Accroche sur les difficultés que pose la garde à vue française : considérée comme un acte utile à l'enquête par les services de police et le ministère de l'Intérieur, elle est l'objet de nombreuses critiques formulées tant par la doctrine libérale que par certaines organisations internationales (CPT du Conseil de l'Europe ou Amnesty International).
Relever que la garde à vue est effectivement problématique puisque, si elle a permis des succès incontestables (conduisant des auteurs d'infractions à confesser leurs forfaits), elle a aussi constitué le cadre des condamnations les plus humiliantes infligées à la France par la CEDH (Tomasi, 1992 ; Selmouni, 1999 ou Taïs, 2006) ou de la plupart des affaires signalées par la CNDS.
Souligner ensuite les atermoiements du législateur qui ne cesse de réformer la garde à vue, soit pour protéger les droits des personnes qui y sont soumises (loi du 04 janvier 1993, loi du 15 juin 2000, loi du 05 mars 2007), soit, au contraire, pour renforcer les prérogatives policières et limiter le contrôle extérieur de cette mesure (loi du 24 août 1993, loi du 04 mars 2002, loi du 18 mars 2003, loi du 09 mars 2004, loi du 23 janvier 2006).
[...]
Envisager ensuite les dispositions pertinentes du Code de procédure pénale (article 63 s. et 77) pour constater que, durant les 48 premières heures de la garde à vue, le procureur est le seul magistrat en charge de la contrôler et que l'accès à l'avocat est doublement limité (tant en termes d'exercice de sa compétence - défaut d'accès au dossier, impossibilité de participer aux entretiens - qu'en termes de moment de l'intervention - dispositions dérogatoires de l'article 706-88) tandis que la garantie du droit de ne pas s'auto-incriminer s'est fortement réduite depuis sa consécration en 2000 et que le contrôle exercé sur les conditions de déroulement de la garde à vue est inexistant en pratique.
Il convient donc de constater l'incompatibilité entre certaines des dispositions légales qui encadrent aux termes du Code de procédure pénale, la garde à vue et les exigences qui découlent de la CESDH, telle qu'interprétée par la Cour de Strasbourg (I) avant d'envisager les solutions qui pourraient être apportées en distinguant, par ordre croissant de difficulté, le contrôle de la garde à vue par le procureur de la République de l'accès à l'avocat et du rôle de ce dernier dans le cadre de la garde à vue (II) (...)
[...] Il convient donc de constater l'incompatibilité entre certaines des dispositions légales qui encadrent aux termes du Code de procédure pénale, la garde à vue et les exigences qui découlent de la CESDH, telle qu'interprétée par la Cour de Strasbourg avant d'envisager les solutions qui pourraient être apportées en distinguant, par ordre croissant de difficulté, le contrôle de la garde à vue par le procureur de la République de l'accès à l'avocat et du rôle de ce dernier dans le cadre de la garde à vue (II). Le constat de l'incompatibilité entre les normes nationales qui régissent la garde à vue et la CESDH A. Au regard de l'article 5 de la CESDH Rappeler les dispositions de l'article 5 3 de la CESDH et les dispositions combinées des articles et 706-88 CPP qui confirment que le contrôle de la privation de liberté n'est exercé que par le procureur de la République pendant les 48 première heures. [...]
[...] Dans la plupart des cas, cette vulnérabilité particulière ne peut être compensée de manière adéquate que par l'assistance d'un avocat, dont la tâche consiste notamment à faire en sorte que soit respecté le droit de tout accusé de ne pas s'incriminer lui-même. Ce droit présuppose que, dans une affaire pénale, l'accusation cherche à fonder son argumentation sans recourir à des éléments de preuve obtenus par la contrainte ou les pressions au mépris de la volonté de l'accusé (Jalloh c. Allemagne 54810/00, 100, CEDH 2006- et Kolu c. [...]
[...] Il s'ensuit qu'elles n'encadrent pas les conditions de la privation de liberté à bord, notamment quant aux possibilités pour les intéressés de contacter un avocat ou des proches. Par ailleurs, elles omettent de la placer sous le contrôle d'une autorité judiciaire (voir, mutatis mutandis, l'arrêt Amuur précité, 53). Certes, comme le souligne le Gouvernement, les mesures prises en application de la loi du 15 juillet 1994 le sont sous le contrôle du procureur de la République : il en est avisé par le préfet maritime (article 13 de la loi) et il est informé préalablement par tout moyen des opérations envisagées en vue de la recherche et de la constatation des infractions (article 16 de la loi) ; de plus, les intéressés reçoivent copie des procès-verbaux constatant les infractions (ibidem) et, à en croire le Gouvernement, aucun interrogatoire ne peut être mené à bord et la fouille corporelle est exclue. [...]
[...] La Cour prend également note à cet égard des nombreuses recommandations du CPT ( ) soulignant que le droit de tout détenu à l'obtention de conseils juridiques constitue une garantie fondamentale contre les mauvais traitements. Toute exception à la jouissance de ce droit doit être clairement circonscrite et son application strictement limitée dans le temps. Ces principes revêtent une importance particulière dans le cas des infractions graves, car c'est face aux peines les plus lourdes que le droit à un procès équitable doit être assuré au plus haut degré possible par les sociétés démocratiques Dans ces conditions, la Cour estime que, pour que le droit à un procès équitable consacré par l'article 6 1 demeure suffisamment concret et effectif (paragraphe 51 ci-dessus), il faut, en règle générale, que l'accès à un avocat soit consenti dès le premier interrogatoire d'un suspect par la police, sauf à démontrer, à la lumière des circonstances particulières de l'espèce, qu'il existe des raisons impérieuses de restreindre ce droit. [...]
[...] La Cour rappelle que si l'article 6 a pour finalité principale, au pénal, d'assurer un procès équitable devant un tribunal compétent pour décider du bien-fondé de l'accusation il n'en résulte pas qu'il se désintéresse des phases qui se déroulent avant la procédure de jugement. Ainsi, l'article 6 spécialement son paragraphe 3 peut jouer un rôle avant la saisine du juge du fond si, et dans la mesure où, son inobservation initiale risque de compromettre gravement l'équité du procès (Imbrioscia, précité, 36). [...]
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