Le MAE apparaît comme une avancée notable sur le plan de la coopération judiciaire pénale en Europe. Cette nouvelle figure juridique est en effet destinée à remplacer, entre les membres de l'UE, la procédure d'extradition réputée pour sa complexité et sa lenteur du fait de son double aspect judiciaire et administratif. La volonté de simplifier l'extradition entre les membres de l'UE s'est très tôt faite sentir, et le MAE est l'aboutissement d'un long processus d'évolution (on peut ainsi relever la Convention européenne d'extradition signée dans le cadre du conseil de l'Europe le 13 décembre 1957 ; la convention d'application de l'accord de Schengen de 1985 du 19 juin 1990 ; la convention relative à la procédure simplifiée d'extradition entre les Etats membres de l'UE du 10 mars 1995 et la convention relative à l'extradition entre les Etats membres de l'UE du 27 septembre 1996).
Mais le MAE n'est pas que l'aboutissement d'un processus de simplification de l'extradition : il représente au contraire un tournant, un changement radical et est censé se substituer à la procédure d'extradition déjà simplifiée entre les Etats membres. La décision-cadre du 13 juin 2002 affirme que « l'objectif assigné à l'UE de devenir un espace de liberté, de sécurité et de justice conduit à supprimer l'extradition entre Etats membres et à la remplacer par un système de remise entre autorités judiciaires ».
Il y aurait donc un véritable changement de nature entre l'extradition, même simplifiée, et MAE : la première impliquant une coopération entre Etats souverains tandis que le second repose au contraire sur un espace de liberté, de sécurité et de justice commun qui se manifeste par la libre circulation et la reconnaissance pénale des décisions judiciaires rendues en matière pénale.
Mais, au-delà de l'objectif affiché par la décision-cadre, le risque est toujours que quelques réflexes souverainistes viennent altérer l'institution du MAE pour n'en faire qu'une forme d'extradition simplifiée, certes plus efficace et plus rapide, mais qui resterait une extradition malgré tout parce que reposant notamment sur le consentement de l'Etat requis.
En effet, la reconnaissance des décisions de justice que met en œuvre le MAE ne saurait être inconditionnelle, et la décision-cadre admet que « les décisions relatives à l'exécution du MAE doivent faire l'objet de contrôles suffisants, ce qui implique qu'une autorité judiciaire de l'Etat membre où la personne recherchée a été arrêtée devra prendre la décision de remise de cette dernière ».
La question est donc de déterminer si la procédure et les conditions de fond de la remise sont imposées par le contrôle minimum qu'implique la mise en œuvre de toute décision ou si elles s'expliquent par la volonté de conserver une parcelle de souveraineté en matière pénale.
Cet examen doit être mené tant du point de vue des conditions de fond du MAE que de sa procédure. Or, s'il apparaît de prime abord que le MAE marque un abandon significatif des conditions et de la procédure traditionnelles de l'extradition (I), abandon qui tendrait à faire de cet instrument une procédure spécifique, un examen plus approfondi du mécanisme mis en place révèle la résurgence de vestiges de souveraineté nationale et de réflexes extraditionnels (II), conduisant au constat d'une trop grande filiation entre le MAE et l'extradition.
[...] Le MAE doit être exécuté d'urgence L'économie du nouveau système repose essentiellement sur le respect par les Etats des normes et délais définis par la décision-cadre tant pour l'exécution du MAE que pour la remise de la personne recherchée. Selon la proposition de la décision-cadre, même s'il appartient à chaque Etat d'organiser la procédure selon ses règles propres et de prévoir le cas échéant une possibilité de recours sur la décision prise par l'autorité judiciaire, il reste que la procédure mise en place par la décision-cadre se veut avant tout rapide et efficace. [...]
[...] Il faut noter que la procédure simplifiée d'extradition applicable entre les Etats membres de l'UE parties à la Convention du 10 mars 1995 écarte l'exigence d'un décret d'extradition (repris par l'art 696-31 Cpp). Le MAE ne représente donc pas un tournant aussi marqué par rapport au droit spécial de l'extradition tel qu'il résulte notamment de la procédure simplifiée d'extradition entre les pays membres de l'UE. L'intérêt principal du mandat d'arrêt européen réside dans la simplification et la rapidité de la procédure ainsi que dans les conditions d'exécution obligatoires. [...]
[...] Une procédure qui modifie la nature de la remise La spécificité du MAE se traduit par la nature judiciaire de la procédure mise en place, procédure qui le distingue de l'extradition, et par son applicabilité directe, applicabilité qui le distingue du mandat d'arrêt international Le passage d'une procédure entre Etats à une procédure entre autorités judiciaires L'application du principe de reconnaissance mutuelle des décisions de justice signifie que la décision d'un juge de demander l'arrestation et la remise d'une personne doit être exécutée sur tout le territoire de l'UE. Il implique donc de supprimer la phase politique de la procédure d'extradition, ce qui supprime d'ailleurs en même temps la phase de contrôle administratif de la décision prise par l'autorité politique. C'est là un changement majeur puisque, fondamentalement, l'extradition est une procédure par laquelle une personne est remise par un Etat souverain s'exprimant à travers ses institutions politiques à un autre Etat souverain. [...]
[...] L'abandon de la règle dans le cadre du MAE Le mandat d'arrêt européen doit pouvoir s'appliquer au plus grand nombre possible de personnes poursuivies ou condamnées. Telle est bien l'intention des auteurs de la décision-cadre et du législateur français qui ont supprimé la condition classique selon laquelle l'Etat requis ne livrait pas ses nationaux en règle générale. Le maintien de la solution traditionnelle de l'extradition dans le cadre du MAE ne pouvait être envisagé pour au moins 2 raisons : - l'une technique : la décision-cadre du 13 juin 2002 n'a pas prévu la possibilité pour les Etats membres de refuser la remise de leurs ressortissants. [...]
[...] Il n'en va pas de même de l'émission du MAE qui, tout en bénéficiant des acquis de Schengen au plan du signalement et de la transmission, sera quant à lui directement exécutoire dans le pays d'exécution. En effet, la demande d'exécution du MAE s'impose aux Etats membres qui, d'après l'article premier al de la décision-cadre exécutent tout MAE, sur la base du principe de reconnaissance mutuelle Il résulte de cette affirmation de principe que le mandat d'arrêt européen doit être exécuté et qu'il doit l'être surtout en toute urgence. a. Le MAE doit être exécuté La décision-cadre exprime clairement l'obligation pour l'Etat d'exécution de déférer au MAE. [...]
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