Les juges du fond ont-ils le droit de requalifier une affaire en ajoutant des faits et donc de faire abstraction de l'ordonnance des premiers juges ?
Ce dernier arrêt est condamné par la Cour de cassation au motif que : “les faits pouvant constituer le crime de coups et blessures volontaires sur mineure de 15 ans ayant entraîné la mort sans intention de la donner, dont les prévenus n'avaient pas été inculpés, avaient été exclus de la poursuite par l'ordonnance de non-lieu conforme aux réquisitions du Ministère public, et alors que le crime est distinct en ses éléments constitutifs du délit prévu par l'article 63 alinéa 2 du Code pénal, seul retenu par la prévention, les juges du fond ont ajouté aux faits de la poursuite et ainsi excédé leur pouvoir”.
Ainsi, la Cour de cassation réaffirme, dans son arrêt, la liberté de qualification par le juge (I) avant d'en énoncer les limites (II)...
[...] La limite de la qualification des faits La réaffirmation de cette règle que prononce la Cour de cassation s'accompagne, néanmoins, d'une limite nécessaire au respect des droits de la défense. En effet, le juge en procédant à une requalification ne doit pas être amené à viser des faits dont il n'est pas saisi, c'est à dire modifier la prévention, à moins que le prévenu n'ait formellement accepté le débat sur les faits nouveaux et ait été en mesure de se défendre. [...]
[...] En outre, cette qualification des faits par le juge lui permet de se prononcer compétent ou incompétent selon l'affaire qui lui est présentée. En effet, si une juridiction, suite à la requalification, se trouve alors saisie d'une infraction qui excède sa compétence, elle devra rendre une décision d'incompétence et renvoyer l'affaire devant les autorités judiciaires compétentes. Par contre elle peut statuer sur des infractions de moindre gravité. En l'espèce, la Cour d'appel, après avoir requalifié les faits dont elle avait été saisie en crime, s'est déclarée incompétente. [...]
[...] L'obligation de respecter cette limite en vue de respecter les droits de la défense Cette condamnation de l'arrêt du 22 avril 1986 fait état d'une violation de la procédure mais également des droits de la défense. En effet, il est rappelé que : “toute personne a droit à ce que sa cause soit équitablement entendue”. Dans le premier moyen, la Cour de cassation rappelle que la requalification des faits ne doit pas porter atteinte à la défense si elle fait état de l'incompétence de la juridiction saisie : " que le fait d'entendre en leur plaidoiries, lorsque celle-ci est contestée, aboutit à infliger au prévenu un traitement inéquitable, et conduit du reste à une violation des droits de la défense dans la mesure où l'audition des parties civiles est susceptible d'avoir une influence sur la décision du juge”. [...]
[...] Cette requalification que censure la Cour de cassation montre ici la limite des prérogatives accordées au juge. En effet, la Cour d'appel avait été saisie sur des faits prononcés par une ordonnance retenant le chef d'omission de porter secours à personne en danger et : “disait n'y avoir lieu à suivre contre quiconque du chef de coups et blessures volontaires sur mineure de 15 ans ayant entrainé la mort sans intention de la donner”. L'arrêt de la Cour d'appel en faisant abstraction complète de l'ordonnance est donc censuré par la Cour de cassation : juges du fond ont ajouté aux faits de la poursuite et ainsi excédé leur pouvoir”. [...]
[...] LA LIBERTE DE QUALIFICATION DES FAITS PAR LE JUGE La Cour de cassation réaffirme dans son arrêt la règle de qualification des faits par le juge avant d'en montrer l'intérêt d'un point de vue de la compétence de la juridiction mais également de la détermination de la peine encourue par l'auteur de l'infraction. A. Réaffirmation de cette règle On dit que les juridictions sont maîtres de la qualification. En effet, la juridiction saisie peut disqualifier puis requalifier les faits dont elle a connaissance. [...]
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