Le placement en garde à vue en tant que privation de liberté doit être encadré de façon stricte. Aussi, l'arrêt en date du 8 septembre 2004 rendu par la Chambre criminelle vient en délimiter les contours. En effet, en tant que mesure de contrainte, la garde à vue permet à un officier de police judiciaire de garder à sa disposition pendant 24 heures un suspect dès lors qu'il ressort de l'enquête qu'il est nécessaire de le garder à vue. De plus, la loi du 15 juin 2000 a limité cette possibilité aux personnes contre lesquelles il existe des indices, soit une ou plusieurs raisons plausibles, faisant présumer la commission ou la tentative de commission d'une infraction. En l'espèce, Daniel B, soupçonné de détournement, se rend plusieurs fois soit sur convocation soit spontanément au commissariat pour y être auditionné. En suivant le conseil d'un dépositaire de l'autorité publique à qui il a avoué avoir commis les détournements, le soupçonné se rend au commissariat de police spontanément et avoue ses agissements. Il est alors assigné en justice pour détournement. Cependant, lors de ses trois auditions, le prévenu n'a pas été placé en garde à vue, il conteste ainsi les conditions de ses auditions et demande la nullité des procès verbaux relatifs aux auditions en question. La Cour d'appel d'Agen, dans un arrêt du 23 octobre 2003, le déboute aux motifs que l'officier de police judiciaire, en l'absence de contrainte à l'encontre d'un témoin, n'a aucune obligation de placer ce dernier en garde à vue. Le prévenu forme alors un pourvoi en cassation où « il est fait grief aux enquêteurs de l'avoir entendu sans l'avoir fait bénéficier des garanties liées au régime de la garde à vue », « alors que, lorsqu'il existe des indices permettant de penser qu'une personne a pu commettre une infraction, elle ne peut être entendue en simple qualité dé témoin et doit bénéficier des droits de la personne gardée à vue ». La Chambre criminelle de la Cour de cassation rejette le pourvoi. En effet, selon elle aucune disposition légale ou conventionnelle n'impose qu'une personne contre laquelle il existe des indices permettant de penser qu'elle a commis une infraction, soit placée en garde à vue. On se pose alors la question suivante : l'existence d'indices à l'encontre d'une personne faisant présumer la commission ou la tentative de commission d'une infraction oblige-t-elle l'officier de police judiciaire à placer cette personne en garde à vue ?
L'arrêt rendu par la Chambre criminelle de la Cour de cassation pose les conséquences de la définition de la garde à vue : les officiers de police judiciaire qui usent de la contrainte pour retenir une personne pour les nécessités de l'enquête doivent le placer en garde à vue ; inversement, les officiers de police judiciaire qui n'usent pas de contrainte pour obtenir d'une personne sa participation à l'enquête n'ont pas à la placer en garde à vue. Cela subordonne donc l'obligation du placement en garde à vue à l'utilisation de mesures coercitives par les officiers de police judiciaire (I). Ainsi, la Chambre criminelle de la Cour de cassation confirme une définition classique du placement en garde à vue, définition dont les conséquences sont critiquables (II).
[...] En retenant la notion de contrainte comme seul critère du placement en garde à vue, la Chambre criminelle prive d'effectivité le statut du suspect. Corrélativement, elle porte atteinte aux droits de la défense étant donné que ne sont pas protégés les soupçonnés libres, alors que les autres c'est-à-dire ceux placés en garde à vue jouissent d'un statut protecteur. Cette atteinte est d'autant plus vraie que la jurisprudence applique à la notion de contrainte une définition extensive ce qui aboutit à une atteinte encore plus profonde au régime protecteur du statut de suspect. [...]
[...] Le prévenu forme alors un pourvoi en cassation où il est fait grief aux enquêteurs de l'avoir entendu sans l'avoir fait bénéficier des garanties liées au régime de la garde à vue alors que, lorsqu'il existe des indices permettant de penser qu'une personne a pu commettre une infraction, elle ne peut être entendue en simple qualité dé témoin et doit bénéficier des droits de la personne gardée à vue La Chambre criminelle de la Cour de cassation rejette le pourvoi. [...]
[...] En outre, l'arrêt rendu par la Chambre criminelle le 15 septembre 2004 amplifie cette évolution. Dans cet arrêt, le moyen soutenait que la garde à vue à laquelle le demandeur au pourvoi avait été soumis était nulle pour notification tardive des droits. Les gendarmes, en effet, étaient intervenus dans un campement où ils avaient procédé à des perquisitions à la suite desquelles ils avaient notifié leurs droits aux personnes placées en garde à vue, faisant remonter cette mesure au moment du début de leur intervention. [...]
[...] Aussi, l'arrêt en date du 8 septembre 2004 rendu par la Chambre criminelle vient en délimiter les contours. En effet, en tant que mesure de contrainte, la garde à vue permet à un officier de police judiciaire de garder à sa disposition pendant 24 heures un suspect dès lors qu'il ressort de l'enquête qu'il est nécessaire de le garder à vue. De plus, la loi du 15 juin 2000 a limité cette possibilité aux personnes contre lesquelles il existe des indices, soit une ou plusieurs raisons plausibles, faisant présumer la commission ou la tentative de commission d'une infraction. [...]
[...] Comment ne pas voir une contrainte dans l'utilisation de la force pour neutraliser l'individu ? L'irrémédiable effet de l'inconséquence du statut de suspect et l'atteinte aux droits de la défense La définition classique de la garde à vue n'est pas sans conséquence ; non seulement seule la contrainte peut obliger les officiers de police judiciaire à placer en garde à vue l'intéressé mais encore faut-il, si contrainte il y a eu, que celle-ci atteigne un degré assez fort pour que la jurisprudence la qualifie. [...]
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