A la veille du tournant radical que fut la reconnaissance de la propriété comme d'un droit absolu exclusif, perpétuel et individuel par les rédacteurs du Code Napoléon, Pothier disait « propre et commun sont contradictoires ».
Ainsi de par cette phrase il opposait deux modèles propriétaire que sont la propriété romaine individuelle et la propriété collective/communautaire féodale. En effet pour comprendre ce qui a amené le dogme individualiste imposé par le Code civil, il faut comprendre ce que fut la propriété médiévale, ce qui implique que l'on prenne en considération les traits culturels de la société d'époque. Ainsi on ne peut concevoir la société et de surcroît la propriété médiévale en faisant abstraction de la théologie. Dieu, créateur du monde, en est le seul maître et le seul propriétaire. Les hommes ne pouvant, au mieux, que se prévaloir d'un usage concédé .
La propriété ne peut jamais être pleine et entière, le propriétaire médiéval n'est finalement qu'un usufruitier.
Cette idée qui fait de Dieu le propriétaire de toutes choses n'est que le corollaire de la conception médiévale de l'individu qui n'existe que par et dans le groupe. Ainsi ces facteurs théologiques et sociaux expliquent les caractères de la propriété médiévale également appelée saisine. La saisine n'est pas une appartenance exclusive sur une chose visée dans sa matérialité, mais plutôt une jouissance d'une chose visée dans son utilité. De par ce fait, la propriété médiévale se rapproche d'un simple droit d'usage excluant le caractère absolutiste de la propriété romaine. Plus important encore est le caractère collectif que peut prendre ce type de propriété.
Dans une société ou le groupe à une importance considérable et la solidarité familiale une dimension fondamentale, les formes collectives d'appropriation sont abondantes. Que ce soit par les communautés taisibles, les propriétés simultanées, La théorie du double domaine, ou même les communaux, la conception romaine de propriété s'est vue être sacrifié sur l'autel de la collectivité.
Ainsi on peut mieux comprendre l'antagonisme des modèles romains et féodaux de la propriété que nous expliquait Pothier.
[...] Ainsi, l'indivision concerne un ensemble de personnes, ces dernières ayant un droit de propriété sur la ou les choses. Certains auteurs pensent que comme l'indivision est un concours de droit de propriété sur un même bien, elle est une forme de propriété collective. Ce positionnement doctrinal est selon certains auteurs renforcé depuis l'entrée en vigueur des lois de 1976 et 2006 Cependant, la majorité de la doctrine explique que le terme propriété collective est paradoxal, la propriété étant ce qui est propre elle ne peut donc être collective. [...]
[...] À coté de la communauté d'intérêt familial, on peut trouver de la propriété collective dans les biens communaux. Certains auteurs défendent la thèse selon laquelle les biens communaux sont de la propriété individuelle[33]. Cependant, le caractère collectif aux minima de sa jouissance est rappelé par les juges[34]. Historiquement les biens communaux étaient partagés entre les villageois et les seigneurs, il s'agissait donc d'une propriété collective, la terre étant attribuée pour les deux tiers au seigneur et pour un tiers aux villageois. [...]
[...] On peut alors rapprocher son régime de l'indivision, cependant il n'est pas susceptible de licitation ni de partage. Par ailleurs, une personne ne peut y être inhumée qu'avec le consentement de tous les propriétaires. Cela démontre bien une gestion commune des caveaux de famille. Certains auteurs voient dans ces deux derniers exemples un droit sui generis. La raison principale réside dans le fait que, compte tenu de leurs valeurs familiales, ils ont corrélativement un intérêt moral et doivent donc se voir appliquer un régime spécial. [...]
[...] Ce mode d'expression collective permet de modifier le fonctionnement de l'indivision et donc peut-être sa structure juridique. Ainsi, l'indivision aura dans le plus part des cas un représentant, comme l'ont toutes les personnes morales, car il suffit désormais de la majorité pour nommer l'administrateur. Ainsi, l'idée selon laquelle l'utilisation de la majorité permet de caractériser la conception collectiviste de l'indivision, permet aussi de démontrer la personnification de l'indivision. En effet, comme dans toutes sociétés, ses décisions seront prises de manière collective puisqu'un grand nombre de décisions sont susceptibles désormais d'être adoptées à la majorité. [...]
[...] Les auteurs expliquent justement cette inopposabilité par la conception individualiste de l'indivision[8]. En effet chaque indivisaire n'agit pas pour le compte des autres, mais uniquement pour son propre compte : il agit pour sa part, c'est-à-dire pour ce qui lui reviendra lorsque la chose sera partagée. À la vue de toutes ces considérations, il apparaît bien que ce qui caractérise l'indivision est bien l'exercice de la propriété individuelle. Dès lors, l'indivisaire est un propriétaire qui exerce son droit concurremment avec d'autres propriétaires, qui usent chacun de leur droit propre en commun. [...]
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