En l'espèce, il s'agit d'une requérante qui porta plainte contre ses enfants pour violence volontaire le 31 juillet 1995. Ils s'étaient vus à l'occasion d'un problème sur le non-paiement d'une pension alimentaire qu'elle recevait de leur part en raison de son état de santé. Elle prétend alors que ses enfants lui auraient administré deux injections d'un produit avec une seringue, qui lui a causé une incapacité totale de travail supérieure à 8 jours, devenue inférieure pendant l'instruction. Durant ladite instruction, elle se constitua partie civile.
Le 14 mars 1997, le juge d'instruction prononça une ordonnance de non-lieu en l'absence de charges concrètes contre le fils de la requérante, qui lui avait injecté un produit inoffensif à cette dose, et qu'il était difficile de l'auditionner car vivant à l'étranger sans adresse précise. La requérante refusa lors de signer la déclaration d'appel rédigée par le greffier du juge d'instruction car elle en avait rédigé une personnelle.
Par un arrêt du 8 juillet 1997, la Chambre d'accusation de la Cour d'appel de Saint-Denis déclara son appel irrecevable pour non-respect du délai légal et défaut de signature de la déclaration d'appel.
Le 11 juillet 1997, elle forma un pourvoi en cassation aux motifs que la Cour d'appel n'avait pas rendu un arrêt ayant une base légale car les juges n'avaient pas assisté à toutes les audiences. Elle ajoute que les motifs invoqués par les juges étaient insuffisants car ils ne répondaient pas à tous les arguments qu'elle avait présentés pendant l'audience.
La Cour de cassation rejeta son pourvoi par un arrêt du 21 avril 1998, aux motifs que les juges du fond avaient bien respecté la procédure de l'article 485 du code de procédure pénale et que le délai d'appel était réellement dépassé. La requérante se plaint alors de cet arrêt et de l'injustice de la procédure antérieure, et invoque alors l'article 6 paragraphe 1 de la convention européenne des droits de l'homme.
La Cour européenne doit alors déterminer si la France a bien respecté les droits d'un procès équitable réclamés par la requérante. Elle doit donc décider si l'article 6 paragraphe 1 de la convention est applicable en l'espèce, c'est-à-dire dans le cas d'une plainte avec constitution de partie civile, et si tel est le cas, s'il a été violé ou pas par les juges français. Cet arrêt va pouvoir montrer comment la Cour européenne fait évoluer sa jurisprudence pour une plus grande sécurité juridique. En effet dans cet arrêt, elle décide d'une applicabilité plus large de l'article 6 sur le volet civil.
Nous pouvons ainsi étudier dans une première partie la modification de la jurisprudence pour clarifier l'applicabilité de l'article 6. Puis dans une seconde partie, l'explication d'une plus grande protection des victimes, par une limitation des exceptions à l'application de l'article 6.
[...] Il était donc essentiel que la Cour européenne éclaircisse sa jurisprudence sur ce point. Elle conclut alors au fait qu'il ne fait aucun doute qu'une plainte avec constitution de partie civile constitue en droit français, une action civile tendant à la réparation d'un préjudice résultant d'une infraction. La Cour décide alors que la nature même de la constitution de partie civile est d'obtenir une réparation, donc qu'elle constate un droit à caractère civil et ainsi, que l'article 6 trouve à s'appliquer dans ce cas. [...]
[...] Arrêt Perez contre France, CEDH février 2004 L'article 6 de la convention européenne des droits de l'homme prévoit que toute personne a droit à un procès équitable, ce qui entraîne plusieurs garanties, à savoir le droit à un tribunal établi par la loi, un tribunal indépendant et impartial, une exigence de rapidité, le respect d'une exigence d'équité et de publicité. De plus, il prévoit en matière pénale des garanties spéciales qui sont le droit à la présomption d'innocence et le respect des droits de la défense. [...]
[...] On peut craindre que ce contrôle minimal ne soit pas suffisant pour constater une réelle violation de l'article 6. Ainsi, même si la Cour a élargi les possibilités d'applicabilité de l'article on peut penser qu'elle ne conclura que rarement à sa violation ce qui n'augmente pas la protection des victimes sur l'application réelle de leurs droits. Toutefois, il convient de nuancer les craintes dans la mesure où le cas d'espèce ne comportait pas de violation flagrante du droit au procès équitable. [...]
[...] Dans l'affaire Tomasi contre France du 27 août 1992, M. Tomasi avait porté plainte avec constitution de partie civile pour des sévices subis lors d'une garde à vue. La Cour avait estimé que l'article 6 paragraphe 1 était applicable en l'espèce. En effet, elle se base sur une jurisprudence de la Cour de cassation du 9 février 1961 qui précise que l'article 85 du code de procédure pénale qui prévoit le dépôt de plainte avec constitution de partie civile n'est qu'une application de l'article 2 du même code qui prévoit que l'action civile en réparation du dommage causé par un crime, un délit ou une contravention, appartient à tous ceux qui ont personnellement souffert du dommage causé par l'infraction. [...]
[...] Ainsi la demande en réparation doit continuer à être exécutée par rapport à l'issue déterminante de la procédure devant les juridictions pénales. De ce fait, l'application de l'article 6 paragraphe 1 est possible même en cas de procédures pénales et civiles concomitantes. Cependant, la Cour pose une limite à l'application de l'article 6. En effet, elle considère qu'il ne peut pas être proclamé pour défendre les droits à un procès équitable d'une victime qui se constitue partie civile dans des buts uniquement répressifs. Elle fait ainsi le lien entre la constitution de partie civile et l'action publique en droit français. [...]
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