Incessible en-soi, le nom patronymique peut, pour autant qu'il ait été déposé à titre de marque, être l'objet de contrats en cela que la marque ainsi créée se détache du nom et est alors dotée d'une valeur patrimoniale.
En l'espèce, après avoir déposé diverses marques utilisant à la fois ses noms et prénoms, la requérante a cédé ses droits sur celles-ci à une société qui s'engageait alors à lui fournir un contrat de travail. Licenciée de manière jugée abusive, la requérante décide alors d'attaquer cette société en justice afin de faire annuler l'ensemble des accords passés à l'occasion des cessions. Elle demande subsidiairement la déchéance des droits attachés aux marques cédées ou postérieurement déposées.
Il s'agit alors de s'interroger sur le fait de savoir si la personne physique ayant cédé une marque portant son nom patronymique est recevable à agir contre son cessionnaire, en déchéance des droits attachés à cette marque. Au contraire, l'on se demande si la personne physique cédante peut soutenir que l'utilisation par le cessionnaire des marques cédées, après qu'elle ait été licenciée, correspond à une tromperie du public.
[...] Un autre argument aurait alors pu faire pencher la Cour de cassation dans le sens d'une autre décision. Ainsi, l'on pourrait prétendre que la garantie d'éviction ne pouvait être opposée au cédant car la déceptivité des marques (le fait que l'usage de celles-ci puisse porter à confusion dans l'esprit des consommateurs) avait pour origine un acte du cessionnaire, en l'occurrence, la rupture du contrat de travail. L'on pourrait alors estimer que le cessionnaire était à l'origine de sa propre éviction, ce qui empêcherait d'opposer au cédant la garantie d'éviction. [...]
[...] Elle demande subsidiairement la déchéance des droits attachés aux marques cédées ou postérieurement déposées. En première instance, le TGI de Paris a reconnu la nullité des cessions pour protestativité. La Cour d'appel de Paris a ensuite mis en avant la recevabilité de la requérante à agir en déchéance des marques pour déceptivité. Par un arrêt du 31 janvier 2006, la chambre commerciale de la Cour de cassation casse et annule cette décision au visa de l'article 1628, au motif que la cédante n'était pas recevable en une action tendant à l'éviction de l'acquéreur [ . [...]
[...] Comme tout vendeur, le cédant est alors débiteur de plusieurs obligations envers son cessionnaire. Ainsi, comme l'indique l'article 1628 du Code civil, Quoiqu'il soit dit que le vendeur ne sera soumis à aucune garantie, il demeure cependant tenu de celle qui résulte d'un fait qui lui est personnel : toute convention contraire est nulle On parle alors, en application du vieil adage qui doit garantie ne peut évincer de garantie du fait personnel contre l'éviction. Le cédant doit alors s'abstenir de causer tout trouble de droit ou de fait, au droit de propriété qu'il a lui-même transmis au cessionnaire par le biais de la cession. [...]
[...] Refusant de s'engager dans cette voie, la Cour de cassation a vu juste puisqu'un arrêt du 30 mars 2006 de la Cour de justice des communautés européennes est venu expliciter le fait que le titulaire d'une marque correspondant au nom du créateur et premier fabricant des produits portant cette marque ne peut, en raison de cette seule particularité, être déchu de ses droits au motif que ladite marque induirait le public en erreur, au sens de l'article 12, paragraphe sous de la directive 89/104, notamment quand la clientèle attachée à cette marque a été cédée avec l'entreprise En d'autres termes, la CJCE évoque le fait que la déceptivité des marques n'est pas un critère suffisant pour engendrer la déchéance du titulaire de celles-ci, lequel les a acquis par cession. On peut donc penser que la solution posée par la Cour de cassation, c'est-à- dire la démonstration de l'irrecevabilité de l'action du cédant correspond aux exigences posées postérieurement par le droit communautaire. [...]
[...] En l'espèce, peu importe alors l'objet de ce contrat de cession en cela que c'est précisément l'existence même de la cession qui empêche le cédant d'agir en justice contre son cessionnaire en déchéance de ses droits. Néanmoins, l'objet du contrat de cession était singulier en cela qu'il correspondait à des marques qui portaient les nom et prénom du cédant. Or, le nom patronymique dispose d'un statut bien particulier car il ne peut ordinairement pas faire l'objet d'une cession, n'étant pas un attribut patrimonial dont le titulaire peut jouir librement. [...]
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