D'un point de vue plus juridique, il s'agit ici d'une décision du 18 Juin 1998 prise par le directeur de la maison d'arrêt de Bois d'Arcy qui place Monsieur Saïd Remli à l'isolement. Remli intente alors un procès devant le Tribunal administratif de Versailles qui rejette sa requête dans un jugement du 15 Décembre 2000. Remli interjette appel et la Cour d'appel administrative de Paris annule le jugement du Tribunal administratif de Versailles et la décision de placement à l'isolement du directeur de la maison d'arrêt de Bois d'Arcy. Le Garde des Sceaux forme alors un pourvoi en plein contentieux. Le Conseil d'Etat rejette la requête du Ministre de la Justice et confirme l'arrêt de la Cour d'appel administrative de Paris en ce qu'elle annulait le jugement du 18 Juin 1998 et la décision de placement à l'isolement. Le juge motive sa décision dans le sens où il écarte l'article D283-2 du Code de Procédure pénale en reconnaissant que les conditions de détention ne font pas de l'isolement un régime ordinaire de détention. Le magistrat rappelle cependant que les actes administratifs doivent être motivés en application de l'article 1er de la loi du 11 Juillet 1979. La question posée dans cette affaire était celle de savoir si le placement à l'isolement d'un détenu contre son gré est susceptible ou non d'un recours pour excès de pouvoir. Le Conseil d'Etat considère que oui puisqu'il rejette le recours du Garde des Sceaux.
Avant la mise à l'isolement constituait une mesure d'ordre intérieur qui devait être motivée et que le juge ne contrôlait pas (I), par ce revirement, maintenant le placement à l'isolement d'un détenu contre son gré constitue une mesure susceptible de faire l'objet d'un recours pour excès de pouvoir (II)
[...] Si elles ne le sont pas, il y a risque d'annulation (CE 24 Juillet 1981 Belasri). Il y a cependant des exceptions lorsqu'un secret est protégé par la loi (la défense nationale), lorsqu'il y a une urgence ou encore lorsqu'il y a une décision implicite. De plus, une insuffisance de motivation peut faire l'objet d'une absence de motivation. La décision de la mise en isolement d'un détenu n'échappe pas à cette règle. D'ailleurs le Conseil d'Etat le rappelle dans cette affaire. [...]
[...] Mais l'article D283-2 du Code de Procédure Pénale est encore plus significatif : "La mise à l'isolement ne constitue pas une mesure disciplinaire. / Les détenus qui en font l'objet sont soumis au régime ordinaire de la détention." Le Conseil d'Etat, dans cet arrêt, s'en tient strictement au texte qu'il interprète stricto sensu. Il confirme, de cette manière le fait que la mise à l'isolement est une mesure d'ordre intérieur non susceptible de recours. Cette vision abstraite de cette mesure du Conseil d'Etat a été fortement critiquée par la doctrine et par les détenus, leurs famille et proches, qui demandent même la suppression pure et simple de cette mesure, la position de la Haute Juridiction administrative va alors s'assouplir. [...]
[...] Le Conseil d'Etat n'appelle pas un chat un chat pourtant c'est l'objet principal de ce procès. Lorsqu'il s'agit d'une décision faisant grief, une des conséquences pour l'autorité est de la motiver suffisamment c'est à dire de manière circonstanciée et non de manière stéréotypée. Il faut s'attacher au contexte de chaque cas et ne pas faire la même chose pour tous en automatisme. En effet, la motivation doit être écrite et comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait qui fondent la décision, doit être à la fois claire, concise et complète, doit être adaptée aux circonstances de l'affaire, il y a lieu d'éviter les motivations stéréotypées qui font en général l'économie d'un examen particulier du cas d'espèce. [...]
[...] Cette mesure a donc pu être condamnée par l'annulation. Dans la mesure où ce qui est qualifié de mesure d'ordre intérieur est, en ce moment, assez variable, il est intéressant de se demander ce qui a motivé le changement de position du Conseil d'Etat en ce qui concerne le placement à l'isolement. Les raisons de ce revirement On peut imaginer plusieurs motifs à ce revirement de jurisprudence. Tout d'abord, peut-être que nous sommes dans un courant où l'administration veut se rapprocher de ses administrés, rendre leur relations plus étroites et surtout plus positives. [...]
[...] Et encore plus à propos, il faut citer les jugements TA Paris 23 mars 1995 Menenger ; TA Limoges 30 avril 1998 Morales ; TA Toulouse 11 août 1998 Yvert. Mais le plus marquant est l'arrêt Fauqueux rendu par le Conseil d'Etat le 28 Février 1996. Cet arrêt est très important dans la mesure où il fixait le placement à l'isolement en tant que mesure d'ordre intérieur. Dans cette décision la mise à l'isolement est vue de façon positive et textuelle. En effet, l'article D283-1 du Code de Procédure Pénale stipule que cette mesure peut être prise "par mesure de précaution ou de sécurité". [...]
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