Le résultat du crime d'empoisonnement sera au cœur de notre étude, en ce qu'elle nous amènera à étudier le traitement de la notion de résultat dans la caractérisation de l'infraction d'empoisonnement réprimée par le droit pénal en tant que crime.
Et pour cause, l'empoisonnement est un acte criminel connu, redouté et réprimé depuis l'Antiquité. C'est une infraction de commission en ce qu'il constitue une variété d'homicide volontaire mais est réprimé de manière spécifique. En effet, l'article 221-5 du Code pénal de 1992 maintient une incrimination autonome pour l'empoisonnement et le définit comme « le fait d'attenter à la vie d'autrui par l'emploi ou l'administration de substances de nature à entraîner la mort » alors que le meurtre est, en vertu de l'art 221-1 du même Code « Le fait de donner volontairement la mort à autrui ».
[...] En effet, l'infraction d'empoisonnement relève de la catégorie des infractions formelles, la mort est donc bien l'enjeu du comportement visé, étant parfaitement intégré dans l'incrimination (au regard du résultat sociologique), mais elle ne participe pas pour autant à la consommation de l'infraction. Dès lors, tout en partageant avec le meurtre la prévention d'un résultat mortel, l'empoisonnement s'en sépare nettement sur le plan matériel. Mais cette considération du résultat mortel en tant qu'animus necandi revient à rapprocher l'infraction formelle de l'empoisonnement avec l'infraction matérielle du meurtre, tous deux exigeant l'animus necandi alors que la mort, objet du dol spécial, n'est pas une donnée participant à la matérialité de l'infraction d'empoisonnement. [...]
[...] Mais alors cette indifférence de résultat juridique quant à la matérialité du crime d'empoisonnement facilite sa répression, témoignant de la politique criminelle très répressive. L'indifférence du résultat juridique dans une logique de politique répressive Les infractions formelles ne comportent pas, au titre de leurs éléments constitutifs, de résultat juridique. Autrement dit, leur consommation n'est pas subordonnée à l'atteinte effective aux valeurs sociales protégées par l'incrimination. Aussi, leur résultat légal en tant que moment où un comportement rentre dans le champ répressif, est placé en amont de celui des infractions matérielles sur le chemin du crime. [...]
[...] En ce sens, la répression de l'empoisonnement est plus aisée que celle du meurtre. Le non-traitement du résultat juridique par le droit pénal apparaît nettement permettant la mise en œuvre d'une attitude répressive. L'emploi et l'administration (termes larges pouvant recouvrir de nombreux comportements répréhensibles, l'emploi est entendu comme l'acte précédant l'administration) de substances mortifères à autrui sont incriminés à raison de la mort qu'elle peut entraîner, le décès de la victime n'est pas une composante de l'infraction d'empoisonnement. C'est le comportement de l'empoisonneur qui est incriminé et l'infraction est consommée même si la victime en réchappe, par exemple si les secours interviennent assez vite pour lui administrer un antidote. [...]
[...] C'est pour protéger la société contre le résultat juridique (qui est en quelque sorte la réalisation du résultat sociologique craint) que le législateur a incriminé l'empoisonnement, distinctement de l'homicide volontaire au sens large. Et pour cause, l'empoisonnement est une infraction qui a toujours fait peur et qui appelle alors à une répression efficace et spécifique. L'atteinte à la valeur sociale protégée (définition du résultat sociologique) par le législateur qui est la vie des personnes n'a pas besoin d'être effectivement atteinte pour que la répression de l'empoisonnement intervienne. [...]
[...] Plus précisément donc, l'infraction formelle ne nécessite qu'un résultat matériel, le résultat matériel est la conséquence très directe de l'acte matériel lui-même tellement que l'acte matériel et le résultat matériel tendent à se confondre. Toute infraction comporte nécessairement ce résultat matériel. Pour l'empoisonnement, l'acte matériel est l'emploi ou l'administration de substance mortifère et le résultat matériel est le fait que la victime se soit bien vue administrer cette substance mortelle (que son décès en résulte ou non). En d'autres termes, la consommation de l'infraction d'empoisonnement n'est pas subordonnée à la survenance de la mort, à l'atteinte effective aux valeurs sociales protégées par l'incrimination. [...]
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