Cass com civ1 13 juin 2006 oeuvre de l'esprit originalité savoir faire forme d'expression fragrance
Dans le Portrait de Dorian Gray, Oscar Wilde affirmait que «L'art est toujours plus abstrait que nous ne l'imaginons. La forme et la couleur nous parlent de forme et de couleur, et tout s'arrête là.». Une certaine sensibilité est donc nécessaire pour apprécier une œuvre et aller au delà de ce que peuvent capter nos sens. C'est en substance ce que semble vouloir nous dire la première Chambre civile de la Cour de cassation, à travers cet arrêt rendu en date du 13 juin 2006. En effet, tout ouvrage ne peut se réclamer comme résultant de l'œuvre de l'esprit, à défaut il procéderait d'un savoir-faire.
En l'espèce, la demanderesse avait crée des parfums pour une société et souhaitait se voir reconnaître comme en étant l'auteur.
[...] Ce sont ces deux caractères qui fondent la différence entre une oeuvre de l'esprit et un savoir-faire. Ainsi, l'acte de création implique bien plus qu'un savoir-faire et l'originalité, son complément, n'apparaît pas dans un ouvrage procédant d'un savoir-faire De la création, bien plus qu'un savoir-faire : Selon le professeur Véronique Cohen : "Dans un sens courant, le savoir- faire se définit comme l'ensemble des connaissances théoriques, techniques et pratiques, d'une personne ou d'un corps de métier. Il est donc lié à l'expérience professionnelle, aux aptitudes personnelles, ainsi qu'aux différentes méthodes d'exploitation propres à une profession. [...]
[...] La notion d'originalité se distingue donc de celle de nouveauté et les juges appliquent l'une ou l'autre des conceptions selon les espèces. Il est à noter qu'il existe différents degrés d'originalité en ce que l'oeuvre peut être originale, c'est-à-dire absolument originale ou dérivée, son originalité n'étant alors que toute relative, car découlante d'une oeuvre préexistante dite originelle. La question de la reconnaissance de la protection de la fragrance d'un parfum en droit d'auteur ne date pas d'hier et les juges du fonds sont divisés sur la question. [...]
[...] Au surplus, l'effort intellectuel comprend un choix arbitraire de l'auteur, un parti pris personnel alors que le savoir-faire renferme des choix nécessairement dictés par la technique. Ainsi, la première Chambre civile de la Cour de cassation tranche que fragrance d'un parfum, qui procède de la simple mise en oeuvre d'un savoir- faire» ne peut s'analyser en une création. En effet, de simple mise en oeuvre d'un savoir-faire» se déduit l'absence de création puisque la mise en oeuvre induit l'application de techniques préexistantes à la confection de l'ouvrage, d'où ne résulte, pour la Cour régulatrice, aucun effort intellectuel. [...]
[...] La fragrance s'impose à lui selon des éléments préexistants et mis à sa disposition, même s'il les agence à sa guise. De ce fait, le concepteur du parfum ne peut valablement invoquer ni d'apport intellectuel sur la composition de son parfum, ni même le fait de l'avoir teinté de sa personnalité. La fragrance d'un parfum étant dénuée d'originalité au sens du droit d'auteur, il convient maintenant de voir pourquoi la première Chambre civile de la Cour de cassation a refusé le qualificatif de «forme d'expression» à la fragrance. [...]
[...] La première Chambre civile de la Cour de cassation préserve donc le droit d'auteur d'une déformation. En effet, le droit d'auteur ne convient pas pour la protection de fragrances ne pouvant s'adapter aux oeuvres de l'esprit. En outre, cette même chambre a récemment, dans une décision du 1er juillet 2008, refusé la protection du droit d'auteur à une eau de toilette (Le Mâle, signé Jean-Paul Gaultier) au même motif que celui du présent arrêt, réitérant sa formule la fragrance d'un parfum, qui procède, de la simple mise en œuvre d'un savoir-faire ne constitue pas la création d'une forme d'expression pouvant bénéficier de la protection des œuvres de l'esprit Cette jurisprudence semble donc être bien partie pour perdurer malgré la résistance d'une partie des juridictions du fonds. [...]
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