La Chambre criminelle de la Cour de cassation le 13 juin 2007 précise que : « Le président de la cour d'assises qui envisage de poser, comme résultant des débats, une question spéciale portant sur une requalification des faits, objet de l'accusation, ou sur une circonstance aggravante non visée dans l'acte de renvoi, doit prévenir les parties, avant les plaidoiries et réquisitions, de son intention afin de permettre à l'accusé ou à son conseil de faire valoir toutes observations utiles à la défense ». On constate que la Cour de cassation observe ici un revirement de jurisprudence et suit la ligne directrice de la Cour européenne des Droits de l'Homme. L'arrêt du 4 février 2009 s'inscrit dans la même logique jurisprudentielle.
En l'espèce, la Cour d'Assises de la Loire a condamné par un arrêt du 26 juin 2008 un individu à 30 ans d'emprisonnement pour meurtre. En désaccord avec le jugement, l'accusé se pourvoi en cassation. Pour ce faire, il invoque le fait que la Cour d'assises a violé les principes fondamentaux du droit de la défense, le principe de l'oralité et le principe du contradictoire. Il dénonce alors qu'après la clôture des débats, lui a été posée une question spécifique sur une circonstance aggravante.
De cette façon, une question spéciale posée par le président de la Cour d'assises ne respectant pas le principe du délai nécessaire à l'organisation de la défense est-elle de nature à provoquer la cassation ?
[...] En second lieu, la Cour de Cassation a pu fixer dès lors une deuxième condition importante, qui place le moment de l'avertissement avant les plaidoiries et réquisitions. Critère important puisqu'il s'en déduit que dans les cas où cet avertissement intervient après leur énonciation, il doit être indiqué que les parties n'ont émis aucune objection. En outre, il faut préciser que dans l'arrêt du 4 février 2009, les parties n'avaient procédé à aucune observation et que finalement, la circonstance aggravante n'avait pas été retenue. [...]
[...] Or, il est également possible de voir ici une application plus classique de la Cour de Cassation en considérant que la norme européenne a plus de poids que la norme française. En effet, il est tout à fait logique selon la simple hiérarchie des normes que la Cour de Cassation ait simplement utilisé le texte ayant le plus de portée juridique. Or il est évident que dans l'actuelle structure juridique et dans une société communautaire régie par les droits et les libertés, l'article 6 de la Convention Européenne des Droits de l'Homme a une portée bien plus importante qu'un article préliminaire en droit interne. [...]
[...] Dans l'hypothèse où il résulterait des débats une ou plusieurs circonstances aggravantes non mentionnées dans la décision de renvoi, l'article 350 autorise le président à poser une ou plusieurs questions spéciales Cette possibilité pose la question de l'exercice de la défense sur ces circonstances aggravantes. Jusque dans un passé récent, la Cour de Cassation considérait que ces dispositions étaient pleinement compatibles avec l'article 6 de la CEDH (Chambre Criminelle mai 1985). Il faudra attendre 2006 et l'arrêt Miraux France pour que la CEDH amène une modification de sa jurisprudence. Celle-ci va abandonner la jurisprudence précédente concernant la requalification des faits sur une question posée à l'issu des débats. [...]
[...] La Cour de Cassation fait une application stricte de la jurisprudence Européenne. En effet, elle reprend clairement les dispositions de la Cour Européenne des Droits de l'Homme et fait une application claire et précise de l'article 6. Pourtant, il convient de constater que des dispositions aux effets similaires auraient pu être tirées du Code de procédure pénal français. Cette application personnelle du jugement est d'ailleurs à mettre en parallèle avec l'appréciation caractéristique des critères qu'elle a elle-même mis en place en droit interne. [...]
[...] En l'espèce, le président de la Cour d'Assises en posant une question spéciale de préméditation après les réquisitions et les plaidoiries viole tout simplement le principe général selon lequel tout accusé peut, en protection de sa personne, disposer du temps nécessaire à la préparation de sa défense. De la même façon le principe de l'égalité des armes est bafoué puisque l'accusé ne peut pas se défendre correctement. La cour d'Assises ayant donc méconnu les dispositions de la CEDH, c'est-à- dire qu'il incombe à la juridiction d'offrir des facilités de défense à l'accusé et notamment en l'informant en temps utile des charges retenues contre lui la Cour de Cassation va sanctionner le jugement sur le fondement de l'article 6 de la Convention Européenne en son paragraphe 3 a et b. [...]
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