Face à la recrudescence des victimes de guerre, issues des nombreuses interventions des troupes françaises sur différents conflits extérieurs, et face à l'augmentation du coût des soins médicaux en France, le gouvernement français a organisé un dispositif juridique permettant aux victimes de guerre bénéficiant d'une pension d'invalidité d'avoir un accès gratuit à des soins. Le gouvernement français souhaite également instituer, dans chaque région, des organismes, lesquels seraient saisis par les victimes de guerre bénéficiant d'une pension d'invalidité, lorsque ces derniers voudraient contester les décisions des préfets de région leur refusant le droit de bénéficier gratuitement de prestations médicales et paramédicales nécessitées par des blessures ou des maladies de guerre. Dénommés « commissions régionales de soins gratuits », ces organismes régionaux seraient composés de 7 membres et présidés par le président du tribunal administratif le plus important de la région ; leurs décisions seraient susceptibles d'un recours en cassation devant le Conseil d'Etat.
Le gouvernement souhaite toutefois être éclairé sur divers points juridiques qui lui semblent délicats. Par l'intermédiaire du ministre de la Défense, il vous demande une consultation et, plus précisément, de répondre aux questions suivantes.
1. Après l'avoir éclairé sur la nature de ces commissions régionales de soins gratuits, le gouvernement vous demande s'il est bien compétent pour les instituer
2. Pour mener à bien ce projet, le gouvernement voudrait savoir à quelles modalités de fonctionnement et de procédure il doit soumettre ces commissions régionales.
3. Le gouvernement envisage de faire figurer, parmi les sept membres de chaque commission, le Préfet de région, le directeur régional de l'Office des anciens combattants et un médecin du bureau des affaires médicales du Ministère de la Défense ; il se demande si une telle composition des commissions respecte les règles et principes juridiques.
4. Le gouvernement souhaite également instituer les fonctions de rapporteur et de commissaire du gouvernement auprès de chacune des commissions ; après lui avoir rappelé la distinction entre ces deux fonctions, le gouvernement désire savoir s'il est juridiquement possible de les faire siéger dans la formation de jugement.
5. Le gouvernement a, un temps, pensé remplacer ces commissions régionales par une seule autorité administrative indépendante au niveau national, mais qui aurait eu exactement la même compétence ; il se demande si toutes ses questions se seraient également posées et auraient abouti, de votre part, à des réponses différentes.
[...] C'est l'arrêt Conseil de la Concurrence rendu par le Conseil constitutionnel le 23 janvier 1987 qui consacre l'existence d'une juridiction administrative, avec un domaine de compétence réservé, à côté de la juridiction judiciaire. On définit comme juridictions administratives les juridictions de l'ordre administratif, normalement soumises au contrôle du CE par voie d'appel ou de cassation. En ce sens, les commissions régionales de soins gratuits sont des juridictions administratives, puisqu'elles résultent d'un dispositif juridique qui d'une part leur confère comme président le président du tribunal administratif ; et d'autre part, les décisions de ces commissions sont susceptibles d'un recours en cassation devant le Conseil d'Etat. [...]
[...] De plus, AAI et juridictions administratives spécialisées sont dans certains cas soumises aux mêmes exigences de fonctionnement et de procédure. Partant de ce principe selon lequel les AAI doivent se soumettre aux principes d'impartialité et d'égalité, entendus par l'article de la CEDH notamment on arrive aux mêmes conclusions concernant la composition de l'AAI et des commissions régionales de soins gratuits : s'agissant du directeur régional de l'Office des anciens combattants et du médecin du bureau des affaires médicales du Ministère de la Défense, on peut considérer qu'ils pourront participer à la formation de jugement du moment qu'ils ne sont pas en charge dans l'exercice de leurs fonctions des questions soumises à l'AAI. [...]
[...] Ainsi, le gouvernement devra soumettre les commissions régionales de soins gratuits aux modalités de fonctionnement et de procédures, conformément à la jurisprudence dégagée par les arrêts Téry de 1913 du CE et Conseil de la concurrence.(CC, 1987) 3. En matière de règles et principes juridiques relatifs à la composition des juridictions administratives spécialisées, il n'existe pas de principe clair et défini. Ces juridictions ont en effet une importance effective très variable. La jurisprudence rendue en matière administrative vient cependant préciser certaines règles quant à la composition des juridictions administratives spécialisées. Depuis la loi du 24 mai 1872, le système de l'administrateur juge pur n'existe plus : l'administration et la justice administrative sont clairement séparées et indépendantes. [...]
[...] Le CE, dans un arrêt Cadot du 13 décembre 1889 supprime explicitement la théorie du ministre-juge vestige du système de l'administrateur juge. De cette loi et de la jurisprudence qui en découle, on retient un principe fondateur en droit administratif : le juge administratif et l'administrateur sont séparés, l'administrateur ne pouvant intervenir dans le cours de la justice administrative. Autrement dit, l'administration ne peut plus se juger elle- même, être juge et partie à un procès ; il en va du respect du principe d'impartialité, qui passe par l'absence pour le juge de pré-jugement. [...]
[...] Un mouvement de juridictionnalisation des AAI a posé la question de la nécessité des garanties procédurales dans le fonctionnement de ces AAI Les sanctions prononcées par les AAI sont administratives ; ce pouvoir de sanction a été reconnu par le Conseil constitutionnel dans une décision du 28 juillet 1989. Comme les juridictions administratives, les AAI vont être soumises à des modalités de fonctionnement et de procédure, puisque la tendance actuelle est à rapprocher de plus en plus le régime des sanctions administratives de celui des sanctions pénales. A ce titre, les AAI sont donc soumises aux mêmes exigences de fonctionnement et de procédure que les juridictions administratives spécialisées. [...]
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