Pierre Bayle, dans son ouvrage, Nouvelles de république des lettres, énonce qu'il « n'y a point de prescription contre la vérité ». Il est, en effet, exact que le procureur de la République pour découvrir la vérité peut décider de rouvrir l'enquête suite à des éléments nouveaux. Mais cette affirmation doit être tempérée par la mise en œuvre de la prescription qui interdit au titulaire de droits d'agir, de sorte que l'infraction va rester impunie.
Ainsi, dans l'arrêt du 20 février 2002, la disparition de sept jeunes femmes, entre 1975 et 1979, donne lieu à un premier rapport d'enquête, en 1979, qui est classé sans suite. En 1984, l'enquête préliminaire révèle des liens précis entre Émile E… et cinq femmes, mais les procès verbaux sont classés sans suite. Alerté par le dirigeant de l'association X, le procureur d'Auxerre adresse le 3 mai 1993 un soit transmis à la direction de l'aide sociale à l'enfance de l'Yonne pour l'interroger sur les sorts de trois disparues. Le 3 juillet 1996, six plaintes avec constitution de parties civiles sont portées devant le juge d'instruction d'Auxerre. Le 2 décembre 2000, Émile E… reconnait avoir tué les sept femmes et fourni des indications permettant de découvrir les corps de deux d'entre elles, mais le 17 janvier 2001, il rétracte ses aveux devant le juge d'instruction et invoque la prescription de l'action publique.
[...] La cour d'appel de Paris, le 2 juillet 2001 estime que l'action publique relative aux faits qualifiés d'enlèvement est éteinte, car le soit-transmis n'est pas un acte d'enquête ou de poursuite et donc n'est pas interruptif de prescription. Dès lors, le ministère public se pourvoit en cassation au moyen que le soit-transmis est un acte d'instruction interruptif de prescription et que la cour d'appel a violé les articles 224-2 du CP du CPP. Tandis que dans l'arrêt du 19 février 2008, le 15 février 2002 à Ajaccio, Antoine Y est victime d'un accident de la circulation le conduisant à l'hôpital où il décède le 24 février 2002. [...]
[...] Ainsi, dans l'arrêt du 20 février 2002, la qualification d'acte de poursuite du soit transmis a permis d'interrompre le délai de l'action publique. En effet, il est relevé en l'espèce que les infractions instantanées commises entre 1975 et 1979 revêtent la qualification d'enlèvement ce qui constitue au sens du droit pénal un crime et n'ont fait l'objet d'une plainte qu'en juillet 1996. Or, selon l'article 7 du CPP, en matière de crime la prescription est décennale et commence à courir au jour de la commission de l'infraction ou de sa tentative. [...]
[...] L'intérêt de qualifier d'acte d'instruction ou de poursuite n'est pas purement théorique, car cette qualification a des effets sur la prescription ou non de l'action publique. II/ Les incidences de la nature d'actes de poursuite des soit-transmis sur la prescription : Les actes de poursuite ou d'instruction ont pour particularité d'interrompre la prescription et la facilité par laquelle la Cour de cassation les qualifie ainsi dénote son hostilité vis-à-vis de la prescription décennale L'effet interruptif des actes d'instruction et de poursuite : Comme toute action, l'action publique qui est celle par laquelle le ministère public exerce ses prérogatives en vue de sanctionner l'atteinte portée à l'ordre public et si nécessaire de prononcer une sanction pénale ; peut s'éteindre par l'effet du temps. [...]
[...] En l'espèce, dans l'arrêt du 20 février 2002, la Cour de cassation décide de retarder le point de départ du délai en considérant le soit transmis comme un acte de poursuite. Mais pour tempérer ce propos, il convient de préciser que le soit-transmis représentait bien un acte de poursuite au sens où l'entend habituellement la chambre criminelle ce qui justifie la cassation de l'arrêt de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Paris, sans que l'on puisse voir réellement une décision de pure opportunité. [...]
[...] Donc si on replace l'intervention du soit-transmis dans le contexte de l'enquête, on remarque bien que l'intervention du parquet ne pouvait avoir d'autre finalité que le désir de mettre en mouvement l'action publique, une fois étayés les soupçons de disparitions criminelles par la remise de documents de l'association X. Ainsi, la mise en œuvre du critère théologique ne doit pas conduire à une subjectivisation des actes de poursuite ou d'instruction, mais simplement de prendre en considération des circonstances objectives dans lesquelles s'inscrit l'acte interruptif. [...]
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