Dans un arrêt Kruslin et Huvig c/ France du 24 avril 1990, la Cour européenne des droits de l'homme a condamné la France au motif que les écoutes téléphoniques, telles qu'elles étaient pratiquées, ne répondaient pas aux exigences de l'article 8 Conv. EDH relatif au droit au respect de la vie privée et familiale. Elle a ainsi jugé que le droit français n'indiquait pas « avec assez de clarté l'étendue et les modalités d'exercice du pouvoir d'appréciation des autorités » et qu'il n'offrait pas « pour le moment de sauvegardes adéquates contre divers abus à redouter, notamment quant aux catégories de personnes susceptibles d'être mises sous écoute judiciaire, quant à la nature des infractions pouvant y donner lieu, quant aux limites à la durée d'exécution de la mesure, quant aux conditions d'établissement des procès verbaux de synthèse conservant les conversations interceptées, quant à l'intégrité des communications aux fins de contrôle, quant à l'effacement ou à la destruction des bandes ».
Si, dans cet arrêt, la Cour ne condamnait pas en soi la pratique des écoutes téléphoniques en ce qu'elles facilitent la manifestation de la vérité, elle rappelait que cette pratique est constitutive d'une atteinte à la vie privée et insistait sur sa nécessaire conciliation avec le droit au respect à la vie privée.
En réponse à cette condamnation, le législateur français est rapidement intervenu par la loi du 10 juillet 1991 pour satisfaire aux exigences de la Cour et concilier la pratique des écoutes téléphoniques avec le droit au respect de la vie privée.
Comment cette conciliation s'opère-t-elle entre respect de la vie privée et écoutes téléphoniques ?
Cette conciliation est rendue possible par la restriction du champ d'application des écoutes téléphoniques et par l'imposition de conditions de forme très strictes (I). Mais cet équilibre tend à être remis en cause (II).
[...] Comment cette conciliation s'opère-t-elle entre respect de la vie privée et écoutes téléphoniques ? Cette conciliation est rendue possible par la restriction du champ d'application des écoutes téléphoniques et par l'imposition de conditions de forme très strictes Mais cet équilibre tend à être remis en cause (II). I L'équilibre entre écoutes téléphoniques et respect de la vie privée A - Un champ d'application restreint La loi du 10 juillet 1991 réduit le domaine des écoutes judiciaires, tant ratione materiae que ratione personae Le champ d'application matériel Les écoutes judiciaires ne concernent que les matières criminelle et correctionnelle, à l'exclusion de la matière contraventionnelle. [...]
[...] Autrement dit, l'écoute ne doit pas permettre de découvrir ces indices. Ils doivent exister à la date où est prescrite la mesure d'interception (Crim janvier 1997, Bull. 14). La loi du 8 février 1995 a de même prévu que la ligne d'un député ou d'un sénateur ne peut donner lieu à interception sans que le président de l'assemblée à laquelle appartient le parlementaire en soit informé par le juge d'instruction, et ce à peine de nullité. En revanche un parlementaire européen ne bénéficie pas de cette disposition (Crim mars 2005, Bull. [...]
[...] Pour la Cour de cassation également, l'identification de numéros de téléphone n'est pas une interception de correspondance émise par la voie des communications mais une simple mesure technique relevant de l'article 77-1 du code de procédure pénale (Crim juin 2001, 01- 82.578 les propos entendus lors d'une conversation téléphonique. Ne constitue pas une interception de correspondance au sens de l'article 8 de la Conv. EDH ou de l'article 100 CPP, le simple compte rendu de propos entendus par des policiers au cours d'une conversation téléphonique qui s'est déroulée en leur présence, sans artifice ni stratagème (Crim avril 1997, Bull. 131). [...]
[...] Cette transcription donnera lieu à un procès- verbal. Si la correspondance est en langue étrangère, la transcription sera faite en français, avec l'assistance d'un interprète requis à cette fin. La transcription est versée au dossier. Pourtant, la pratique judiciaire et l'interprétation jurisprudentielle qui est faite de la loi de 1991 assurent une marge de manœuvre importante au magistrat instructeur pour l'établissement et le recueil de la preuve par voie d'écoutes téléphoniques. La définition, stricte, qui est donnée des écoutes téléphoniques, mais également la loi du 9 mars 2004, tendent à remettre en cause l'équilibre atteint par la loi du 10 juillet 1991 entre écoutes téléphoniques et respect de la vie privée. [...]
[...] Mais ces dispositions traduisent une rupture de l'équilibre instauré par la loi du 10 juillet 1991, cette rupture de l'équilibre se faisant au détriment du droit au respect de la vie privée et au profit de la pratique des écoutes téléphoniques qui permet une surveillance accrue des citoyens. [...]
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