l'évolution des méthodes éducatives) et une discordance avec la jurisprudence administrative ont poussé le juge à user de son pouvoir prétorien, comme il l'avait déjà fait concernant la responsabilité du fait des choses (Cass, 16 juin 1896, Tieffaine).
L'assemblée plénière de la Cour a ainsi en 1991 étendu le champ d'application de la responsabilité du fait d'autrui aux « associations ayant accepté la charge d'organiser et contrôler, à titre permanent, le mode de vie » d'un handicapé, sur le fondement de l'article 1384 al. 1 pourtant considéré comme une transition par les rédacteurs du Code Civil. Cette solution ne pose pas en elle-même un principe général mais a ouvert la voie à de nouveaux cas de responsabilité d'autrui : ainsi la Cour a-t-elle admis la responsabilité d'une association sportive.
L'avant projet Catala devait donc montrer sa position concernant ce point : définit-il un principe général de responsabilité du fait d'autrui, contrairement au Code civil, ou rejette-t-il catégoriquement la position du droit positif ?
[...] La présomption de faute pour les personnes professionnelles peut paraître aussi un peu étonnante, à la lecture des autres articles instituant une responsabilité sans faute : instituer une simple présomption de faute et non de responsabilité, le projet démontre une certaine indulgence vis à vis des professionnels, que l'on ne connaît de moins en moins en droit français. Cependant, du fait même de leur statut, ils seraient plus à même de protéger la victime, et il leur serait par-là même difficile pour eux de démontrer leur absence de faute. La protection des victimes est donc encore bien établie. [...]
[...] L'avant projet ne fait pas appel à cette notion de temporalité comme le fait quasiment systématiquement la Cour de Cassation pour retenir ou non la responsabilité pour autrui au sens de l'article 1384 al de Code Civil. Cette hypothèse pouvant justifié un contentieux important aurait dû être invoquée, du fait de sa spécialité, ou incluse dans un principe général qui n'est pas ici retenu. Finalement ; l'avant projet Catala souhaitait uniformiser le droit de la responsabilité pour autrui, qui est en droit positif assez touffu et complexe. [...]
[...] Commentaire des articles et 1358 de l'avant projet de réforme du droit des obligations (avant-projet CATALA Les articles et 1358 de l'avant projet de réforme du droit des obligations concernent le domaine délicat de la responsabilité des personnes chargées de régler le mode de vie des mineurs non émancipés et des majeurs nécessitant une surveillance particulière. Ces articles mettent en œuvre une responsabilité de plein droit des personnes chargées de régler le mode de vie ou d'organiser, contrôler et encadrer l'activité d'autrui dans leur propre intérêt, à la condition de démontrer la faute de l'auteur direct du dommage (article 1355). [...]
[...] En posant un principe général, il aurait évité les méandres dans lesquels s'est immiscée la jurisprudence dès 1991 lors de l'élargissement de la responsabilité du fait d'autrui, jusque là limitativement énumérée par les alinéas 2 et suivants de l'article 1384. La casuistique dans laquelle elle est entrée, faute de principe général justement, est très dommageable pour la sécurité juridique et nécessite un éclaircissement que n'apporte pas l'avant projet. À force d'exemples disparates et d'exceptions posées, jusqu'au régime même de cette responsabilité, le principe général est dénaturé par le projet lui-même. Ce sera donc, si le projet entre en vigueur, à la jurisprudence (encore une fois) de déterminer le régime de responsabilité pour autrui dans de très nombreux cas. [...]
[...] L'avant projet reprend cette responsabilité de plein droit de principe pour la responsabilité du fait d'autrui. Ce n'est donc pas une responsabilité pour faute présumée qui est mise en place en principe, mais une responsabilité sans faute, dont on ne peut s'exonérer que par la preuve d'une cause étrangère : la faute de la victime ou le cas de force majeure, c'est-à-dire un évènement irrésistible, imprévisible et extérieur aux parties. Ce régime de responsabilité de plein droit est donc très favorable à la victime, qui par hypothèse n'a plus à démontrer la faute de l'auteur du dommage, mais qui surtout se voit plus facilement indemnisée de son dommage, puisque le défendeur ne peut que difficilement s'exonérer de cette responsabilité : la solution de l'avant projet Catala est donc résolument inscrite dans une optique de réparation quasi systématique du préjudice subi de la part de la personne chargée de la garde. [...]
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