Faut-il supprimer le juge d'instruction ? : la survivance même du caractère traditionnellement inquisitoire de la procédure française de mise en état de l’affaire pénale

Extraits

[...] Il doit d'abord communiquer le dossier au procureur et aviser les parties et leurs avocats de son intention de clore l'information. Le procureur doit alors adresser, dans un délai d'un mois si le mis en cause est détenu ou trois mois dans l'autre cas, ses réquisitions. Dans le même temps, les parties peuvent formuler des demandes d'actes, des requêtes en nullité et des observations au juge d'instruction. A l'issue de cette phase, le procureur et les parties disposent d'un délai de dix jours si le mis en cause est détenu et un mois dans l'autre cas pour adresser au juge d'instruction les réquisitions et observations complémentaires. [...]

[...] L'adoption d'une véritable procédure accusatoire dans la phase de mise en état de l'affaire pénale ne peut que passer par une véritable révolution des pratiques de la défense, qui doit disposer de moyens conséquents pour pouvoir contredire l'enquête menée par l'autorité de poursuite qu'est le procureur. Or, il n'est pas certain que le projet actuel prenne en compte cette dimension, au risque d'aller vers une procédure formellement accusatoire mais dont le caractère inquisitoire sera en fait renforcé par la toute puissance et la dualité, non plus du juge d'instruction mais du procureur de la République, à la fois autorité de poursuite et d'enquête, et qui ne dispose pas des garanties inhérentes à la magistrature du siège. [...]

[...] Cette deuxième prérogative a disparu avec la loi du 15 juin 2000 qui crée une voie d'appel contre les arrêts de la cour d'assises et change le nom de la chambre d'accusation qui devient la chambre de l'instruction. La chambre de l'instruction est seule compétente, sous le contrôle de la Cour de cassation, pour connaître des nullités de l'enquête de police et de l'instruction préparatoire. Toutes les ordonnances juridictionnelles du juge d'instruction sont susceptibles d'appel devant elle (mais pas ces ordonnances administratives). En ce qui concerne les appels du ministère public, la chambre de l'instruction en ait directement saisi. [...]

[...] Le témoin assisté dispose d'un statut un peu moins protecteur que le mis en examen. Il ne peut, par exemple, pas demander au juge d'autres actes que la confrontation. De même il ne dispose que d'une capacité très limitées en matière d'exercice des voies de recours. Cependant, il ne risque ni le placement sous contrôle judiciaire, ni le placement en détention provisoire. De plus, la loi du 9 mars 2004 est venu renforcer les droits du témoin assisté en lui donnant le pouvoir de former des requêtes en nullité. [...]

[...] Le risque est de passer d'un système imparfait dans lequel la dualité fonctionnelle du juge d'instruction pèse sur l'indépendance de l'information à un autre système imparfait dans lequel l'autorité d'enquête serait soumise au pouvoir exécutif et donc pèserait également sur l'indépendance de l'information. L'unique question que le législateur devrait se poser est donc plutôt celle du choix du type de procédure. Si on persiste à vouloir conserver le caractère traditionnellement inquisitoire de la procédure de mise en état de l'affaire pénale, alors le maintient du juge d'instruction semble nécessaire, quitte à augmenter encore les contrôles de son action (notamment via la mise en place effective de la collégialité de l'instruction). [...]