Les américains l'appellent le plea-bargaining, les italiens le pattegiamento, les français, eux, ont opté pour une appellation plus administrative, la procédure de jugement sur reconnaissance préalable de culpabilité. Quel que soit son nom, le plaider-coupable à l'anglo-saxonne, qui permet au procureur de négocier avec le prévenu une peine moins sévère s'il reconnaît les faits, s'étend peu à peu aux pays de tradition juridique latine. Le plea-bargaining est né aux Etats-Unis au début du XXe siècle, pour des raisons pragmatiques, en raison de la surcharge des tribunaux incapables de traiter toutes les affaires devant un jury populaire. De nos jours, 95% de leurs affaires pénales utilisent ce système. Peu à peu, l'apparition dans la procédure pénale d'aveu de culpabilité a séduit les systèmes judiciaires européens. Ainsi la CEDH dans un arrêt du 22 février 1980 Deweer c. Belgique énonce que la transaction « présente pour les intéressés comme pour l'administration de la justice des avantages indéniables, qui ne se heurte pas en principe à la Convention Européenne de Sauvegarde des Droits de l'Homme »
[...] La société ne retient que la reconnaissance de culpabilité. La présomption d'innocence est ici sérieusement écornée. Ce phénomène se confirme par une désacralisation de la peine. Auparavant redoutée, sa symbolique s'est effritée. Il devient de plus en plus difficile pour les juges de procéder à un rappel à la loi, de formuler un langage public distinguant clairement l'interdit, de l'autorisé ou du toléré. Difficile de dégager un message clair des risques encourus pour telle ou telle infraction si on peut la négocier. [...]
[...] II- Les limites et la réalité cachée d'un plaider à la française L'apparente équité du plaider coupable français se doit d'être nuancée, il convient d'étudier dans un premier temps : les critiques éthiques d'une justice négociée puis dans un second temps la réalité masquée par cette solution de facilité ou l'espoir d'une reconstruction Les critiques éthiques d'une justice négociée Le danger d'une justice économique à deux vitesses Médiation comme composition proposent bien souvent une indemnisation du préjudice de la victime en espèces sonnantes et trébuchantes. Ainsi l'article 41-2 du Code de Procédure Pénale peut exiger jusqu'à 3800 euros pour une amende de composition selon la gravité des faits. Il est à noter que l'article 41-3 du Code de Procédure Pénale limite cependant cette amende à un plafond de 750 euros en cas de violences ou de dégradations contraventionnelles. Cependant cette pression financière à la charge du contrevenant n'est pas toujours supportable par l'intéressé lui même. [...]
[...] La composition pénale Art. 41-2 du CPP La composition pénale permet au procureur de la République de proposer une ou plusieurs mesures à une personne majeure reconnaissant avoir commis certains délits ou contraventions. Cette procédure n'est utilisée que pour des délits punis d'une peine d'emprisonnement inférieure ou égale à trois ans. Les délits concernés sont : violences ayant entraîné une incapacité de travail, menaces, appels téléphoniques malveillants, abandon de famille, atteinte à l'exercice de l'autorité parentale, vol simple ou filouterie, port illégal d'une arme, détournement de gage, d'objet saisi, destructions, dégradations et détériorations, menaces de destruction, fausses alertes, outrages contre une personne chargée d'une mission de service public, sévices contre animaux, rébellion, usage illicite de stupéfiants, délit de conduite sous l'empire d'un état alcoolique. [...]
[...] Curieusement la procédure de composition désaisit la victime de l'espoir de cette sanction sans que son avis ne soit pris en considération. La transaction est binaire sans consultation de la personne principalement intéressée : la victime. Exclus de cet échange, droits de la victime et de la défense apparaissent malmenés au profit exclusif des intérêts du ministère public. Plaider coupable : entre facilité masquant la réalité et espoir de reconstruction Une sacralisation excessive de la culpabilité Du récent courant de simplification judiciaire la société attend des réponses simples à ses questions. Une distinction binaire innocent ou coupable tend à apparaître. [...]
[...] En effet le parquet n'a ici aucun rôle. En outre la reconnaissance de culpabilité bien que sous entendue pour bénéficier de ce régime de faveur n'est pas textuellement exigée. Il faudra donc attendre le 23 juin 1999 pour voir apparaître les outils d'un plaider coupable à la française avec la médiation et la composition pénale. Dans une période d'engorgement judiciaire, ces procédures de justice simplifiées, alternatives à la prison sont de véritables bouffées d'oxygène pour un système sclérosé. Prévue par l'article 41-1 du CPP, la médiation pénale constitue une réponse judiciaire à des infractions comme les dégradations, les violences légères, les contentieux familiaux mineurs ou les contentieux de voisinage. [...]
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