Placée au sommet de notre organisation judiciaire, la Cour de cassation trouve son origine dans le Conseil des parties sous l'Ancien Régime, section du Conseil du Roi chargée d'examiner les recours formés contre les arrêts des Parlements. Supprimé lors de la Révolution, cet organe réapparut en 1790 sous le nom de Tribunal de cassation et fut salué par Bonaparte comme « une des plus heureuses institutions qui assurent la stabilité de l'Etat ». Ce n'est que plus tard (28 floréal de l'an XII) que le tribunal prit le nom plus prestigieux de Cour de cassation. Si la Cour de cassation peut donc être considérée comme l'héritier du Conseil des parties de l'époque monarchique, ce sont des réformes successives qui ont contribué à lui donner sa physionomie actuelle. Ces réformes, présidées par la nécessité d'une juridiction supérieure, unique, régulatrice du droit d'une part et la méfiance du pouvoir politique à l'égard des juges d'autre part, ont profondément marqué l'évolution du rôle de la Cour de cassation.
En quoi les problèmes actuels rencontrés par la Cour de cassation et les nombreuses conséquences qu'ils induisent traduisent-ils le décalage existant entre les missions et compétences assignées initialement à la Cour de cassation en matière pénale et le rôle qu'elle est amenée à jouer aujourd'hui ? Autrement dit, en quoi les difficultés actuelles de la Cour de cassation en matière pénale et les réformes procédurales qu'elles impliquent peuvent être analysées comme la résultante d'une dénaturation du rôle et des attributions de la Cour de cassation en matière pénale ?
Si l'étude du rôle et des attributions de la Cour de cassation en matière pénale met l'accent sur la singularité de sa mission par rapport à celle des autres juridictions de fond (I), le rôle de la Cour de cassation en matière pénale se trouve aujourd'hui mis à mal et nécessite un certain nombre de réformes procédurales (II). (Précision: le sujet sera centré sur la Chambre criminelle de la Cour de cassation même si à de nombreux égards, certaines remarques sont communes aux chambres civiles et pénales).
[...] Le rôle original de la Cour de cassation en matière pénale est celui de juridiction de révision. Le pourvoi en révision peut être intenté contre une décision ayant acquis l'autorité de la chose jugée mais dans laquelle on a eu connaissance d'éléments nouveaux qui sont en mesure de remettre en cause ce qui avait été précédemment jugé. Le but de la procédure est de permettre la réparation des erreurs judiciaires sans pour autant menacer toutes les décisions définitives. La procédure ne peut donc être engagée que de façon restrictive. [...]
[...] Cet acquis constitutionnel, en ouvrant la Cour de cassation à tout citoyen, crée un risque d'encombrement. En 2004, la Chambre criminelle a connu 7823 affaires nouvelles ce qui représente par rapport à 20 ans plus tôt, une augmentation de 58% alors même que seuls des pourvois aboutissent à une décision de cassation. Ceux qui dénoncent rituellement l'encombrement de la Cour de cassation comme un désastre n'aperçoivent pas toujours qu'il est la conséquence naturelle de son ressort national, qu'il est le résultat d'une politique judiciaire d'ensemble qui se veut démocratique. [...]
[...] Une institution singulière au sommet de l'édifice juridique français A. Une Cour unique qui transcende la distinction entre juridiction de droit commun et d'exception La Cour de cassation est formée de six Chambres dont cinq Chambres civiles (trois purement civiles, une chambre commerciale et une chambre sociale) et une Chambre criminelle, spécialisée en matière répressive (art. R. 121-3 COJ). La Chambre criminelle est la seule chambre qui au sein de la Cour connaisse des affaires pénales. Tout comme pour les autres Chambres de la Cour de cassation, le roulement n'existe pas en principe (sauf besoin de reclassement des magistrats). [...]
[...] Elle a tout d'abord son rôle normal de juridiction de cassation qui ne se distingue pas de celui qu'elle exerce dans toutes les affaires du contentieux. Tout au plus peut être signalé le fait qu'il est assez fréquent en matière pénale, qu'elle se dispense de renvoyer à une juridiction de même type que celle qui avait rendu l'arrêt cassé. C'est le cas quand, après avoir statué sur un pourvoi, soit elle constate qu'il n'y a plus rien à juger (texte d'incrimination abrogé, amnistie ) soit conformément à l'article L. [...]
[...] Cet encombrement de la Cour de cassation en matière pénale est bien la résultante de sa spécificité. Elle est une conséquence naturelle de son rôle unificateur du droit qui l'oppose à la dispersion géographique des Cours d'appel implantées dans les régions. Cet encombrement de la Cour de cassation en matière pénale tient également au fait que les plaideurs ont tendance à considérer que le pourvoi en cassation est un moyen de faire rejuger leur affaire, alors même que la Cour de cassation, juge du droit et non de fait, n'est pas un troisième degré de juridiction. [...]
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